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DES FIGVRES QVE DOIVENT
auoir les cors transparens pour detourner les rayons par refraction en toutes les façons qui seruent à la veuë.
Discours Huictiesme.

Or afin que ie vous puisse tantost dire plus exactement en quelle sorte on doit faire ces organes artificiels, pour les rendre les plus parfaits qui puissent estre ; il est besoin que i’explique auparauant les figures que doiuent auoir les superficies des cors transparens pour plier et detourner les rayons de la lumiere en toutes les façons qui peuuent seruir à mon dessein. En quoy si ie ne me puis rendre assés clair et intelligible pour tout le monde, à cause que c’est vne matiere de Geometrie vn peu difficile ; ie tascheray au moins de l’estre assés pour ceux qui auront seulement AT VI, 166 appris les premiers Elemens de cette science. Et d’abord afin de ne les tenir point en suspens, ie leur diray, que toutes les figures dont i’ay icy à leur parler, ne seront composées que d’Ellipses ou d’Hyperboles, et de cercles ou de lignes droites.

L’Ellipse ou l’Ouale est vne ligne courbe que les Mathematiciens ont accoustumé de nous exposer en coupant de travers vn Cone ou vn Cylindre, et que i’ay vu aussy quelquefois employer par des Iardiniers dans les Maire, p. 90
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compartimens de leurs parterres, où ils la descriuent d’vne façon qui est veritablement fort grossiere et peu exacte, mais qui fait, ce me semble, mieux comprendre sa nature, que la section du Cylindre ny du Cone. Ils plantent en terre deux picquets, comme par exemple, l’vn au point H, l’autre au point I, et ayant noüé ensemble les deux bouts d’vne corde ils la passent autour d’eux, en la façon que vous voyés icy BHI. Puis mettant le bout du doigt en cette corde, ils le conduisent tout autour de ces deux picquets, en la tirant tousiours à eux d’esgale force, afin de la tenir tendue esgalement, et ainsi descriuent sur la terre la ligne courbe DBK, qui est vne Ellipse. Et si sans changer la longueur de cette corde BHI, ils plantent seulement leurs picquets H et I vn peu plus proches l’vn de l’autre, ils descriront derechef vne Elipse, mais qui sera d’autre espece que la precedente : et s’ils les plantent encore vn peu plus proches, AT VI, 167 ils en descriront encore vne autre : et enfin s’ils les ioignent ensemble tout à fait, ce sera vn cercle qu’ils descriront. au lieu que s’ils diminuent la longueur de la corde en mesme proportion que la distance de ces picquéts, ils descriront bien des Ellipses, qui seront diuerses en grandeur, mais qui seront toutes de mesme espece. Et ainsi vous voyés qu’il y en peut auoir d’vne infinité d’especes toutes diuerses, en sorte qu’elles ne different pas moins l’vne de Maire, p. 91
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l’autre, que la derniere fait du cercle ; et que de chasque espece, il y en peut auoir de toutes grandeurs. Et que si d’vn point, comme B, pris à discretion dans quelqu’vne de ces Ellipses, on tire deux lignes droites, vers les deux points H et I, où les deus picquets doiuent estre plantés pour la descrire : ces deux lignes BH, et BI, iointes ensemble, seront esgales à son plus grand diametre DK. ainsi qu’il se prouue facilement par la construction. Car la portion de la corde qui s’estend d’I vers B et delà se replie iusques à H, est la mesme qui s’estend d’I vers K ou vers D et delà se replie aussy iusques à H : en sorte que DH est esgale à IK ; et HD plus DI, qui valent autant que HB plus BI, sont esgales à la toute DK. Et enfin les Ellipses qu’on descrit en mettant tousiours mesme proportion entre leur plus grand diametre DK et la distance des points H et I, sont toutes d’vne mesme espece. Et à cause de certaine proprieté de ces points H et I, que vous entendrés cyaprés, nous les nommerons les points bruslans, l’vn interieur, et l’autre exterieur ; à sçauoir si on les rapporte à la moitié de l’Ellipse qui est vers D, I sera l’exterieur ; et si on les rapporte à l’autre AT VI, 168 moitié qui est vers K, il sera l’interieur. Et quand nous parlerons sans distinction du point bruslant, nous entendrons tousiours parler de l’interieur. Puis outre cela il est besoin que vous sçachiés, que si par ce point B on tire les deux lignes droites LBG et CBE, qui se couppent l’vne l’autre à angles droits, et dont l’vne LG, diuise l’angle HBI en deux parties esgales, l’autre CE touchera cette Ellipse en ce point B sans la coupper. de quoy ie ne mets pas la demonstration pource que les Geometres la sçauent Maire, p. 92
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assés, et que les autres ne feroyent que s’ennuyer de l’entendre. Mais ce que i’ay icy particulierement dessein de vous expliquer, c’est que si on tire encore de ce point B, hors de l’Ellipse, la ligne droite BA, parallele au plus grand diametre DK, et que l’ayant prise esgale à BI, des points A et I on tire sur LG les deux perpendiculaires AL et IG, ces deux dernieres AL et IG auront entre elles mesme proportion que les deux DK et HI. En sorte que si la ligne AB est vn rayon de lumiere, et que cette Ellipse DBK soit en la superficie d’vn cors transparent tout solide, par lequel, suiuant ce qui a esté dit cydessus, les rayons passent plus aysement que par l’air, en mesme proportion que la ligne DK est plus grande que HI : Ce rayon AB sera tellement detourné au point B, par la superficie de ce cors transparent, qu’il ira delà vers I. Et pource que ce point B est pris à discretion AT VI, 169 dans l’Ellipse, tout ce qui se dit icy du rayon AB, se doit entendre generalement de tous les rayons, paralleles à l’aissieu DK, qui tombent sur quelque point de cette Ellipse, à sçauoir qu’ils y seront tous tellement detournés, qu’ils iront se rendre delà vers le point I.

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Or cecy se demonstre en cette sorte. Premierement si on tire du point B, la ligne BF perpendiculaire sur KD, et que du point N, où LG et KD s’entrecoupent, on tire aussy la ligne NM perpendiculaire sur IB, on trouuera que AL est à IG, comme BF est à NM. Car d’vne part les triangles BFN et BLA sont semblables, à cause qu’ils sont tous deux rectangles, et que NF et BA estans paralleles, les angles FNB et ABL sont esgaus ; et d’autre part les triangles NBM et IBG sont aussy semblables, à cause qu’ils sont rectangles, et que l’angle vers B est commun à tous deux. Et outre cela les deux triangles BFN et BMN ont mesme rapport entre eux que les deux ALB et BGI, à cause que comme les bases de ceux-cy BA et BI sont esgales, ainsi BN qui est la base du triangle BFN est esgale à soy mesme en tant qu’elle est aussy la base du triangle BMN. D’où il suit euidemment que comme BF est à NM, ainsi AL celuy des costés du triangle ALB qui se rapporte à BF, dans le triangle BFN, c’est à dire qui est la subtendue du mesme angle, est à IG, celuy des costés du triangle BGI qui se rapporte AT VI, [170] au costé NM du triangle BNM. Puis BF est à NM comme BI est à NI, à cause que les deux triangles BIF et NIM, estans rectangles, et ayans le mesme angle vers I, sont semblables. De plus si on tire HO parallele à NB, et qu’on prolonge IB iusques à O, on verra que BI est à NI, comme OI est à HI, à cause que les triangles BNI et OHI sont semblables. Enfin les deux angles HBG et GBI estant esgaus par la construction, HOB qui est esgal à GBI Maire, p. 94
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est aussy esgal à OHB, à cause que cetuy cy est esgal à HBG. et par consequent le triangle HBO est isoscele, et la ligne OB estant esgale à HB, la toute OI est esgale à DK, d’autant que les deux ensemble HB et IB luy sont esgales. Et ainsi pour reprendre du premier au dernier, AL est à IG comme BF est à NM, et BF à NM comme BI à NI, et BI à NI comme OI à HI, et OI est esgale à DK ; donc AL est à IG comme DK est à HI.

Si bien que si pour tracer l’Ellipse DBK, on donne aux lignes DK et HI, la proportion qu’on aura connu par experience estre AT VI, 171 celle, qui sert à mesurer la refraction de tous les rayons, qui passent obliquement de l’air dans quelque verre, ou autre matiere transparente qu’on veut employer : et qu’on face vn cors de ce verre qui ait la figure que descriroit cette Ellipse si elle se mouuoit circulairement autour de l’aissieu DK ; les rayons qui seront dans l’air paralleles à cét aissieu comme AB, ab, entrans dans ce verre, s’y detourneront en telle sorte, qu’ils iront tous s’assembler au point bruslant I, qui des deux H et I est le plus esloigné du lieu d’où ils viennent. Maire, p. 95
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Car vous sçaués que le rayon AB doit estre detourné au point B, par la superficie courbe du verre, que represente l’Ellipse DBK, tout de mesme qu’il le seroit par la superficie plate du mesme verre que represente la ligne droite CBE, dans laquelle il doit aller de B vers I, à cause qu’AL et IG sont l’vne à l’autre comme DK et HI, c’est à dire, comme elles doiuent estre pour mesurer la refraction. Et le point B, ayant esté pris à discretion dans l’Ellipse, tous ce que nous auons demonstré de ce rayon AB, se doit entendre en mesme façon de tous les autres paralleles à DK, qui tombent sur les autres points de cette Ellipse ; en sorte qu’ils doiuent tous aller vers I.

De plus à cause que tous les rayons, qui tendent vers le centre d’vn cercle ou d’vn globe, tombans perpendiculairement sur sa superficie, n’y doiuent souffrir aucune refraction : si du centre I on fait vn cercle à telle distance qu’on voudra, pourvû qu’il passe entre D et I, comme BQB, les lignes DB et QB, tournant autour de l’aissieu DQ, descriront la figure d’vn verre, qui assemblera dans l’air au point I tous les Maire, p. 96
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rayons, AT VI, 172 qui auront esté de l’autre costé, aussy dans l’air, paralleles à cet aissieu : et reciproquement qui fera que tous ceux qui seront venus du point I, se rendront paralleles de l’autre costé.

Et si du mesme centre I on descrit le cercle RO, à telle distance qu’on voudra au delà du point D ; et qu’ayant pris le point B dans l’Ellipse à discretion, pourvû toutefoix qu’il ne soit pas plus esloigné de D que de K, on tire la ligne droite BO, qui tende vers I ; les lignes RO, OB, et BD, meuës circulairemẽt autour de l’aissieu DR, descriront la figure d’vn verre, qui fera que les rayons paralleles à cét aissieu du costé de l’Ellipse, s’escarteront ça et là de l’autre costé, comme s’ils venoient tous du point I. Car il est manifeste, AT VI, 173 que par exemple le rayon PB doit estre autant detourné par la superficie creuse du verre DBA, comme AB par la conuexe ou bossue du verre DBK, et par consequent que BO doit estre en mesme ligne Maire, p. 97
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droite que BI, puisque PB est en mesme ligne droite que BA. Et ainsi des autres.

Et si de rechef dans l’Ellipse DBK on en descrit vne autre plus petite, mais de mesme espece comme dbk dont le point bruslant marqué I, soit en mesme lieu que celuy de la precedente aussy marqué I, et l’autre h en mesme ligne droite et vers le mesme costé que DH, et qu’ayant pris B à discretion, comme cy deuant, on tire la ligne droite Bb, qui tende vers I, les lignes DB, Bb, bd, meues autour de l’aissieu Dd descriront la figure d’vn verre qui fera que tous les rayons qui auant que de le rencontrer auront esté paralleles se trouueront derechef paralleles apréaprés en estre sortis, et qu’auec cela ils seront plus resserrés, et occuperont vn moindre espace du costé de la plus petite Ellipse Maire, p. 98
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db, que de celuy de la plus grande. Et si pour euiter l’espaisseur de ce verre DBbd, on descrit du centre I les cercles QB etro, les superficies DBQ AT VI, 174 et robd representeront les figures et la situation de deux verres moins espais, qui auront en cela son mesme effect.

Et si on dispose les deux verres semblables DBQ et dbq inegaus en grandeur, en telle sorte que leurs aissieux soient en vne mesme ligne droite, et leurs deux points bruslant exterieurs, marqués I, en vn mesme lieu ; et que leurs superficies circulaires BQ, bq se regardent l’vne l’autre, ils auront aussy en cela le mesme effect.

Et si on ioint ces deux verres semblables inegaus en grandeur DBQ et dbq, ou qu’on les mette à telle distance qu’on voudra l’vn de l’autre, pourvû seulement que leurs aissieux soient en mesme ligne droite, et que leurs superficies Elliptiques se regardent, ils feront que tous les rayons qui viendront du point bruslant de l’vn marqué I, s’iront assembler en l’autre aussy marqué I. AT VI, 175

Et si on ioint les deux differens DBQ, et DBOR Maire, p. 99
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en sorte aussy que leurs superficies DB et BD se regardent, ils feront que les rayons qui viendront du point i, que l’Ellipse du verre DBQ a pour son point bruslant, s’escarteront comme s’ils venoient du point I, qui est le point bruslant du verre BDOR : ou reciproquement, que ceux qui tendent vers ce point I, s’iront assembler en l’autre marqué i.

Et enfin si on ioint les deus DBOR et DBOR tousiours en sorte, que leurs superficies DB, BD se regardent, on fera que les rayons qui en trauersant l’vn de ces verres tendent au delà vers I, s’escarteront derechef en sortant de l’autre comme s’ils venoient de Maire, p. 100
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l’autre point I. Et on peut faire la distance de chascun de ces points marqués I plus ou moins grãde autant qu’on veut, en chãgeant la grãdeur de l’Ellipse dont il depẽd. En sorte que auec l’Ellipse seule et la ligne circulaire on peut descire des verres qui facent que les rayons qui vienent d’vn point, ou tendẽt vers un point, ou sont paralleles, changent AT VI, 176 de l’vne en l’autre de ces trois sortes de dispositions en toutes les façons qui puissent estre imaginées.

L’Hyperbole est aussy vne ligne courbe que les Mathematiciens expliquent par la section d’vn Cone, comme l’Ellipse. Mais afin de vous la faire mieux conceuoir, i’introduiray encore icy vn iardinier qui s’en sert à compasser la broderie de quelque parterre. Il plante derechef ses deux piquets aux points H et I ; et ayant attaché au bout d’vne longue reigle le bout d’vne corde vn peu plus courte, il fait vn trou rond à l’autre bout de cette reigle, dans lequel il fait entrer le piquet I, et vne boucle à l’autre bout de cette corde qu’il passe dans le picquet H. Puis mettant le doigt au point X, où elles sont attachées l’vne à l’autre, il le coule delà en bas iusques à D, tenant tousiours cependant la corde toute iointe et comme colée contre la reigle depuis Maire, p. 101
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le point X iusques à l’endroit où il la touche, et auec cela toute tendue : au moyen de quoy, contraignant cette reigle de tourner autour du picquet I à mesure qu’il abaisse son doigt, il descrit sur la terre la ligne courbe XBD, qui est vne partie d’vne Hyperbole. Et aprés cela tournant sa reigle de l’autre costé vers Y, il en descrit en mesme façon vne autre partie YD. Et de plus s’il passe la boucle de sa corde dans le picquet I, et le bout de sa reigle dans le picquet H, il descrira vne autre AT VI, 177 hyperbole SKT toute semblable et opposée à la precedente. Mais si sans changer ses picquets ny sa reigle, il fait seulement sa corde vn peu plus longue, il descrira vne Hyperbole d’vne autre espece ; et s’il la fait encore vn peu plus longue, il en descrira encore vne d’autre espece, iusques à ce que la faisant tout à fait esgale à la reigle, il descrira au lieu d’vne Hyperbole vne ligne droite. Puis s’il change la distance de ses picquets en mesme proportion que la difference qui est entre les longueurs de la reigle et de la corde, il descrira des Hyperboles qui seront toutes de mesme espece, mais dont les parties semblables, seront differentes en grandeur. Et enfin, s’il augmente esgalement les longueurs de la corde et de la reigle, sans Maire, p. 102
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changer ny leur difference, ny la distance des deux picquets, il ne descrira tousiours qu’vne mesme Hyperbole, mais il en descrira vne plus grande partie. Car cette ligne est de telle nature, que bienqu’elle se courbe tousiours de plus en plus vers vn mesme costé, elle se peut toutesfois estendre à l’infiny, sans que iamais ses extremités se rencontrent. Et ainsi vous voyés qu’elle a en plusieurs façons mesme raport à la ligne droite, que l’Ellipse à la circulaire. Et vous voyés aussy qu’il y en a d’vne infinité de diuerses especes, et qu’en chasque espece il y en a vne infinité dont les parties semblables sont differentes en grandeur. Et de plus que si d’vn point, comme B, pris à discretion dans l’vne d’elles, on tire deux lignes droites vers les deux points comme H et I, où les deux picquets doiuent estre plantés pour la descrire, et que nous nommerons encore les points bruslants ; la difference AT VI, 178 de ces deux lignes HB et IB, sera tousiours esgale à la ligne DK, qui marque la distance qui est entre les Hyperboles opposées. Ce qui paroist de ce que BI est plus longue que BH, d’autant iustement que la reigle a esté prise plus longue que la corde ; et que DI est aussy d’autant plus longue que DH. Car Maire, p. 103
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si on accourcist celle cy DI, de KI, qui est esgale à DH, on aura DK pour leur difference. Et enfin vous voyés que les Hyperboles, qu’on descrit en mettant tousiours mesme proportion entre DK et HI, sont toutes d’vne mesme espece. Puis outre cela il est besoin que vous sçachiés, que si par le point B pris à discretion dans vne Hyperbole, on tire la ligne droite CE, qui diuise l’angle HBI en deux parties esgales, la mesme CE touchera cette Hyperbole en ce point B, sans la couper. de quoy les Geometres sçauent assés la demonstration.

AT VI, 179 Mais ie veux icy en suite vous faire voir que si de ce mesme point B on tire vers le dedans de l’Hyperbole la ligne droite BA parallele à DK, et qu’on tire aussy par le mesme point B la ligne LG qui couppe CE à angles droits, puis ayant pris BA esgale à BI, que des points A et I on tire sur LG les deux perpendiculaires AL et IG : ces deux dernieres AL et IG auront entre Maire, p. 104
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elles mesme proportion que les les deux DK et HI. Et en suite que si on donne la figure de cette Hyperbole à vn cors de verre dans lequel les refractions se mesurent par la proportion qui est entre les lignes DK et HI, elle fera que tous les rayons qui seront paralleles à son aissieu dans ce verre, s’iront assembler au dehors au point I, au moins si ce verre est conuexe ; et s’il est concaue, qu’ils s’escarteront ça et là, comme s’ils venoient de ce point I.

Ce qui peut estre ainsi demonstré. Premierement si on tire du point B la ligne BF perpendiculaire sur KD prolongée autant qu’il est besoin, et du point N, où LG et KD s’entrecoupent, la ligne NM perpendiculaire sur IB aussy prolongée, on trouuera que AL est à IG comme BF est à NM. Car d’vne part les triangles BFN et BLA sont semblables à cause qu’ils sont tous deux rectangles et que NF et BA estant paralleles les angles FNB et LBA sont esgaus. Et d’autre part les triangles IGB et NMB sont aussy semblables à cause qu’ils sont rectangles et que les angles IBG et NBM sont esgaus. Et outre cela, comme la mesme AT VI, [180] BN sert de base aux deux triangles BFN et NMB, ainsi BA la base du triangle ALB est esgale à BI la base du triangle IGB. d’où il suit que comme les costés du triangle BFN sont à ceux du triangle NMB, ainsi ceux du triangle ALB sont aussy à ceux du triangle IBG. Puis BF est à NM comme BI est à NI, à cause que les deux triangles BIF et NIM, estans rectangles, et ayans le mesme angle vers I, sont semblables. De plus si on tire HO parallele à LG, on verra que BI est à NI comme OI est à HI, à cause que les triangles BNI et OHI Maire, p. 105
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sont semblables. Enfin les deux angles EBH et EBI estans esgaus par la construction, et HO, qui est parallele à LG, couppant comme elle CE à angles droits, les deux triangles BEH et BEO sont entierement esgaus. Et ainsi BH la baze de l’vn AT VI, 181 estant esgale à BO la baze de l’autre, il reste OI pour la difference qui est entre BH et BI, laquelle nous auons dit estre esgale à DK. Si bien que AL est à IG, comme DK est à HI. D’où il suit que mettant tousiours entre les lignes DK et HI la proportion qui peut seruir à mesurer les refractions du verre ou autre matiere qu’on veut employer, ainsi que nous auons fait pour tracer les Ellipses, excepté que DK ne peut estre icy que la plus courte, au lieu qu’elle ne pouuoit estre auparauant que la plus longue : Si on trace vne portion d’hyperbole tant grande qu’on voudra comme DB, et que de B on face descendre à angles droits sur KD la ligne droite BQ, les deux lignes DB, et QB tournant au tour de Maire, p. 106
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l’aissieu DQ, descriront la figure d’vn verre, qui fera que tous les rayons qui le trauerseront et seront dans l’air paralleles à cét aissieu du costé de la superficie plate BD, en laquelle, comme vous sçaués, ils ne souffriront aucune refraction, s’assembleront de l’autre costé au point I.

Et si ayant tracé l’hyperbole db semblable à la precedente, AT VI, 182 on tire la ligne droite ro en tel lieu qu’on voudra, pourvû que sans coupper cette hyperbole elle tombe perpendiculairement sur son aissieu dk ; et qu’on ioigne les deux points b et o par vne autre ligne droite parallele à dk, les trois lignes ro, ob, etbd, meuës autour de l’aissieu dk, descriront la figure d’vn verre, qui fera que tous les rayons qui seront paralleles à son aissieu du costé de sa superficie plate, s’escarteront ça et là de l’autre costé, comme s’ils venoient du point I.

Et si ayant pris la ligne HI plus courte pour tracer l’hyperbole du verre robd, que pour celle du verre DBQ, on dispose ces deux verres en telle sorte que leurs aissieus DQ, rd soient en mesme ligne droite, et leurs deux points bruslans marqués I en mesme lieu, et Maire, p. 107
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que leurs deux superficies hyperboliques se regardent ; ils feront que tous les rayons, qui auant que de les rencontrer, auront esté paralleles à leurs aissieus, le seront encore aprés les auoir tous deux trauersés, et auec cela seront reserrés en vn moindre espace du costé du verre robd que de l’autre.

Et si on dispose les deux verres semblables DBQ et dbq inesgaus en grandeur, en telle sorte que leurs aissieus DQ, dq, soyent aussy en mesme ligne droite, et leurs deux points bruslans marques I en mesme lieu, AT VI, 183 et que leur deux superficies hyperboliques se regardent ; ils feront comme les precedens que les rayons paralleles d’vn costé de leur aissieu le seront Maire, p. 108
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aussy de l’autre, et auec cela seront reserrés en moindre espace du costé du moindre verre.

Et si on ioint les superficies plates de ces deux verres DBQ et dbq, ou qu’on les mette à telle distance qu’on voudra l’vn de l’autre, pourvû seulement que leurs superficies plates se regardent, sans qu’il soit besoin auec cela que leurs aissieus soient en mesme ligne droite : ou plustost si on compose vn autre verre, qui ait la figure de ces deux ainsi conioints, on fera par son moyen que les rayons qui viendront de l’vn des points marqués I, s’iront assembler en l’autre de l’autre costé.

Et si on compose vn verre qui ait la figure des deux DBQ et robd, tellement ioints, que leurs superficies plates s’entretouchent, on fera que les rayons qui seront venus de l’vn des point I, s’escarteront comme s’ils estoient venus de l’autre.

Et enfin, si on compose vn verre qui ait la figure de deux tels que robd, de rechef tellement ioins, que leurs superficies plates s’entretouchent, on fera que AT VI, 184 les rayons, Maire, p. 109
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qui allans rencontrer ce verre seront escartés comme pour s’assembler au point I qui est de AT VI, 185 l’autre costé, seront derechef escartés aprés l’auoir trauersé, comme s’ils estoient venus de l’autre point I.

Et tout cecy est ce me semble si clair, qu’il est seulement besoin d’ouurir les yeux et de considerer les figures pour l’entendre.

Au reste les mesmes changemens de ces rayons que ie vien d’expliquer premierement par deux verres elliptiques, et aprés par deux hyperboliques, peuuent aussy estre causés par deux dont l’vn soit elliptique et l’autre hyperbolique. Et de plus on peut encore imaginer vne infinité d’autres verres qui facent comme ceux cy, que tous les rayons qui vienent d’vn point, ou tendent vers vn point, ou sont paralleles, se changent exactement de l’vne en l’autre de ces trois dispositions. Mais ie ne pense pas auoir icy aucun besoin d’en parler, à cause que ie les pourray plus commodement expliquer cy aprés en la Geometrie, et que ceus que i’ay descrits sont les plus propres de tous à mon dessein. ainsi que ie veus tascher maintenant de prouuer ; et vous faire voir par mesme moyen lesquels d’entre eux y sont les plus propres, en vous faisant considerer toutes les principales choses en quoy ils different.

La premiere est que les figures des vns sont beaucoup plus aysées à tracer que celles des autres : et il est certain qu’aprés la ligne droite, la circulaire, et la parabole, qui seules ne peuuent suffire pour tracer aucun de ces verres, ainsi que chascun pourra facilement voir, s’il l’examine, il n’y en à point de plus simples que l’Ellipse, et Maire, p. 111
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l’hyperbole. en sorte que la ligne droite estant plus aysée à tracer que la circulaire ; et l’hyperbole ne l’estant pas moins que l’Ellipse, ceux dont AT VI, 186 les figures sont composées d’hyperboles et de lignes droites, sont les plus aysées à tailler qui puissent estre. Puis en suite ceux dont les figures sont composées d’Ellipses et de cercles : en sorte que tous les autres que ie n’ay point expliqués le sont moins.

La seconde est qu’entre plusieurs, qui changent tous en mesme façon la disposition des rayons qui se rapportent à vn seul point, ou vienent paralleles d’vn seul costé, ceux, dont les superficies sont le moins courbées, ou bien le moins inegalement, en sorte qu’elles causent les moins inegales refractions, changent tousiours vn peu plus exactement que les autres, la disposition des rayons qui se rapportent aux autres points, ou qui vienent des autres costés. Mais pour entendre cecy parfaittement, il faut considerer que c’est la seule inesgalité de la courbure des lignes dont sont composées les figures de ces verres, qui empesche qu’ils ne changent aussy exactement la disposition des rayons qui se rapportent à plusieurs diuers poins, ou viennent paralleles de plusieurs diuers costés, qu’ils font celle de ceux qui se rapportent à vn seul point, ou vienent paralleles d’vn seul costé. Car par exemple, si pour faire que tous les rayons qui vienent du point A s’assemblent au point B, il falloit que le verre GHIK, qu’on mettroit entre deux, eust ses superficies toutes plates, en sorte que la ligne droite GH ; qui en represente l’vne, eust la proprieté de faire que tous ces rayons venans du point A, se rendissent AT VI, 187 paralleles Maire, p. 112
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dans le verre, et par mesme moyen que l’autre ligne droite KI fist que delà ils s’allassent assembler au point B, ces mesmes lignes GH et KI feroient aussy que tous les rayons venans du point C s’iroient assembler au point D ; et generalement, que tous ceux qui viendroient de quelqu’vn des points de la ligne droite AC, que ie suppose parallele à GH, s’iroient assembler en quelqu’vn des points de BD, que ie suppose aussy parallele à KI, et autant esloignée d’elle, qu’AC est de GH : d’autant que ces lignes GH et KI, n’estant aucunement courbées, tous les points de ces autres AC et BD se rapportent à elles en mesme façon les vns que les autres. Tout de mesme si c’estoit le verre LMNO, dont ie suppose les superficies LMN et LON estre deux esgales portions de Sphere, qui eust la proprieté de faire que tous les rayons venans du point A s’allassent assembler au point B, il l’auroit aussy de faire que ceux du point C s’assemblassent au point D, et generalement que tous ceux de quelqu’vn des points de la superficie CA, que ie suppose estre vne portion de Sphere, qui a mesme centre que LMN, s’assembleroient en quelqu’vn de ceux de BD, que ie suppose aussy vne portion Maire, p. 113
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de Sphere, qui a mesme centre que LON et en est aussy esloignée qu’AC est d’LMN, d’autant que toutes les parties de ces superficies LMN et LON sont esgalement courbées au respect de tous les points AT VI, 188 qui sont dans les superficies CA et BD. Mais à cause qu’il n’y a point d’autres lignes en la nature, que la droite et la circulaire, dont toutes les parties se rapportent en mesme façon à plusieurs diuers points, et que ny l’vne ny l’autre ne peuuent suffire, pour composer la figure d’vn verre, qui face que tous les rayons qui vienent d’vn point s’assemblent en vn autre point exactement, il est euident qu’aucune de celles qui y sont requises, ne fera que tous les rayons qui viendront de quelques autres points, s’assemblent exactement en d’autres points. Et que pour choisir celles d’entre elles qui peuuẽt faire que ces rayons s’escartent le moins des lieus où on les voudroit assembler, il faut prendre les moins courbées, et les moins inesgalemẽt courbées, afin qu’elles approchent le plus de la droite ou de la circulaire ; et encore plustost de la droite que de la circulaire, à cause que les parties de cellecy ne se rapportẽt d’vne mesme façon qu’a tous les points qui sont esgalement distans de son centre, et ne se rapportent à aucuns autres en mesme façon qu’elles font à ce centre. D’où il est aysé de conclure qu’en cecy l’hyperbole surpasse l’Ellipse, et qu’il est impossible d’imaginer des verres d’aucune autre figure, qui rassemblent tous les rayons venans de diuers poins en autant d’autres poins esgalement esloignés d’eux, si exactement que celuy dont la figure sera composée d’hyperboles. Et mesme sans que ie m’arreste à vous en faire icy vne demonstration Maire, p. 114
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plus exacte, vous pouués facilement appliquer cecy aux autres façons de changer la disposition des rayons qui se rapportent à diuers poins ou vienent paralleles de diuers costés, AT VI, 189 et connoistre que pour toutes, ou les verres hyperboliques y sont plus propres qu’aucuns autres, ou du moins, qu’ils n’y sont pas notablement moins propres, en sorte que cela ne peut estre mis en contrepois auec la facilité d’estre taillées, en quoy ils surpassent tous les autres.

La troisiesme difference de ces verres est que les vns font que les rayons qui se croysent en les trauerfant, se trouuent vn peu plus escartés de l’vn de leurs costés que de l’autre ; et que les autres font tout le contraire. Comme si les rayons GG sont ceux qui vienent du centre du Soleil, et que II soient ceux qui vienent du costé gauche de sa circonference, et KK ceux qui vienent du droit, ces rayons s’escartent vn peu plus les vns des autres Maire, p. 115
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aprés auoir trauersé le verre hyperbolique DEF, qu’ils ne faisoient auparauant : et au contraire, ils s’escartent moins aprés auoir trauersé l’Elliptique ABC, en sorte que cet Elliptique rend les points LHM plus proches les vns des autres, que ne AT VI, 190 fait l’hyperbolique, et mesme il les rend d’autant plus proches qu’il est plus espais. Mais neanmoins tant espais qu’on le puisse faire, il ne les peut rendre qu’enuiron d’vn quart ou d’vn tiers plus proches que l’hyperbolique. Ce qui se mesure par la quantité des refractions que cause le verre, en sorte que le cristal de montaigne, dans lequel elles se font vn peu plus grandes, doit rendre cette inesgalité vn peu plus grande. Mais il n’y a point de verre d’aucune autre figure qu’on puisse imaginer, qui face que les points KLMLHM soient notablement plus esloignés que fait cet hyperbolique, ny moins que fait cet Elliptique.

Or vous pouués icy remarquer par occasion en quel sens il faut entendre ce que i’ay dit cydessus, que les rayons venans de diuers poins, ou paralleles de diuers costés, se croysent tous dés la premiere superficie qui a la puissance de faire qu’ils se rassemblent à peu prés en autant d’autres diuers poins. Comme lors que i’ay dit que ceux de l’obiet VXY, qui forment l’image RST sur le fonds de l’œil, se croysent dés la premiere de ses superficies BCD. Ce qui depend de ce que par exemple les trois rayons VCR, XCS et YCT, se croysent veritablement sur cette superficie BCD au point C. d’où vient qu’encore que VDR se croyse auec YBT beaucoup plus haut, et VBR auec YDT beaucoup plus bas : toutesfois pour ce qu’ils tendent vers les mesmes poins Maire, p. 116
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Maire, p. 117
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que font VCR et YCT, on les peut considerer tout de mesme que s’ils se croysoient aussy au mesme lieu. Et pource que c’est cette superficie BCD qui les fait ainsi tendre vers les mesmes poins, on doit plustost penser que c’est au lieu où elle est qu’ils AT VI, 191 se croysent tous, que non pas plus haut ny plus bas. Sans mesme que ce que les autres superficies, comme AT VI, 192 123 et 456, les peuuent detourner, en empesche. Non plus qu’encore que les deux bastons ACD et BCE qui sont courbés, s’escartent beaucoup des poins F et G, vers lesquels ils s’iroient rendre, si se croysans autant qu’ils font au point C auec cela ils estoient droits ; ce ne laisse pas d’estre veritablement en ce point C qu’ils se croysent. Mais ils pourroient bien estre si courbés, que cela les feroit croiser derechef en vn autre lieu. Et en mesme façon les rayons, qui trauersent les deux verres conuexes DBQ et dbq Voyés la figure en la page 108., se croysent sur la superficie du premier, puis se recroisent derechef sur celle de l’autre ; au moins ceux qui vienent de diuers costés : car pour ceux qui vienent d’vn mesme costé, il est manifeste, que ce n’est qu’au point bruslant marqué I, qu’ils se croisent.

Vous pouues remarquer aussi par occasion, que les rayons du Soleil ramassés par le verre Elliptique ABCLa figure est en la page 114., doiuent brusler auec plus de force qu’estans ramassés par l’hyperbolique DEF. Car il ne faut pas seulement prendre garde aux rayons qui vienent du centre du Soleil, comme GG, mais aussy à tous les autres qui venans Maire, p. 118
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des autres points de sa superficie, n’ont pas sensiblement moins de force, que ceux du centre ; en sorte que la violence de la chaleur qu’ils peuuent causer se doit mesurer par la grandeur du cors qui les assemble, comparée auec celle de l’espace où il les assemble. Comme si le diametre du verre ABC est AT VI, 193 quatre fois plus grand que la distance qui est entre les poins M et L, les rayons ramassés par ce verre doiuent auoir seize fois plus de force que s’ils ne passoyent que par vn verre plat qui ne les destournast aucunement. Et pource que la distance qui est entre ces poins M et L, est plus ou moins grande, à raison de celle qui est entre eux et le verre ABC, ou autre tel cors qui fait que les rayons s’y assemblent, sans que la grandeur du diametre de ce cors y puisse rien adiouster, ny sa figure particuliere, qu’enuiron vn quart ou vn tiers tout auplus ; il est certain que cette ligne bruslante à l’infini que quelques vns ont imaginée, n’est qu’vne resuerie. Et qu’ayant deux verres ou miroirs ardens, dont l’vn soit beaucoup plus grand que l’autre, de quelle façon qu’ils puissent estre, pourvû que leurs figures soient toutes pareilles, le plus grand doit bien ramasser les rayons du soleil en vn plus grand espace, et plus loin de soy, que le plus petit ; mais que ces rayons ne doiuent point auoir plus de force en chasque partie de cet espace, qu’en celuy où le plus petit les ramasse. En sorte qu’on peut faire des verres ou miroirs extremement petits, qui brusleront auec autant de violance que les plus grands. Et un miroir ardent dont le diametre n’est pas plus grand qu’enuiron la centiesme partie de la distance qui est entre luy et le lieu où il doit rassembler les rayons Maire, p. 119
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du soleil ; c’est à dire, qui à mesme proportion auec cette distance, qu’a le diametre du soleil auec celle qui est entre luy et nous, fust-il poli par vn Ange ne peut faire, que les rayons qu’il assemble eschauffent plus en l’endroit où il les assemble, que ceux qui vienent directement du AT VI, 194 Soleil. Ce qui se doit aussy entendre des verres bruslans à proportion. D’où vous pouués voir que ceux qui ne sont qu’a demi sçauans en l’Optique se laissent persuader beaucoup de choses qui sont impossibles, et que ces miroirs dont on a dit qu’Archimede brusloit des nauires de fort loin, deuoient estre extremement grands, ou plustost qu’ils sont fabuleus.

La quatriesme differẽce qui doit estre remarquée entre les verres dont il est icy question appartiẽt particulierement à ceux qui changent la disposition des rayons qui vienent de quelq; point assés proche d’eux, et consiste en ce que les vns, à sçauoir ceux dõt la superficie qui regarde vers ce point est la plus creuse à raison de leur grandeur, peuuent receuoir plus grãde quantité de ces rayons, que Maire, p. 120
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les autres, encore que leur diametre ne soit point plus grand. Et en cecy le verre Elliptique NOP, que ie suppose si grand, que ses extremites N et P sont les poins où se termine le plus petit diametre de l’Ellipse, surpasse l’hyperbolique AT VI, 195 QRS, quoy qu’on le suppose aussy tant grand qu’on voudra ; et il ne peut estre surpassé par ceux d’aucune autre figure. Enfin ces verres different encore en ce que pour produire les mesmes effects eû esgard aux rayons qui se rapportent à vn seul point ou à vn seul costé, les vns doiuent estre plus en nombre que les autres, ou doiuent faire que les rayons qui se rapportent à diuers poins, ou à diuers costés, se croysent plus de fois. Comme vous avés vû que pour faire auec les verres Elliptiques, que les rayons qui vienent d’vn point s’assemblent en vn autre point, ou s’escartent comme s’ils venoient d’vn autre point ; ou que ceux qui tendent vers vn point s’escartent derechef comme s’ils venoient d’un autre point ; il est tousiours besoin d’y en employer deux ; au lieu qu’il n’y en faut employer qu’vn seul, si on se sert des hyperboliques. Et qu’on peut faire que les rayons paralleles demeurans paralleles occupent vn moindre espace qu’auparauant, tant par le moyen de deux verres hyperboliques conuexes, qui font que les rayons qui vienent de diuers costés se croysent deux fois ; que par le moyen d’vn conuexe et d’vn concaue, qui font qu’ils ne se croisent qu’vne fois. Mais il est euident que iamais on ne doit employer plusieurs verres à ce qui peut estre aussy bien fait par l’ayde d’vn seul, ny faire que les rayons se croisent Maire, p. 121
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plusieurs fois lors qu’vne suffist.

Et generalement, il faut conclure de tout cecy que les verres hyperboliques et les elliptiques sont preferables à tous les autres qui puissent estre imaginés, et mesme que les hyperboliques sont quasi en tout preferables aus elliptiques. En suite de quoy ie diray maintenant AT VI, 196 de quelle façon il me semble qu’on doit composer chasque espece de lunetes, pour les rendre les plus parfaittes qu’il est possible.