Geoffroi Malaterra
Histoire du Grand Comte Roger et de son frère Robert Guiscard
Édité par Marie-Agnès Lucas-Avenel
L’histoire des fils de Tancrède de Hauteville fut écrite par le moine Geoffroi Malaterra à la demande du Grand Comte Roger. Il raconte comment des chevaliers normands, quittant le Cotentin, se sont illustrés dans la conquête de l’Italie méridionale et de la Sicile, triomphant des Lombards en Campanie, des Byzantins en Pouille et en Calabre et des Sarrasins en Sicile. L’œuvre fut composée au lendemain de la pacification d’un territoire que les Hauteville ont mis plus d’un demi-siècle à conquérir. Elle est précédée de deux épîtres et divisée en quatre livres, qui suivent la progression chronologique des événements, depuis la conquête de la Normandie par Rollon, jusqu’à la légation apostolique accordée au Grand Comte par Urbain II en 1098.
Avec l’entrée en scène de Roger, le dernier fils de Tancrède, le récit prend de plus en plus les accents du panégyrique. La conquête de la Sicile, placée au service de Dieu par le personnage, s’accompagne d’une forme de conversion de ce dernier, qui réalise progressivement le présage annoncé au début de l’histoire.
L’œuvre constitue une source importante, souvent unique, pour la connaissance de l’histoire de la conquête, de ses principaux acteurs et des populations d’Italie du Sud. Elle est aussi l’expression d’une réflexion menée par un auteur lié au pouvoir normand et doté d’une solide formation littéraire, comme en témoigne son imprégnation des textes de l’Antiquité païenne et chrétienne. Elle prend place au sein de la production historiographique des États normands, dont l’expression est tout à fait remarquable en Europe à l’aube de la « Renaissance » du XIIe siècle.
La présente édition critique des deux premiers livres de l’œuvre donne un nouvel état du texte latin, que les spécialistes appelaient de leurs vœux depuis la publication, en 1964, de l’article de Gianvito Resta suite à la redécouverte du manuscrit Z, conservé à Barcelone (Biblioteca de Catalunya, ms. 996). Le texte latin est doté d’un apparat critique, de notes philologiques et de notes de sources ; il est accompagné d’une traduction française, dont les notes visent à éclairer le lecteur sur le contexte historique et littéraire ou à permettre la comparaison avec les autres sources des mêmes faits.
Ce site est complémentaire de l’édition critique publiée sous forme imprimée par les Presses universitaires de Caen, et qui contient en outre une introduction présentant l’auteur, l’œuvre (son contenu et ses principales caractéristiques sur le plan littéraire et idéologique), l’histoire du texte et les choix et principes d’édition. Certaines notes renvoient à cette introduction. Le site s’accompagne de fonctionnalités adaptées à un environnement numérique (détaillées dans la rubrique Mode d’emploi). Il permet de consulter l’Histoire du Grand Comte Roger dans sa traduction française et dans sa version latine annotées. Le texte latin est établi essentiellement à partir des manuscrits primaires (A, B, C, Z) et des deux éditions critiques qui ont marqué l’histoire du texte, la princeps de Gerónimo Zurita publiée à Saragosse en 1578 et celle d’Ernesto Pontieri publiée en 1927-1928 dans les RIS2. Les lecteurs peuvent accéder aux manuscrits A, C et Z et à l’édition princeps ainsi qu’aux deux manuscrits secondaires Be et D, numérisés et mis en ligne en partenariat avec les bibliothèques dans lesquelles ils sont conservés (Barcelone, Besançon, Caen, Catane, Palerme). Il s’agit d’un premier volume. Le second volume contenant les deux derniers livres de l’œuvre est en cours de préparation.