Les femmes souffrant d’un cancer du sein se plaignent fréquemment de troubles du sommeil. Quels sont ces troubles ? À quoi sont-ils dus ? Quel est leur impact ? Comment y remédier ? Avec la Chaire d’excellence portée par Joy Perrier, c’est un nouveau champ de recherche qui s’ouvre en France et à l’international.
Quels sont les enjeux de la chaire d’excellence ?
Le point de départ de ce projet de recherche est une problématique clinique soulevée par de nombreuses patientes : les troubles du sommeil associés au cancer du sein. Insomnie, réveil précoce, sommeil fragmenté… Ces difficultés altèrent considérablement le bien-être et la qualité de vie des patientes, car le sommeil joue un rôle important dans la mémoire, la gestion du stress et la récupération. Faute d’études sur le sujet, il existe peu de données objectives sur des liens avérés entre le cancer et les troubles du sommeil. Les mécanismes sous-jacents ne sont pas clairement démontrés – c’est pourquoi un suivi et des mesures précises sont nécessaires pour comprendre ce qui se passe. Si la mortalité est en baisse, les effets secondaires restent fréquents : l’objectif, à terme, est d’améliorer le suivi et la prise en charge des patientes. Ce projet est en collaboration étroite avec les services cliniques du Centre de lutte contre le cancer François Baclesse, pour une implémentation directe de nos résultats.
Comment se déroulera ce projet ?
Nous allons recruter une cohorte de 75 participantes, incluant des patientes actuellement traitées par chimiothérapie ou sans chimiothérapie, et des femmes sans antécédents de cancer. Dans un premier temps, il s’agira de décrire précisément ces troubles du sommeil, en particulier grâce à la polysomnographie. Cet examen complet, de référence, enregistre plusieurs variables tels que le rythme cardiaque, le rythme respiratoire, l’activité cérébrale, l’activité musculaire ou encore le mouvement des yeux – ce qui permet d’évaluer précisément les phases de sommeil. Une fois les troubles du sommeil caractérisés, il conviendra de déterminer leur impact sur la mémoire et sur l’anxiété. Des analyses en neuropsychologie et en neuroimagerie seront conduites pour bien comprendre ce qui se joue dans leur cerveau.
Des pistes pour y remédier ?
Oui, dans un second temps, notre projet prévoit d’évaluer une approche non-médicamenteuse, fondée sur la stimulation du système vestibulaire. Des études récentes ont en effet montré que le système vestibulaire, situé dans l’oreille interne, jouerait un rôle dans la synchronisation du cycle veille/sommeil de 24 heures. Cette méthode est non-invasive et ne présente aucune contre-indication : elle apparaît donc appropriée pour resynchroniser les rythmes biologiques chez les patientes souffrant d’un cancer du sein. Ce projet inclut une collaboration avec l’unité de recherche COMETE, spécialisée dans l’étude des rythmes biologiques, et avec l’entreprise caennaise Mooven qui a développé des outils numériques innovants pour la stimulation vestibulaire. La Chaire inclut ainsi de nombreux acteurs normands : la dynamique territoriale autour de cette thématique de recherche est très forte.
La Région Normandie finance la Chaire à travers le dispositif RIN Recherche 2020. Cette étude, nommée « ICANSLEEP », est réalisée en collaboration avec le Centre de lutte contre le cancer François Baclesse, l’unité de recherche ANTICIPE (UMR-S 1086 UNICAEN – INSERM), l’unité de recherche DC2N (UMR-S 1239 université de Rouen Normandie – INSERM) et l’unité de recherche COMETE (UMR-S 1075 UNICAEN – INSERM). Cette étude s’inscrit dans le cadre de la Plateforme Cancer et Cognition du Cancéropole Nord-Ouest et est financée par la Région Normandie (Chaire d’Excellence, 2021 – 2024).