Chez le cheval, comme chez l’homme, l’arthrose est une maladie articulaire très fréquente. Si aucun traitement n’est disponible à ce jour pour soigner la maladie, la recherche de nouvelles stratégies thérapeutiques avance. Rencontre avec Aurélie Cullier, doctorante en biologie au laboratoire BIOTARGEN (EA 7450).
L’arthrose : un enjeu de santé public majeur ?
L’arthrose touche en effet près de 10 millions de personnes en France, la majorité des patients ayant plus de 65 ans. La maladie se caractérise par une dégénérescence du cartilage : ce tissu, qui protège les os des frottements, se dégrade progressivement. Pour les patients, la maladie se traduit par de fortes douleurs articulaires et, à terme, par une perte de mobilité. Lorsque les premiers symptômes apparaissent, la maladie en est déjà malheureusement à un stade avancé. Il existe des traitements symptomatiques permettant de soulager la douleur, mais aucun traitement n’offre, à ce jour, un espoir de guérison : les lésions du cartilage sont irréversibles. Dans le contexte d’un vieillissement croissant de la population, le développement de stratégies thérapeutiques est donc crucial.
Votre thèse porte sur l’arthrose du cheval. Quel est le lien entre l’homme et l’animal ?
L’arthrose est une maladie très courante chez le cheval — c’est d’ailleurs la première cause de retrait des chevaux de course. L’articulation absorbe tous les chocs : les contraintes mécaniques sur les genoux, la hanche et la colonne vertébrale sont les mêmes pour les chevaux de course que pour les sportifs et athlètes de haut niveau. La santé et le bien-être des chevaux est un enjeu important pour l’ensemble de la filière équine, dont le dynamisme est un véritable atout pour la Normandie. Nos recherches s’inscrivent dans un environnement régional propice à la recherche équine. Au laboratoire BIOTARGEN, nous travaillons donc à l’interface entre santé humaine et santé vétérinaire, selon l’approche « one health / one medicine », soit « une seule sante / une seule médecine » : le cheval étant un patient et le meilleur modèle d’étude pour les affections articulaires, les études menées chez l’animal servent également à faire avancer les recherches chez l’homme. Développer un traitement thérapeutique est toujours un chemin long à parcourir : cette approche nous permet de faire d’une pierre deux coups !
Quel est l’objectif de votre thèse ?
Il n’existe actuellement aucun traitement pour soigner l’arthrose, mais plusieurs pistes sont à l’étude. L’une d’elles consiste à injecter un hydrogel contenant de l’acide hyaluronique directement dans une articulation lésée, pour protéger le cartilage contre les frottements. Cette stratégie, déjà utilisée chez l’homme et chez le cheval, est efficace, mais sur une courte durée seulement. L’objectif de ma thèse, menée au laboratoire BIOTARGEN, est de tester de nouvelles formulations d’hydrogels pour le développement de stratégies thérapeutiques innovantes et efficaces.
Vous commencez votre deuxième année de doctorat. Comment se déroulent vos recherches ?
Nous disposons de trois formulations d’hydrogel élaborées par nos partenaires de l’université de Montréal (Canada). L’idée est de trouver la meilleure combinaison — celle qui permettra de freiner la destruction du cartilage, de le protéger et de le régénérer. Au laboratoire BIOTARGEN, nous testons l’efficacité de ces hydrogels et vérifions s’ils ont un éventuel effet toxique. Nos résultats sont encore préliminaires, mais néanmoins encourageants. Dans l’immédiat, ces tests sont menés in vitro sur des cellules du cartilage, mais aussi ex vivo sur des organoïdes de tissu cartilagineux. Les organoïdes sont conçus à partir de cellules du cartilage cultivées au sein d’éponges de collagène : on obtient ainsi des tissus en 3D, proches et représentatifs du cartilage réel. L’utilisation des organoïdes s’inscrit dans une démarche de recherche éthique, car, en multipliant les tests préliminaires, nous contribuons à diminuer l’impact sur l’expérimentation animale.
Direction de thèse : Magali Demoor (directrice de l’unité BIOTARGEN)
Co-direction de thèse : Fabrice Audigié (directeur du CIRALE)
Ce projet de thèse est cofinancé par le Fonds européen de développement régional.