Projet européen CobBauge
La bauge a longtemps été prisée dans nos régions pour construire des bâtiments agricoles et des habitations. Cette technique ancestrale pourrait revenir au goût du jour pour les maisons à basse consommation énergétique.
Un matériau aux multiples avantages
La bauge est un matériau traditionnel de nos régions normandes, bretonnes et du sud de l’Angleterre. Composé de terre, de paille et d’eau, ce matériau naturel constitue une ressource locale, écologique et renouvelable, à faible impact environnemental. La bauge a pourtant été peu à peu délaissée au profit d’autres matériaux de construction, comme la brique ou encore le béton. Et si ce savoir-faire était réhabilité pour les nouvelles générations de maisons écologiques ? « La bauge pourrait constituer une solution alternative écoresponsable, puisqu’elle allie des performances énergétiques et un bilan environnemental très favorables », souligne Hasna Louahlia, professeur des universités au LUSAC, site de Saint-Lô (EA 4253). « C’est ce que nous démontrons avec le projet européen CobBauge ».
Une technique ancestrale… nouvelle génération
Porté par l’université anglaise de Plymouth, le projet CobBauge propose de revaloriser cette technique, mais avec de nouveaux mélanges et procédés plus performants et conformes aux réglementations actuelles de la construction. La première phase du projet, démarré en 2017, a permis de mettre au point différentes formulations de bauge, basées sur les sols anglais et français. Les échantillons ont été testés au LUSAC, sur le site de Saint-Lô, pour déterminer la meilleure combinaison possible. « Le LUSAC est l’un des six partenaires du projet européen, précise Hasna Louahlia. Notre équipe à Saint-Lô est spécialisée dans l’efficacité énergétique et le transfert thermique : notre rôle consiste à étudier les performances de ces nouveaux matériaux, notamment en matière de température, d’isolation, et d’absorption d’humidité ». Les premiers résultats démontrent des performances incontestables : la consommation d’énergie annuelle des maisons peut être réduite de 20 à 50% avec la bauge.
Quand des maisons en bauge (re)sortent de terre
Reste à tester ces nouveaux matériaux en condition réelle. C’est l’objectif de la deuxième phase du projet, qui vient de débuter avec la construction de deux maisons pilotes des deux côtés de la Manche. En France, c’est le Parc naturel régional des marais du Cotentin et du Bessin qui accueille ce bâtiment témoin. « Des capteurs ont été installés sur les murs », indique Kaoutar Zeghari, doctorante en thermique au LUSAC Saint-Lô. « L’idée est de mesurer les différents paramètres durant deux hivers consécutifs, pour évaluer l’influence des conditions météorologiques sur les performances énergétiques annuelles de ces bâtiments ». Cette deuxième phase apportera de nouvelles réponses, avec un objectif : disposer d’indicateurs fiables pour convaincre les professionnels de la construction d’utiliser ce matériau.
Mais, outre les régions frontalières de la Manche où la bauge est actuellement testée, ce matériau pourrait-il être utilisé ailleurs ? « Nous développons un programme de simulation permettant de prédire le comportement de ces matériaux dans d’autres régions soumises à des climats différents », précise Hasna Louahlia. Alors que le secteur du bâtiment représente 44 % de l’énergie consommée en France, cette nouvelle génération de bauge offre la promesse de constructions plus respectueuses de l’environnement.
Le projet CobBauge s’inscrit dans le cadre des actions de l’Union Européenne visant à réduire les émissions de CO2. Il a été sélectionné dans le cadre du programme de coopération transfrontalière INTERREG VA France (Manche) / Angleterre, cofinancé par le FEDER et réunissant 6 partenaires français et britanniques : l’université de Plymouth, l’ESITC Caen, le Parc naturel régional des Marais du Cotentin et du Bessin, Earth Building UK and Ireland (EBUKI), le LUSAC (EA 4253) et Hudson Architects.