<1> Ainsi, comme le comte n’avait en son pouvoir, de la part de son frère, aucune forteresse, à l’exception de Mileto, il lui réclame la part qu’il lui avait promise – c’est-à-dire la moitié de toute la Calabre –, lorsque, invité par Robert à le rejoindre depuis Ascoli, ils s’étaient réconciliés l’un avec l’autre : il voulait surtout à partir de cela constituer un douaire décent pour sa jeune épouse, s’agissant d’une jeune femme de si illustre naissance. Seulement, si le duc accordait généreusement de l’argent, il se montrait beaucoup plus parcimonieux dans la distribution des terres et, usant de procédés dilatoires, il remettait son frère à plus tard. <2> Alors, le comte, voyant clair dans la ruse de son frère et ne supportant pas d’être abreuvé plus longtemps de mensonges, le cite en jugement devant la noblesse de toute la Pouille, réclamant ce qu’il lui avait promis. Mais, comme même ainsi il n’obtient rien, il le quitte, exaspéré, mettant un terme au traité qui les unissait ; parvenu à Mileto, il fortifia la place vigoureusement, engageant de partout tous les meilleurs chevaliers pour nuire à son frère. <3> Mais, bien qu’il fût évident que son frère se montrait injuste envers lui, le comte cependant, respectant la règle procédurale, se garda quarante jours durant de porter tort à son frère1Glasson 1889, 444, indique que, s’il n’est pas tout à fait inconnu auparavant, le délai de quarante jours (ou quarante nuits) est celui qu’un capitulaire, ajouté à la loi des Francs Saliens par Louis le Pieux en 819 ou peu après, impose pour les citations à comparaître devant le mallus publicus (MGH Legum sectio II. Capitularia regum Francorum, t. I, A. Boretius (éd.), Hanovre, Hahn, 1883, nº 142, Capitula legi salicae addita, § 1, p. 292, l. 11). Voir aussi Chénon 1926, p. 249-250. Cette disposition, précise encore Glasson 1889, 662, est restée dans un certain nombre de coutumes postérieures, en ce qui concerne le droit des nobles, par exemple dans les coutumes d’Artois (voir Tardif 1885, 49). On peut mentionner aussi l’assignation faite à Geoffroi Martel par Guillaume de Normandie, quarante jours à l’avance, selon Guillaume de Poitiers (I, 32). Si l’on en croit Malaterra, voici donc quelles furent les étapes préliminaires au siège de Mileto : 1. Roger somme Robert de réunir une cour féodale pour obtenir justice (il le cite en jugement devant la noblesse de Pouille). 2. Il n’obtient rien (comprenons que Robert ne réunit pas la cour et commet un déni de justice envers son frère-allié-vassal). 3. Par droiture, par respect de la règle procédurale (legalitatem suam), et pour ne pas donner à Robert un argument contre lui, Roger somme une nouvelle fois Robert de lui faire justice et respecte le délai de quarante jours pour laisser à ce dernier une nouvelle chance de lui répondre. 4. Robert restant toujours sourd, Roger est délié de sa fidélité envers son seigneur-allié et peut engager une guerre légitime contre lui. Nous remercions vivement Jean-Luc Chassel (université Paris Ouest Nanterre La Défense), à qui nous devons la rédaction de cette note., afin que, si celui-ci venait à se repentir de son attitude à son égard avant l’expiration de ce délai, on ne jugeât pas que c’était plutôt lui – le plaignant – qui s’était mis dans son tort : il préférait qu’on imputât à son frère plutôt qu’à lui la responsabilité des torts dans cette dissension.
<1> Castrum itaque nullum in sua a fratris potestate excepto solo Melitohabens [+] [habens AC Z : habito B post fratre transf. [-]] , a fratrehabens, a fratrehabens, a fratrehabens, a fratrehabens, a fratre, a fratre habito ut quod sibi promiserat quando ab Ascla [+] [ab ascla A Z : abscla C ascula B ad ascaleam Z2 ab scalea ed. pr. a scalea Pontieri. [-]] ab AsclaAbsclaAscula [+] [Z2 : ad Ascaleam [-]] ab Scaleaa Scalea ab ipso invitatus ad invicem reconciliati sunt – medietatem videlicet [+] [videlicet om. A. [-]] videlicetvidelicetvidelicetvidelicet[om.] totius Calabriae – impartiatur, maxime quia juvenculam uxorem exinde, utpote puellam tam praeclaris ortam natalibus, decenter dotare volebat, requirit. Dux autem, quamvis pecunia largus [+] [largus A ZB : largas C. [-]] larguslarguslarguslarguslargas, in distributione quidem terrarum aliquantulum parcior erat fratremque per ambages differendo protrahebat [+] [differendo (def- Z) protrahebat AC Z : detrahebat differendo B. [-]] differendo protrahebatdifferendo protrahebatdifferendo protrahebatdefferendo protrahebatdetrahebat differendo. <2> Porro comes, fratris [+] [fratris A ZB : fratres C. [-]] fratrisfratrisfratrisfratrisfratres calliditatem animadvertens [+] [animadvertens AC B : animum advertens Z ed. pr. [-]] animadvertensanimadvertensanimadvertensanimum advertens nec [+] [nec AC : ne ZB. [-]] necnecnecne diutius fallaciis pasci [+] [pasci A : passi Z ed. pr. passis B om. C. [-]] pascipassipassis[om.] sustinens, per meliores totius Apuliae [+] [post apuliae add. mittens B. [-]] ApuliaeApuliaeApuliaeApuliaeApuliae mittens ad rationem ponit, quod sibi promissum fuerat expetens. At [+] [at A : ad C ac B atque Z ed. pr. [-]] AtAdAcAtque cum [+] [cum AC : eum B om. Z ed. pr. [-]] cumcumeum[om.] nec ita proficit, foedere quod [+] [foedere quod AC ZB : foedereque ed. pr. [-]] foedere quodfoedere quodfoedere quodfoedere quodfoedereque inter se habebant [+] [habebant A B : habebat C om. Z ed. pr. [-]] habebanthabebanthabebat[om.] rupto, irato animo a fratre recedit ; Melitumque veniens castrum viriliter firmavit, optimos quosque [+] [optimos quosque AC : o. quoque B Pontieri optimosque Z ed. pr. [-]] optimos quosqueoptimos quoqueoptimosque milites undecumque [+] [undecumque AC Z : unumquemque B. [-]] undecumqueundecumqueundecumqueundecumqueunumquemque sibi [+] [sibi om. B. [-]] sibisibisibisibi[om.] in fratris damnum conducens [+] [conducens AC B : ducens Z ed. pr. [-]] conducensconducensconducensducens. <3> Sed, quamvis erga se fratrem injustum [+] [injustum AC B : suum Z ed. pr. injuste D suum injuste Pontieri. [-]] injustuminjustuminjustesuumsuum injuste agere [+] [agere C ZB : -ret A. [-]] agereagereagereagereageret patulum esset, legalitatem tamen suam servans, per quadraginta dies a fratris injuriainjuriainjuriainjuriainjuria [+] [Cx : injuria [-]] injuria conquerebatur abstinuit [+] [abstinuit A ZB : ob- C. [-]] abstinuitabstinuitabstinuitabstinuitobstinuit, ne, si forte [+] [forte om. B. [-]] forteforteforteforte[om.] infra hunc terminum erga se [+] [se om. Pontieri. [-]] sesesese[om.] resipisceret [+] [resipisceret (rescip- C) AC B : respiceret Z ed. pr. [-]] resipisceretresipisceretrescipisceretrespiceret, ipse, qui de [+] [qui de A B : quidem C Z quidem de Pontieri. [-]] qui dequi dequidemquidem de injuria conquerebatur [+] [conquerebatur AC B : -rabatur Z. [-]] conquerebaturconquerebaturconquerebaturconquerebaturconquerabatur, potius injurius [+] [injurius AC ZBx : -riis B Pontieri. [-]] injuriusinjuriusinjurius [+] [Bx : injurius [-]] injuriis haberi judicaretur [+] [judicaretur AC B : vindi- Z ed. pr. [-]] judicareturjudicareturjudicareturvindicaretur, mallens hujus dissensionisdissensionisdissensionisdissensionisdissensionisdissentionis injuriosam culpam in fratrem potius quam in se retorqueri.
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1Glasson 1889, 444, indique que, s’il n’est pas tout à fait inconnu auparavant, le délai de quarante jours (ou quarante nuits) est celui qu’un capitulaire, ajouté à la loi des Francs Saliens par Louis le Pieux en 819 ou peu après, impose pour les citations à comparaître devant le mallus publicus (MGH Legum sectio II. Capitularia regum Francorum, t. I, A. Boretius (éd.), Hanovre, Hahn, 1883, nº 142, Capitula legi salicae addita, § 1, p. 292, l. 11). Voir aussi Chénon 1926, p. 249-250. Cette disposition, précise encore Glasson 1889, 662, est restée dans un certain nombre de coutumes postérieures, en ce qui concerne le droit des nobles, par exemple dans les coutumes d’Artois (voir Tardif 1885, 49). On peut mentionner aussi l’assignation faite à Geoffroi Martel par Guillaume de Normandie, quarante jours à l’avance, selon Guillaume de Poitiers (I, 32). Si l’on en croit Malaterra, voici donc quelles furent les étapes préliminaires au siège de Mileto : 1. Roger somme Robert de réunir une cour féodale pour obtenir justice (il le cite en jugement devant la noblesse de Pouille). 2. Il n’obtient rien (comprenons que Robert ne réunit pas la cour et commet un déni de justice envers son frère-allié-vassal). 3. Par droiture, par respect de la règle procédurale (legalitatem suam), et pour ne pas donner à Robert un argument contre lui, Roger somme une nouvelle fois Robert de lui faire justice et respecte le délai de quarante jours pour laisser à ce dernier une nouvelle chance de lui répondre. 4. Robert restant toujours sourd, Roger est délié de sa fidélité envers son seigneur-allié et peut engager une guerre légitime contre lui. Nous remercions vivement Jean-Luc Chassel (université Paris Ouest Nanterre La Défense), à qui nous devons la rédaction de cette note.