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L’acquisition du français par les apprenants scandinaves

  • Dernière modification de la publication :11 mai 2023
  • Post category: International

Colloque – Vendredi 20 mai 2022

L’acquisition des langues porte sur le processus de saisie de phénomènes linguistiques complexes qui convoque des mécanismes divers aux différentes étapes de la progression de l’apprenant. Un de ces mécanismes est celui du transfert. On constate depuis longtemps que les connaissances de la langue maternelle peuvent se voir transférer à tous les aspects des langues dans les productions de la langue seconde. Toutefois, des transferts, positifs comme négatifs, peuvent également provenir d’autres langues secondes, d’où l’intérêt de contextes où les apprenants sont déjà multilingues. C’est le cas du contexte scandinave où, en plus de la langue maternelle, l’anglais très largement maîtrisé peut avoir un impact sur le français troisième langue. Ce type de fonctionnement permet, par contraste, de souligner les mécanismes d’acquisition qui ne dépendent pas des langues en présence, mais de facteurs généraux de complexité.

Programme des communications

Par Eric Leroy du Cardonnoy, vice-président en charge de la Recherche, et Thierry Ruchot, directeur du CRISCO – EA4255

Par Malin Ågren (Lund)

Résumé
L’appropriation du système morphosyntaxique du français L2 des apprenants suédois attire l’attention des linguistes depuis plusieurs décennies (Bartning & Schlyter 2004). Selon la recherche antérieure, l’un des traits grammaticaux les plus longs à maîtriser pour ce groupe d’apprenants semble être l’accord sujet-verbe en nombre (SG : la fille prend vs. PL : les filles prennent). Il s’agit en effet d’un domaine où les apprenants suédois continuent à faire des erreurs même aux niveaux avancés (PL : les filles *prend).
Dans cette étude, je discuterai ces difficultés des apprenants suédois comme un reflet de la fréquence des formes verbales au singulier et au pluriel dans la langue française mais aussi en termes de transfert du système morphosyntaxique du suédois (qui manque d’accord sujet-verbe en nombre et en personne). L’analyse empirique est basée sur des données provenant d’une étude qui compare la production orale en français L2 des apprenants suédois avec celle des apprenants autrichiens et italiens (Ågren et al. 2020).

Par Béatrice Prat (NTNU) et Hans Petter Helland (Oslo)

Résumé
Dans cette contribution, nous souhaitons examiner les mécanismes de transfert des propriétés linguistiques du norvégien (L1) ou de l’anglais (L2) dans l’acquisition des pronoms personnels objets du français (L3) par les étudiants norvégiens natifs. Notre objectif est d’identifier dans l’interlangue des étudiants en cours d’acquisition, les contextes dans lesquels on est en présence de transferts négatifs ou positifs, et d’en mesurer l’importance aux différents niveaux.
Nous basons cette étude sur les résultats d’une étude empirique menée auprès des étudiants des universités d’Oslo et de Trondheim, destinée à examiner leurs performances en ce qui concerne les caractéristiques du positionnement des pronoms clitiques objets d’une part, et la morphologie casuelle d’autre part, dans différents contextes. L’étude comporte un test de traduction, un test de jugements de grammaticalité et un questionnaire portant sur les facteurs extra-linguistiques.

Par Eirik HVIDSTEN (NTNU)

Résumé
Le présent article examinera l’acquisition du pronom clitique quantitatif en en français L2 par des apprenants norvégiens. Contrairement au français, le norvégien n’a ni pronoms quantitatifs ni clitiques syntaxiques dans son inventaire grammatical, différence qui peut poser problème pour l’acquisition de en par des apprenants de langue maternelle norvégienne. Notre étude se basera sur un test d’acceptabilité et un test de production auprès de 32 étudiants norvégiens au bout d’une année d’études universitaires. Le centre d’intêrét de l’article se concentrera autour de trois objets d’étude principaux : (i) les propriétés non-référentielles de en, (ii) la non-pronominalisation associée aux expressions de quantité dans la langue maternelle et (iii) le placement de en en tant que clitique par rapport au verbe. Les résultats présentés dans cet article montreront que l’acquisition de en constitue un véritable défi pour les apprenants norvégiens, dont la langue maternelle diffère considérablement du français à cet égard.

Par Nelly Foucher Stenkløv (NTNU), Hans Petter Helland (Université d’Oslo) et Pierre Larrivée (UNICAEN)

Résumé
Tandis que l’acquisition des subordonnées relatives est soumise à des facteurs structurels qui semblent lui permettre d’échapper à l’influence des langues de systèmes syntaxiques proches, des transferts peuvent se manifester entre langues de systèmes différents (voir Monville-Burston et Kakoyianni-Doa 2009 pour les locuteurs de grec chypriote apprenant le français). Les différences substantielles entre les systèmes de relatives norvégien et français autorisent ainsi à se poser la question des transferts, soit depuis la langue maternelle, soit depuis l’anglais L2.
A partir de réponses à un questionnaire spécifiquement construit pour investiguer cette question, en mettant en évidence des types d’erreurs d’apprenants norvégiens du français et en dégageant des analyses de ces erreurs, le présent article explore le rôle spécifique du caractère animé de l’antécédent sur le choix du relatif sujet ou objet.
Entre autres explications, nous avancerons que le transfert de l’anglais langue seconde, pour laquelle le caractère animé a une importance dans le choix du relatif, a un impact sur le français L3 dans un domaine dont on pouvait croire qu’il était imperméable au transfert.

Par Kjersti Listhaug et Nelly Foucher Stenkløv (NTNU)

Résumé
Clé de voûte de l’architecture textuelle, la maîtrise des marqueurs de relations occupe un rôle central dans l’évaluation des compétences en langue étrangère. Selon la classification psycholinguistique, issue d’un regard sur la faculté de l’apprenant à structurer ses textes, l’acquisition des marqueurs se réalise en trois étapes : liage, balisage, empaquetage (Schneuwly, 1985 ; Favart, 2005). Les deux derniers stades assurent la cohésion du texte et témoignent d’une faculté d’anticipation sur sa structure globale visée.
Parmi tous les types de marqueurs de relations de ces stades, on dégage grossièrement les marqueurs d’introduction du propos, les marqueurs de nuances et de précision et les marqueurs de conclusion. Dans cet article, nous nous attarderons sur quelques marqueurs français récurrents de la deuxième catégorie – en fait, de fait, en effet, effectivement, donc, alors… – en identifiant dans un corpus de productions écrites d’apprenants norvégiens les difficultés d’emplois que chacun d’entre eux revêt.
Entre autres explications aux erreurs repérées, nous avancerons l’hypothèse que les difficultés rencontrées tiennent au champ de recouvrement sémantico-pragmatique de certains marqueurs, sans équivalence parfaite en norvégien ou en anglais, en considérant l’éventualité d’effets de transferts de ces deux langues sur le français L3 (Wetzel, Zufferey & Gygax, 2020).

Par Espen Klævik‐Pettersen et Ida Marie Wullum (Agder)

Résumé
Dans cet article, nous nous proposons de présenter et d’analyser l’omission du mot connecteur que dans un corpus de textes produits par des apprenants norvégiens de français langue étrangère aux niveaux du lycée et de la première année universitaire. L’omission de que (signalée par un tiret bas) touche à la fois le complémenteur tête d’une subordonnée complétive (1a), le pronom relatif (1b), et des subordonnants complexes introduisant une subordonnée circonstancielle (1c) :
– (1) a. On peut dire _ on avait souhaité une connexion originale
– b. C’est une marque _ beaucoup des gens connaissent
– c. Avant _ les Francs et les Romans s’installent en le territoire […], le même territoire s’est installé par les Gaules

Il y a lieu de croire qu’il s’agit d’un transfert (Liming et Odlin, 2016) de la L1 (norvégien) ou de la L2 (généralement l’anglais), ou l’omission en question est fréquente pour les trois constructions (Cacoullos et Walker, 2009). Cependant, la non‐omission reste également très répandue dans notre corpus. En nous basant sur une analyse quantitative et qualitative de chaque construction, nous examinerons si l’omission de que est influencée par l’environnement structurel et/ou par des facteurs lexicaux et sémantiques.

Par Christina Lindqvist et Jakob Hilding (Göteborg)

Résumé
Cette étude a pour objectif d’approfondir nos connaissances concernant les mécanismes du transfert lors de l’acquisition du vocabulaire. Plus précisément, elle s’intéresse au transfert positif du suédois et de l’anglais, qui semble entrer en jeu lorsque les apprenants suédophones font un test de vocabulaire réceptif en français. Les données proviennent de lycéens qui font leurs études de français en Suède. Le français est leur troisième langue (L3), puisqu’ils ont tous des connaissances de l’anglais (L2), outre leur langue maternelle (L1, le suédois). Dans le domaine des recherches de l’acquisition d’une L3, il a été montré à maintes reprises que la L1 aussi bien que la L2 peuvent influencer la L3 au niveau lexical de différentes manières. De plus, des études récentes sur d’autres groupes d’apprenants suédois montrent qu’ils semblent bénéficier de leurs connaissances de langues préalables lors d’un test de vocabulaire réceptif (Lindqvist 2020, Lindqvist & Ramnäs à paraître). Ainsi, ils semblent maîtriser les mots cognats français-anglais-suédois, ainsi que français-anglais, dans une plus large mesure que les mots français sans cognat. Pourtant, même si ces études ont pu démontrer des taux de réponses correctes plus élevés pour les mots cognats, elles n’ont pas examiné si ces résultats sont dus au fait que les apprenants se servent de leurs connaissances préalables en tant que stratégie, ni s’ils sont conscients des ressemblances entre les langues. Dans cette étude, nous visons à remplir cette lacune en examinant ces facteurs, en utilisant des enquêtes, et leur lien aux résultats sur les tests de vocabulaire.

Par Catrine Bang Nilsen (NTNU/UNICAEN)

Résumé
Le sens figuré est indispensable pour la communication de tous les jours dans une L2, pourtant il représente une difficulté majeure pour de nombreux apprenants. Cette difficulté s’expliquerait par la théorie de la saillance graduelle élaborée par Giora (2003) et adaptée aux locuteurs non-natifs par Cieślicka (2006) : une métaphore ayant deux sens potentiels, le sens le plus saillant serait non seulement privilégié dans le lexique mental mais aussi plus facilement accessible. Or cette saillance dépend surtout du degré d’exposition ; étant moins exposés au sens figuré de métaphores en L2, les apprenants encourent le risque de privilégier leur sens littéral, même lorsque celles-ci sont conventionnelles. Pourtant, ces facteurs restent largement inexplorés en français L2. Dans cette contribution, des données issues d’une étude psycholinguistique auprès de 20 apprenants de norvégien L1 de et de 20 locuteurs de français L1 seront présentées. Le matériel est composé de métaphores conventionnelles et nouvelles de foyer métaphorique variable (nom, verbe, adjectif) ainsi que de métaphores figées conventionnelles (locutions verbales). Les résultats montrent une certaine influence du degré de conventionalité ainsi qu’une tendance à privilégier le sens littéral, possiblement en fonction du degré d’exposition à la L3. Or la question du transfert n’a pas été abordée dans cette étude et des données supplémentaires d’une étude exploratoire seront présentées. Ceci nous permettraient d’avoir une première approche à la question du transfert d’énoncés au sens figuré de la L1 (le norvégien) ou du L2 (l’anglais) vers le L3 (le français).

Par Jan Lindschouw (Copenhague)

Résumé
Le présent travail d’ordre qualitatif se propose d’étudier l’acquisition de la compétence dite communicative (Canale 1983, Martinez 1996) par des apprenants du FLE danophones en phase de transition entre le lycée et l’université. Grâce à une analyse des productions écrites par 15 lycéens en Terminale (Niveau B1) et 17 étudiants universitaires de français en première année (Niveau B1-B2) nous allons aborder les questions suivantes :

  • Quelles composantes de la compétence communicative les apprenants danophones des deux niveaux ont-ils acquises ? Ont-ils une meilleure maîtrise de la composante grammaticale que des composantes discursive et sociopragmatique ? Pour répondre à ces questions, il importe également de tenir compte de l’impact du transfert de leur langue première (danois) et seconde (anglais) sur leur production en français troisième langue.
  • Quelles sont les compétences écrites en jeu chez les deux types d’apprenants ? Dans quelles mesures les apprenants ont-ils recours à des stratégies « matures » (Scardamalia & Bereiter 1987, Lindschouw 2016) leur permettant de rédiger un texte académique ?
  • Quel est le rapport entre langue et cognition ? Jusqu’à quel point les apprenants parviennent-ils à exprimer en français le contenu désiré ou passent-ils par leur langue maternelle ou seconde pour ce faire ?

Par Christophe Rochais, vice-président délégué à l’international (UNICAEN)

Programme non-contractuel soumis à modifications

Lieu

Université de Caen Normandie – Campus 1
Bibliothèque du CRISCO

Organisation

Laboratoire CRISCO – EA4255
Carré international – Office franco-norvégien d’échanges et de coopération OFNEC

Avec le soutien de la Ville de Caen et le label Caen Nordic

Contact

ofnec@unicaen.fr

Ressources

Programme