Que signifie « juger » ? Comment répondre aux attentes des victimes ? Quel est le rôle du juge ? Ces questions étaient au cœur du colloque “La nécessité de juger”, qui a réuni juristes, magistrats et avocats à l’université de Caen Normandie, les 14 et 15 octobre 2022. Avec une soirée ouverte au grand public autour des acteurs et témoins des grands procès des XXe et XXIe siècles.
« Ce procès était extrêmement important, bouleversant et émouvant, » déclarait Me Olivia Ronen, avocate au Barreau de Paris, en juin 2022, au lendemain du procès des attentats du 13 novembre 2015. Historique, ce procès l’aura été à plus d’un titre — plus grande audience criminelle jamais organisée en France, 148 jours d’audience, 2 400 parties civiles. Mais dans quelle mesure ce procès était-il « extrêmement important » ? Que peut la justice, si elle n’a pas le pouvoir de réparer, de rendre la vie ou d’annihiler les souffrances ? Le colloque « La nécessité de juger », qui s’est tenu à l’université de Caen Normandie du 14 au 16 octobre, a exploré ces questions au prisme du droit, de la philosophie, de l’histoire, ou encore des neurosciences.
« La première journée était notamment consacrée aux liens entre justice et temps, » précise Armelle Gosselin-Gorand, enseignant-chercheur en droit privé. « Les délais de prescription pour les crimes et délits suscitent souvent de vifs débats. Si ces délais sont allongés, les plaignants et plaignantes auront en effet plus de temps pour déposer des recours. Mais plus l’affaire est éloignée dans le temps, plus la science devient nécessaire à l’établissement de la vérité, car il y a des enjeux de preuves. Et plus l’affaire est éloignée dans le temps, plus il a de chances que se créent de faux souvenirs. Hervé Platel, professeur de neuropsychologie, a apporté son éclairage sur le fonctionnement de la mémoire et la construction de ces faux souvenirs, qui peuvent être perturbants pour un juriste confronté à la parole d’une victime. »
Le colloque a également abordé, dans une perspective philosophique et historique, le point de vue des victimes et le rôle du juge. « Nous avons eu le plaisir d’échanger avec l’écrivain Marek Halter qui, né à Varsovie en 1936, a vécu intimement la persécution des Juifs d’Europe, ou encore Philippe Duperron, président de l’association “13onze15 : Fraternité et Vérité”, » précise Armelle Gosselin-Gorand. Ouvert à la formation continue des avocats, ce colloque a laissé une large place à la réflexion sur l’évolution de la justice pénale et l’avenir des cours d’assises.
Une soirée grand public était organisée autour des acteurs et témoins des procès des XXe et XXIe siècles : l’écrivain Marek Halter ; Dominique Simonnot, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté et ancienne journaliste ; ainsi que trois avocats ayant participé à des procès historiques, Me Christian Charrière Bournazel (procès de Klaus Barbie et de Maurice Papon), Me Bertrand Favreau (procès de Klaus Barbie), Me Olivia Ronen (procès des attentats du 13 novembre 2015).
En pratique
14 & 15 octobre 2022
Campus 1 · Amphithéâtre Pierre Daure
Ce colloque est organisé par le Barreau de Caen, en collaboration avec l’université de Caen Normandie, l’Institut caennais de recherche juridique (ICREJ · UR 967), l’École des avocats du Grand Ouest, avec la participation de la Cour d’appel de Caen.
Programme
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