Le concept de chimie verte est apparu après la mise en place de mesures contraignantes en matière de sécurité des procédés et de toxicité des produits. Jacques Rouden, coordinateur de l’équipe Catalyse et applications du Laboratoire de chimie moléculaire et thio-organique (LCMT) est très impliqué dans la chimie pour le développement durable.
Qu’est-ce que le concept de chimie verte ?
À la fin des années 1990, Paul Anastas et John Warner, de l’Agence américaine pour l’environnement, ont défini les 12 principes de la chimie verte. L’objectif est de limiter l’impact écologique des procédés chimiques, en réduisant les déchets et en ayant recours à des méthodes plus sûres et plus efficaces et en exploitant des produits biosourcés. L’idée est de produire mieux, en consommant et en rejetant moins.
L’un des axes de recherches du LCMT concerne l’activation des réactions chimiques en mettant au point des procédés plus respectueux de l’environnement. Dans ce domaine, nous nous intéressons à la catalyse (un procédé au cœur de la chimie verte) qui permet d’accélérer une réaction chimique, donc d’en diminuer la température pour limiter les réactions indésirables et la consommation d’énergie. Nos efforts portent sur des composés moins toxiques — des catalyseurs dits organiques ou organocatalyseurs, ne contenant que du carbone, et des composés organométalliques renfermant au moins un atome de métal. Nous reproduisons en laboratoire ce que font les enzymes, les catalyseurs des réactions biologiques. Nous nous inspirons de la nature !
Quels produits biosourcés font l’objet de vos travaux ?
Nous étudions un autre principe de la chimie verte, le recours aux matières premières renouvelables. Depuis une vingtaine d’années nos travaux sur la cytisine répondent au principe de valorisation des produits biosourcés mis en avant par la chimie verte. La cytisine est une molécule extraite des graines du cytise (Cytisus laburnum), un arbuste à fleurs jaunes. Cette molécule, qui possède une action sur le système nerveux central similaire à celle de la nicotine, a ainsi été utilisée pour le sevrage tabagique.
Molécule bioactive facile à extraire à faible coût, nous avions initialement modifié la cytisine pour l’utiliser en imagerie médicale. Nous travaillons aujourd’hui dans le cadre du programme Européen INTERREG VA « Labfact » sur la création de molécules originales via des technologies innovantes respectueuses de l’environnement. Dans ce cadre, nous avons initié la synthèse d’analogues de la cytisine dans le but de développer de nouvelles molécules actives contre certains cancers. En effet, la cytisine possède une structure similaire à celle d’un anticancéreux bien connu, la camptothécine.