MONSIEUR,
I’ay enfin receu le Privilege de France que nous attendions, et qui a esté cause que le Libraire a tant tardé à imprimer la derniere feüille du Livre que ie vous envoye, et que ie vous AT I, 638 supplie de vouloir presenter à Son Altesse, ie n’ose dire au nom de l’Autheur à cause que l’Autheur n’y est pas nommé, et que ie ne presume point que mon nom merite d’estre connu d’Elle ; mais comme ayant esté composé par une personne que vous connoissez, et qui est tres-devote, et tres-affectionnée à son service. En effet, ie puis dire que déslors que ie me resolu de quitter mon Païs, et de m’eloigner de connoissance, afin de passer une vie plus douce et plus tranquille que ie ne faisois auparavant ; ie ne me fusse point avisé de me retirer en ces Provinces, et de les preferer à quantité d’autres endroits où il n’y avoit aucune guerre, et où la pureté et la secheresse de l’air sembloient plus propres aux productions de l’Esprit, si la grande opinion que i’avois de son Altesse ne m’eust fait extraordinairement fier à sa protection et à sa conduite ; Et depuis ayant ioüy parfaitement du loisir et du repos que i’avois esperé trouver à l’ombre de ses armes, ie luy en ay tres-grande obligation, et pense que ce Livre qui ne contient que des fruits de ce repos, luy doit plus particulierement estre offert qu’à personne : C’est pourquoy s’il vous plaist avoir agreable que ce soit par vos mains que ie m’acquitte de cette dette, encore que la passion que ie sçay que vous avez pour son service, ne me permette pas d’esperer que vous lui voulussiez presenter de mauvaise Clerselier II, 358 monnoye pour de bonne, la parfaite intelligence que vous avez de toutes choses, et de tout ce qu’il peut y avoir AT I, 639 en mes Escrits, m’assure que vostre recommandation augmentera de beaucoup leur valeur ; et ie seray toute ma vie,
MONSIEUR,