ARTICLE XXXIV.
Comment l’ame et le corps agissent l’un
contre l’autre.

Concevons donc icy que l’ame a son siege principal dans la petite glande qui est au milieu du cerveau, d’où elle rayonne en tout le reste du corps par l’entremise des esprits, des nerfs et mesme du sang, qui, participant aux impressions des esprits, les peut porter par les arteres en tous les membres. Et nous souvenant de ce qui a esté dit cy dessus de la machine de nostre corps, à sçavoir que les petits filets de nos nerfs sont tellement Le Gras, p. 50
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distribuez en toutes ses parties, qu’à l’occasion des divers mouvemens qui y sont excitez par les objets sensibles, ils ouvrent diversement les pores du cerveau. ce qui fait que les esprits animaux, contenus en ses cavitez entrent diversement dans les muscles, au moyen dequoy ils peuvent mouvoir les membres en toutes les diverses façons qu’ils sont capables d’estre meus ; et aussi que toutes les autres causes, qui peuvent diversement mouvoir les esprits, suffisent pour les conduire en divers muscles. Adjoustons icy que la petite glande qui est le principal siege de l’ame, est tellement suspenduë entre les cavitez qui AT XI, 355 contiennent ces esprits, qu’elle peut estre meuë par eux en autant de diverses façons, qu’il y a de diversitez sensibles dans les objets ; Mais qu’elle peut aussi estre diversement meuë par l’ame, laquelle est de telle Le Gras, p. 51
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nature qu’elle reçoit autant de diverses impressions en elle, c’est à dire, qu’elle a autant de diverses perceptions, qu’il arrive de divers mouvemens en cette glande. Comme aussi reciproquement la machine du corps est tellement composée, que de cela seul que cette glande est diversement meuë par l’ame, ou par telle autre cause que ce puisse estre, elle pousse les esprits qui l’environnent vers les pores du cerveau, qui les conduisent par les nerfs dans les muscles, au moyen dequoy elle leur fait mouvoir les membres.