[•](#B) EXTRAIT DU DISCOURS SUR LA DOUCEURSUR LA DOUCEUR [•](#C) DOUCEUR PAR ME LA P. O.
§ 1La douceur [•](#A) [Également dans B :] douceur marque ordinairement de la grandeur… dans un grand esprit est une preuve de grandeur d’âme [•](#B) d’âme et une vertu qui a sa récompense dès ce monde-ci.¶La colère est souvent arrêtée par la crainte de ne la pas montrer impunément ; pourquoi attache-t-on de la honte…. [•](#A) d’âme. C’est une vertu précieuse à la société ; vertu qui a sa récompense dès…
§ 2La douceur est la vertu la mieux récompensée dès ce monde-ci.
§ 3 [•](#A) Attacherait-on donc de la honte à céder quelquefois, à ne pas prendre toujours sous le moindre prétexte, les partis extrêmes ? Ce préjugé ne pourrait subsister qu’autant que les hommes seraient déraisonnables ; mais ils se polissent de plus en plus, les mœurs s’adoucissent et le préjugé disparaît.¶Que…Pourquoi les hommes attachent-ils de la honte à céder [•](#B) céder puisqu’il y faut plus de courage, ce que la plupart des hommes appellent fermeté, n’est le plus souvent qu’humeur, que raideur et faux… avec douceur, puisqu’il faut plus de raison et de courage pour céder que pour résister ? C’est que la plupart des hommes sont des enfants.
§ 4 [•](#A) Que les hommes reconnaissent donc que ce qu’ils appellent vivacité, fermeté, n’est souvent qu’humeur, que raideur : les prétendues vertus dont le public se réclame, ne sont souvent qu’un faux héroïsme, plus digne de pitié que de louanges.¶Au contraire, la douceur marque ordinairement de la grandeur d’âme… [Voir § 1.]Ceux qui n’ont pas assez de force pour céder avec douceur, se piquent souvent de fermeté. Mais quand cette fermeté est destituée de raison, ce n’est plus vertu, ce n’est qu’humeur, que raideur, opiniâtreté, faux héroïsme.
§ 5 [•](#A) [Également dans B :] Déjà elle [la douceur] suppose dans ceux qui la pratiquent l’égalité d’âme ; elle en est en même temps et l’effet et la cause.¶Si nous pouvions conserver cette heureuse égalité, elle nous procurerait les biens qui sont l’objet de notre empressement, ou elle les remplacerait d’une autre manière ; elle nous fournirait pour dédommagement le détachement de ces mêmes biens. Il y a plus : la…La douceur suppose l’égalité et la tranquillité de l’âme, elle en est quelquefois l’effet et quelquefois la cause.
§ 6La douceur [•](#A) douceur n’annonce pas que l’on soit indifférent aux biens de la vie ; elle ne consiste pas à ignorer ses droits, à les négliger, à les abandonner, mais à en faire quelquefois le sacrifice.⁋Pesons donc les avantages de cette vertu ; prenons-la dans le point de vue où elle flatte notre cupidité même ; nous la verrons servir nos intérêts, faciliter l’exécution de nos desseins, nous procurer les moyens d’acquérir les biens de la terre, presque sans obstacle et de les posséder sans trouble. Les passions, dans la vivacité de leurs transports, ne connaissent guère l’usage de la douceur. L’amour-propre, indépendant et avide de dominer, se méprend… ne nous rend point indifférent aux [•](#B) [Suite du paragraphe identique à A.] plaisirs, mais elle nous en fait faire quelquefois un sacrifice à l’amitié et à la reconnaissance.
§ 7 [•](#A) L’amour-propre, indépendant et avide de dominer, se méprend […] moyens d’assurer sa liberté, ou d’usurper sa domination.¶Si on le laissait le maître de porter ses coups sur tout ce qui s’oppose à son élévation, combien de victimes on le verrait s’immoler ! Destructeur de ses supérieurs, il deviendrait le tyran de ses inférieurs. Nulle mesure de respect et d’obéissance ne pourrait le satisfaire.¶Heureusement pour la société l’amour-propre des uns est croisé par l’amour-propre des autres. Si je veux m’élever, je vois des obstacles au-dessus de ma tête ; la puissance de mes supérieurs observe mes démarches, brise mes efforts et me précipite, plutôt que de voir à ses côtés. À mes pieds je trouve d'autres écueils ; mes inférieurs, de qui je voulais exiger un tribut qui ne m’était point dû, me refusent même les devoirs ordinaires ; ils s’affranchissent d’une subordination que je voulais leur rendre onéreuse. Voulez-vous voir rentrer les choses dans l’ordre ? Le joug que l’on nous impose est, dites-vous, trop pesant ; paraissons-nous y prêter ; cédons pour quelque temps à la tempête ; plaignons-nous, mais sans fiel et sans amertume : employons les armes de la raison et non pas celles de la rébellion. Il serait bien dur, ce supérieur, s’il continuait d’appesantir son bras, et s’il ne se laissait pas désarmer par la douceur. D’un autre côté nos inférieurs, que nos manières dures auraient rebutés, qui au hasard de succomber sous notre autorité, auraient peut-être essayé d’y porter atteinte, font de leur liberté un usage qui leur plaît, en nous rendant des devoirs, en nous marquant de l’attachement.¶Dans… [•](#B) L’amour-propre, indépendant et avide de dominer, se méprend […] moyens d’assurer sa liberté, ou d’appuyer son crédit.¶Si… [Identique à A :]⁋Dans…L’homme impatient et malhabile se méprend très souvent sur les moyens d’établir et d’assurer sa domination et son autorité ; il trouve des obstacles quand il use de manières hautaines et menaçantes ; c’est l’effet de l’impatience : il changerait de manières, il aurait des manières douces, s’il prenait garde qu’il aime lui-même à être dominé par la douceur.
§ 8Dans quelque état [•](#A) [Identique en B :] état que l’on prenne les […] roi, la douceur du gouvernement est le plus […] concilier les supérieurs.¶Cependant, à quel point les hommes s’abusent ! S’ils aspirent à des richesses, à de certains avantages, l’expédient auquel ils ont recours est ordinairement celui de la force et de la violence ; mais la… de supériorité que l’on suppose les hommes, de père, de maître, de roi ; c’est la douceur dans leurs manières qui fait le plus solide fondement de leur autorité, comme la douceur de ceux qui sont subordonnés est le plus sûr moyen de se concilier leurs supérieurs.
§ 9La violence [•](#A) violence et la force font naître les obstacles, au lieu que la douceur saurait les écarter.⁋Dans… [•](#B) violence dans quelque entreprise fait naître des obstacles au lieu que la douceur sait les écarter. dans certaines entreprises fait naître des obstacles que la douceur seule sait écarter [•](#A) écarter, ou même n’en trouverait point à combattre. Si vous remontez aux temps de barbarie, où la force décidait du droit et des intérêts des hommes, vous voyez le fort déposséder le faible, et dépouillé à son tour par un plus fort. La force dont les hommes abusaient ne produisait que des injustices, que des cruautés, que des révolutions. L’usurpateur se trouvait réduit à prêter le flanc à de nouveaux agresseurs qui s’offraient pour le combattre. On a commencé à jouir des biens tranquillement que dans le temps….
§ 10 [•](#B) Dans les temps de barbarie la force décidait du droit. On a commencé […] tranquillement que…Les hommes n’ont commencé à jouir tranquillement de leurs biens, que dans le temps où les mœurs se sont adoucies.
§ 11Par quelle fatalité les hommes qui pourraient mettre à profit pour leur bonheur, l’avantage qu’ils ont d’être réunis en corps de société, ne sont-ils occupés le plus souvent qu’à s’incommoder [•](#A) s’incommoder, qu’à se nuire réciproquement ? La plus légère offense les blesse, les aigrit ; et quand ils s’en tiendraient à vivre ensemble dans la froideur, c’est déjà un état violent qui les gêne, qui les fatigue. Mais l’animosité a quelquefois des suites encore plus fâcheuses. L’esprit des vengeances fait oublier les devoirs ; et si les lois ne lui mettaient un frein, on nous verrait périr par les mains les uns des autres. Au défaut… [•](#B) s’incommoder, qu’à se nuire réciproquement ?¶Au défaut… [•](#C) s’incommoder, qu’à se nuire réciproquement ? C’est faute de bien connaître leurs plus grands intérêts.¶Au défaut… ? C’est faute de bien connaître leur plus grand intérêt, c’est faute d’être doux ; c’est faute de douceur dans le commerce.
§ 12Au défaut des armes, nous saisissons d’autres moyens de nous venger : nous nous répandons en discours injurieux, nous semons des écrits satiriques, et quel est le fruit de nos emportements ? Les coups que nous portons nous attirent les blessures que nous recevons [•](#A) recevons. Si on épargne notre vie, on n’épargnera pas notre réputation ; le trait partira de la main d’un de nos ennemis, qui ne l’est devenu, que parce que nous nous sommes les premiers élevés contre lui : triste […] ouvrage. [Fin du paragraphe.] : triste état ! et d’autant plus fâcheux qu’il est notre propre ouvrage [•](#C) [Fin du paragraphe en B et C.] lorsque nous manquons de douceur et de patience.
§ 13 [•](#A) Pourquoi l’homme […] tranquille ? C’est qu’il ne blesse…L’homme doux jouit d’un sort tranquille : il ne blesse point l’amour-propre des autres, il ne heurte point les passions [•](#A) passions : il abhorre la violence. Dans…. Dans l’adversité on ne le voit point éclater en murmures, [•](#A) murmures, en impatience, accuser la Providence d’injustice. Dans la… dans la prospérité il ne se méconnaît point. [•](#A) point. S’il efface les autres par l’autorité, par les richesses, par les talents, il ignore sa supériorité, ou n’en fait usage que pour procurer le bien d’autrui. Qui est-ce qui voudrait lui livrer la guerre ? Que l’on ait contre lui les prétentions les plus chimériques, il imagine qu’elles ne sont pas sans quelque fondement. Comme ses mœurs sont d’autant plus douces qu’il a plus de lumières ; si l’homme altier le traite avec hauteur, avec dureté ; si l’homme inégal […] caprices, il lit… Si [•](#B) si l’homme altier le traite avec hauteur, si l’homme […] caprices, il lit… l’homme inégal lui fait sentir ses caprices, il s’y attend. Il lit les effets dans les causes. Il regarde moins les mauvais traitements comme des injures [•](#A) injures qui lui soient personnelles, que comme des suites d’un caractère marqué, d’une passion dominante : ou dans un autre sens, il se soupçonne de s’être attiré les désagréments qu’il essuie.¶S’il a embrassé la profession des armes, exposé par état aux vivacités d’une jeunesse fougueuse, qui ne respire que les occasions de montrer de la valeur, combien de différends et de querelles n’étouffe-t-il pas dans leur naissance ! Son moindre mérite est de ne pas les occasionner. Le fonds de douceur qu’il conserve vient perpétuellement à son secours et au secours des autres. Comment lutter contre un homme qui fait acheter la paix en n’ajoutant point de foi aux faux rapports, en interprétant, dans le sens le plus favorable, les termes équivoques dont on use avec lui, en fermant les yeux sur les démarches peu mesurées des autres et sur leurs procédés peu obligeants ? Il n’y a plus qu’une extrême férocité qui soit capable de le poursuivre et de le harceler : si elle s’acharne contre lui, il lui oppose sa douceur et elle donne le temps à l’agresseur de sentir le péril qu’il court lui-même et l’inutilité de s’y exposer : comme elle est très compatible avec une fermeté bien entendue, elle est encore le signe de la bravoure elle-même, et devient d’autant plus redoutable, qu’elle marche… que comme des suites d’un tempérament démasqué.
§ 14Dans [•](#B) Dans un autre temps il soupçonne de s’être attiré les désagréments qu’il essuie.¶La douceur marche… [•](#C) Dans un[e] autre occasion, l’homme… d’autres occasions l’homme doux insulté soupçonne de s’être attiré lui-même les injures qu’il essuie.
§ 15 [•](#B) [Paragraphe absent.]L’air modeste et attentif, les gestes mesurés, le ton modéré, le parler un peu lent, les paroles gracieuses, les yeux baissés, tout sert à exprimer le caractère de la femme douce.
§ 16 [•](#B) [Paragraphe absent.]La douceur nous annonce le respect, l’approbation, la confiance, la considération, l’obéissance, l’envie de nous plaire, la gaieté. Or comment ne nous plairait-elle pas plus que les autres vertus ?
§ 17La douceur marche de concert avec la présence d’esprit si décisive dans toutes sortes de combats.
§ 18Ne [•](#A) Ne la confondons point avec cette fade complaisance, avec cette basse flatterie, qui ne sont propres qu’à faire leur cour servilement, qui […] signes de faiblesse que des marques de bonté : car quel mérite y aurait-il à abandonner des droits que l’on ne serait pas capable de défendre ?¶La douceur n’étouffe pas entièrement les passions, seulement elle leur impose silence ; et par l’habitude de les réprimer, elle parvient quelquefois à les dompter. Nous lui tenons toujours compte des sacrifices qu’elle nous fait ; elle nous gagne, elle nous prévient : elle prend empire sur les cœurs et sur les volontés.¶Celui… confondons point la douceur [•](#B) douceur avec cette fade complaisance, avec cette basse flatterie, qui ne sont propres qu’à faire leur cour servilement, qui […] signes de faiblesse que des marques de bonté.¶Il n’y a point de mérite d’abandonner des droits que l’on ne serait pas capable de défendre.¶Celui… vertueuse avec ces fades complaisances serviles qui sont plutôt des signes de petitesse et de faiblesse que des marques de grandeur et de bonté.
§ 19Celui dont les mœurs sont douces est à nos yeux l’homme de presque toutes les vertus [•](#A) vertus. Nous sommes naturellement portés à les lui attribuer toutes. Il n’est doux que parce qu’il est équitable, que parce qu’il fait rendre la justice aux autres, et se la rendre à lui-même. Il est doux parce qu’il est désintéressé, ou sa douceur le conduit à le devenir. La douceur suppose encore en lui de la patience et de l’humilité ; elle ne se rencontre guère avec les vices.¶Celui qui montre un caractère doux, celui qui sait être agréable, ou du moins n’être pas incommode dans la société, ne commettra guère que […] légères, que des imprudences que nous lui pardonnons d’avance ; tandis que l’homme vertueux… [•](#B) vertus.¶On est doux […] patient et humble.¶L’homme doux… ; c’est que l’on est doux, parce qu’on est équitable, parce que l’on est juste, parce que l’on est désintéressé, parce qu’on est patient et [•](#C) et modeste.¶L’homme doux… indulgent.
§ 20 [•](#B) [Paragraphe absent en B et C.]Rien de plus opposé à la douceur, rien ne déplait tant que la colère ; ce caractère annonce d’un coté toutes sortes d’injustices, et de l’autre toutes sortes de malheurs et de désagréments dans la vie.
§ 21L’homme doux ne commettra que des fautes légères dans la société.
§ 22L’homme vertueux qui [•](#A) qui nous a choqué… n’est pas doux et qui nous a choqué par sa rudesse, ne peut pas se réconcilier avec nous par la pratique des [•](#A) [Identique en B et C :] des vertus… autres vertus. Il est noble et généreux, mais [•](#A) [Identique en B :] mais je ne suis pas l’objet […] mais je n’ai point… nous ne sommes pas l’objet de ses bienfaits ; il est fidèle à ses promesses, mais nous n’avons point contracté d’engagements avec lui.
§ 23 [•](#A) [Identique en B :] Il n’y a que les vices qui puissent exciter et justifier notre haine ; les défauts ont droit à notre indulgence. N’approfondissons point les caractères d’un œil chagrin. Ayons la vue moins bonne et le cœur meilleur.¶Savoir…Les vices injustes excitent notre haine et la justifient [•](#C) justifient, les défauts ont droit à notre indulgence. L’homme doux… ; mais pour les défauts, il semble qu’ils ont droit à l’indulgence des personnes qui portent de la douceur dans le commerce.
§ 24 [•](#A) Savoir être content des autres est le vrai secret d’en être goûté soi-même.¶Pourquoi ne pas envisager les hommes du côté favorable ? Pourquoi nous excercer perpétuellement à découvrir les travers et les ridicules, sans porter notre attention sur les bonnes qualités ? Si nous ne pouvons rectifier notre cœur, montrons du moins de la douceur. C’est elle qui est l’âme de la conversation, qui a le don de s’insinuer dans les esprits.¶Qu’est-ce… [•](#B) Savoir être content des autres est le vrai secret d’en être goûté soi-même.¶Qu’est-ce…L’homme doux se trouve aisément content des autres, et c’est le vrai secret de s’en faire goûter lui-même.
§ 25Qu’est-ce qu’une assemblée d’où l’on a banni l’esprit de douceur [•](#A) douceur et de paix ? C’est… ? C’est un assemblage d’hommes qui ne savent que se craindre, se combattre et se haïr.
§ 26 [•](#A) [Identique en B :] On dispute, le plus souvent, sans être convenu de l’état…Les personnes douces ont bien plus de facilité que les autres à convenir dans la dispute de l’état de la question.
§ 27 [•](#A) [Identique en B :] Les disputes, au lieu d’éclaircir les choses, n’aboutissent…Sans cette douceur les disputes, au lieu d’éclaircir les matières, n’aboutissent qu’à aigrir, qu’à aliéner les [•](#A) les personnes.¶On parle par envie de briller. On garde le silence par dépit et par orgueil. Les uns s’emparent de la parole, se croient féconds en idées, lorsqu’ils ne sont qu’abondants en expressions. [Plus loin dans le texte :] Tout excès de liberté est licence, et la licence est le renversement de la liberté.¶Que l’on introduise dans l’assemblée un homme d’un caractère doux et aimable, tous les yeux se tournent sur lui. Voilà un acteur intéressant qui change la scène, qui ranime la conversation. Bien intentionné pour nous, il nous met dans les dispositions les plus favorables à son égard. Il jouit du progrès prompt et rapide qu’il fait dans l’esprit de ceux qui ne le connaissaient pas ; en un mot de la place avantageuse qu’il tient dans nos cœurs. S’il est doué des qualités de l’esprit, que d’agréments ne va-t-il pas apporter dans la société ! Il répand dans nos entretiens, je ne sais quelle teinture de gaieté, d’enjouement, si propre à faire éclore les idées, à faire valoir la raison elle-même. Plus il est éclairé, et mieux il sait parler… [•](#B) les personnes, les uns parlent dans les disputes par envie de briller, les uns gardent le silence par orgueil, les uns se croient féconds en idées tandis qu’ils ne sont qu’abondants en expressions.¶Tout excès de liberté dans la société est licence et la licence est le renversement de la liberté.¶L’homme… [•](#C) les personnes, les uns parlent par envie de briller, quelques-uns gardent le silence par orgueil, les autres se croient féconds en pensées tandis qu’ils ne sont qu’abondants en expressions.¶Tout excès de liberté est licence et la licence est le renversement de toute société.¶L’homme… esprits.
§ 28 [•](#A) Plus il [un homme d’un caractère doux et aimable] est éclairé, et mieux il sait parler […] supérieur à celui…L’homme doux [•](#B) doux communément sait parler […] supérieur à celui… sait ordinairement parler le langage du cœur, langage bien supérieur et bien plus éloquent que celui de l’esprit.
§ 29Dans un combat d’opinions, [•](#A) opinions, il est plus près […] que ceux qui se laissent emporter par la fougue des passions ou par le feu de l’imagination.¶Combien sa douceur n’est-elle pas utile pour établir la liberté qu’il a saisie ! Il ne la présente ni avec cette vivacité de l’homme, tout étonné d’avoir fait une découverte, ni avec ce ton d’autorité qui veut perpétuellement subjuguer l’auditeur, sans lui donner le temps de l’examen et de la discussion. La vérité prend dans sa bouche ce ton persuasif auquel on ne résiste point. Il ne rejette point les objections, il les estime assez pour les combattre ; mais il emploie contre elles des armes qui ne portent que sur l’opinion, et qui ne blessent point… l’homme doux est bien plus près du vrai que celui qui se laisse emporter par la [•](#B) la fougue de ses passions et par le fruit de son imagination.⁋L’homme… colère ou par quelque autre passion.
§ 30 [•](#B) L’homme doux n’emploie des armes que contre l’opinion qui ne blesse… [•](#C) L’homme doux n’emploie des armes que contre l’opinion opposée ; il ne la combat point comme étant la vôtre ; ainsi il ne blesse…En vous disant, je ne suis pas encore de votre avis, l’homme doux dispute peu, il vous laisse votre opinion et ne vous ôte pas l’espoir de la recevoir un jour ; ainsi il ne blesse point l’amour-propre.
§ 31 [•](#A) C’est à proportion de l’estime que l’on a conçue pour lui, que l’on fait des efforts pour le persuader.¶Et si dans la dispute aucun des combattants ne rend les armes, c’est l’homme doux qui devient le médiateur. L’aigreur et l’emportement de ses adversaires, la faiblesse de leurs raisonnements, la violence de leurs invectives ne le rebutent point. Il se sert de toute sa raison pour conserver l’équilibre qui allait être dérangé. Il suspend les hostilités.⁋Il rompt…La mesure de l’estime que l’on a pour l’homme doux, fait la mesure des soins que l’on prend à lui plaire et à s’en faire goûter.
§ 32 [•](#A) Il rompt les coups qu’il ne repousse point, et il nous apprend par son exemple, que la différence […] société. [Fin du paragraphe.]L’homme doux rompt les coups dans la dispute et ne les repousse point. Il nous apprend que la différence des opinions ne doit point troubler le bon ordre de la société [•](#B) société.¶L’avantage… : il n’y a souvent qu’à se faire crédit quelque temps les uns avec les autres, pour penser un jour de la même manière.
§ 33 [•](#A) Et c’est là un avantage […] de paraître agir au gré d’une volonté étrangère, lorsqu’il…L’avantage de l’homme qui a des mœurs douces, est de paraître agir au gré de la volonté d’autrui, lorsqu’il ne fait que se contenter lui-même.
§ 34La complaisance [•](#A) complaisance est le prix de la complaisance.¶On reçoit volontiers la loi de celui qui ne cherche point à la donner. Il n’exige rien ; il ne donne point son goût pour règle. On entrevoit ses désirs, ou on les devine ; c’est une raison de plus d’y déférer.¶Est-ce bizarrerie, est-ce sagesse de l’amour-propre, de se laisser dominer par quiconque a l’adresse de le ménager ? Ce serait mal le connaître que de chercher à lui imposer par les avantages extérieurs ; au contraire, savoir gagner les hommes, savoir se rendre agréable dans la société par la douceur des mœurs, c’est obliger les hommes par un moyen plus sûr que celui des bienfaits… [Voir § 35.] [•](#B) complaisance est… que [•](#C) que l’on a pour nous est […] complaisance que nous avons pour les autres.¶La… nous avons pour l’homme doux, est le fruit de la complaisance qu’il a pour nous.
§ 35La douceur est [•](#B) est un plus sûr moyen pour gagner les hommes que celui des… une voie plus sûre pour gagner la plupart des hommes, que la voie des bienfaits [•](#A) bienfaits ; c’est s’assurer un sort également tranquille et agréable. [Fin du “Discours”, suivi d’une “Prière à Jésus-Christ”.].
§ 36 [•](#C) [Ce qui suit ne figure ni en B ni en C.]L’exemple de Socrate chez les Anciens et de St. François de Sales chez les Modernes, nous démontre que la douceur peut s’acquérir à un très haut degré, malgré un tempérament brusque et pétulant. Il est vrai qu’il faut du courage et de la constance pour avoir des attentions journalières à remarquer durant cinq ou six mois les premiers petits mouvements d’impatience qui précédent une colère honteuse, parce qu’elle est déraisonnable.
§ 37La douceur qui procure à l’homme le calme et la tranquillité tient son esprit tout préparé à goûter le long des jours tous les plaisirs innocents, soit de la vie champêtre, soit de la vie de la ville capitale, chacun dans sa condition.
§ 38Sans ce calme fruit naturel de la douceur, ce n’est qu’agitation dans l’esprit, inquiétudes sur les maux futurs, chagrins pour les maux présents, espèce de fièvre continue ; ainsi sans douceur, point de bonheur, et plus on est doux, plus on est heureux. Beati mites1Expression tirée du verset de l’Évangile, placée en exergue au début du Discours de M. Nicolas (Discours qui a remporté le prix d’éloquence à l’Académie française en l’année MDCCXXXIX, Paris, J.-B. Coignard, 1739, p. [1]) : « Beati mites quoniam ipsi possidebunt terram » (« Bienheureux ceux qui sont doux ; parce qu’ils posséderont la terre », La Bible [1672], Louis-Isaac Lemaistre de Sacy [trad.], P. Sellier [éd.], Paris, R. Laffont [Bouquins], 1990, Mt, V, 4)..
Conséquences [•](#C) [Titre absent.]
§ 39Comme on ne saurait avoir une grande douceur sans avoir beaucoup de vertus, on ne saurait trop recommander aux enfants la pratique de la douceur [•](#C) douceur. [Fin du paragraphe.] dans les collèges.
§ 40S’ils sont fort doux, ils seront fort éloignés d’offenser leurs camarades.
§ 41S’ils sont fort doux, ils pardonneront aisément les offenses qu’ils recevront de leurs camarades.
§ 42S’ils sont fort doux, ils seront toujours disposés à faire plaisir.
§ 43Or quel agrément dans le commerce, lorsque l’on ne craint point d’y être offensé et lorsque l’on trouve les autres tout disposés à nous faire plaisir !
Avertissement
§ 44Une dame pour sa propre utilité, après avoir lu avec plaisir le discours de M. Nicolas sur la douceur, entreprit d’en faire l’extrait par forme de sentences, elle y ajouta encore plusieurs de ses pensées sur le même sujet. J’y en ai aussi ajouté quelques-unes des miennes. Voilà comme s’est fait ce petit écrit, qui comme pareils bons écrits, peut devenir utile à proportion qu’on en méditera souvent [•](#C) souvent quelques articles. les différents articles.