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Pensées 1994 à 1998

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.
Q : 1750-1751.
S : 1754-1755.
V : 1754.

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Pensées, volume III

1994

Il faut que l’autorité du souverain soit communiquée à autant de gens qu’il est necesaire, et a aussi peu qu’il est possible. Le prince en doit faire part a ses ministres, mais il faut qu’elle reste dans leurs mains et ne passe pas dans d’autres.
Il faut surtout que le prince se garde des affections particulieres ; un certain corps, de certains hommes de certains habits, de certaines {f.289v} opinions, sans cela il se retrecit à faire pitié, la providence l’avoit fait pour avoir une affection generalle elle luy avoit donné de grands objets, on ne dit pas qu’il renonce a son coeur, il ne le doit ni ne le peut, mais a ses fantaisies.
Le premier talent d’un grand prince est celuy de sçavoir bien choisir les hommes, car comme de quelque facon qu’il s’y prenne ses ministres ou ses officiers auront plus de part dans ses affaires que luy, il ne scauroit les avoir trop habiles, ni trop gens de bien. Il faut donc qu’il se mette {f.290r} dans l’esprit que ce choix n’est pas une affaire de goust, mais de raison, qu’un homme qui luy plait n’est pas ordinairement un plus habile homme qu’un homme qui ne luy plait pas. Et que quelque tems qu’on perde a luy faire sa cour, on n’en vaut pas mieux et que tres souvent on en vaut moins.
Il doit etre d’autant plus jaloux du choix de ses ministres que c’est presque la seule action de la royauté qui luy soit propre, les ministres qu’il a une fois choisi prenant part a toutes les autres.
{f.290v} Il ne doit point telement priver ses ministres de sa confience, qu’il leur fasse juger qu’ils sont en peril, car pour lors ils ne songent plus qu’a se maintenir et a combatre par leurs finesses, ses inquietudes.
Il ne doit pas les soumetre à un conseil interieur de quelque favori ou de quelques domestiques, le peubleme[1] une authorité visible, il ne peut souffrir un gouvernement secret, ni à etre conduit comme par des intelligences.
Il ne faut pas qu’il les change avec legerté, car il est sure {f.291r} qu’un nouveau ministre formera de nouveaux projets, et le plans le plus opposé a ce qu’il trouvera etabli sera surement celuy qui luy plaira le mieux. Chaque homme est aussi enemi des idées des autres [;] qu’il est amoureux des siennes. On voit cela dans les batimens, qu’un successeur n’acheva presque jamais,
Du reste je ne scaurois envier la condition de ce troisieme genre d’hommes qui est entre le souverain et les sujets, qui n’ont que les malheurs de la condition des princes, et ne jouïssent ni de la realité de la souverainté {f.291v} ni des avantages de la vie privée, je leur conseille de ne point faire de mauvaises actions pour se maintenir dans un poste malheureux, d’y entrer avec honneur ; de s’y conserver avec inocence, d’en sortir avec dignité, et quand on en est sorti de n’y rentrer jamais.
Si l’on sçavoit bien sentir l’honneur et la gloire qui attendent ceux qui soufrent pour avoir fait leur devoir, il n’y à pas d’ame bien faite qui ne preferat une grande chute a la jouisance certaine des emplois les plus eclatans.

Main principale P

1995

A l’egard de la flaterie on peut {f.292r} avertir tous les princes, il y a une conjuration universelle formée contre eux pour leur cacher la verité, on peut avertir les courtisans que lorsqu’ils y pensent le moins ils commetent de grands crimes, c’est à dire de ces crimes sourds qui extorquent le pardon parce qu’ils frapent tout bas, que si les courtisans sont coupables lorsque par de basses flateries ils endorment la conscience des princes les magistrats plus obligés par leur etat a leur dire la verité le sont encore davantage. Caracalla aiant fait tuer son frere Getta, ordonna a Papinien de chercher {f.292v} des excuses pour ce crime, un paricide repondit-il n’est pas si aisé à excuser qu’a commettre[1]. On ne peut s’empescher s’empescher de s’indigner contre le P. president de Thou qui lorsque Charles IX. alla faire part au parlement de ce qui s’etoit passé à la St Barthelemy voulut justifier cette action en disant que qui ne sçavoit pas dissimuler ne sçavoit pas regner[2]. Ce fut un plus grand crime a un magistrat de sang froid d’avoir justifié cette action qu’a un conseil violent de l’avoir resolue, et a des soldats {f.293r} furieux de l’avoir executée.
Les crimes des sujets sont puni par des supplices et on les y condamne. Ces princes ne peuvent etre punis que par les remords et on les en soulage. OnJe p conjure ceux qui approchent des princes de comparer le mal qu’ils font lorsqu’ils violent leurs devoirs a l’egard de quelqu’un de leurs concitoyens avec celuy qu’ils font lorsqu’ils les violent a l’egard de leur patrie ; les citoyens sont tous mortels, et la patrie est eternel, encore un peu de tems et l’on verra finir le mal qui leur a eté fait, leurs reproches et leurs larmes, celuy qui aujourd’huy est opprimé disparoitera[3] bientot peut etre avant le coupable, mais {f.293v} le crime qui change en pis la constitution d’un etat survit a son autheur a son repentir et a ses remords, apres quoy il ajoute tout courtisan tout ministre qui pour une malheurureuse pension, pour une petite augmentation de fortune sacrifie le bien public est un lache fripon qui aiant une fausse clef d’un tresor dcommun en escamote une partie et renonce a partager legitimement ce qu’il aime mieux derober tout entier.
Mais pourquoy dans tous les tems et dans tous les pays les favoris ont-ils eté si odieux c’est que les princes etant etablis pour nous gouverner nous soufrons le mal qu’ils nous font quelque fois par la cons consideration du bien qu’ils nous font toujours, mais les {f.294r} favoris se trouvent au dessus des autres pour leur utilité seule et particuliere,

Main principale P

1996

Il faut parler de la magnificence des princes ils doivent paroitre avec un certain eclat exterieur, car comme notre devoir est de les respecter ils doivent de leur coté chercher a se rendre respectables, mais il est moins necesaire de les avertir de cela que de la moderation qu’ils doivent avoir. Si
Si je voulois connoitre la puissance d’un prince je n’aurois que faire d’entrer dans son palais de voir la beauté de ses jardins, la richesse de ses equipages, les bassesses de ses courtisans, il n’y a rien de si equivoque, le moindre village {f.294v} m’apprenderoit mieux quelles sont ses veritables forces[1].
Le faste royal est commence par ces deux des citoyens riches et des soldats bien paiés.
L
Le faste royal commence ptoujours par ces deux points, des citoyens riches, et des soldats bien paiés.
Un palais delabré doit moins faire rougir un prince que quatre lieues de pays abandonné et incultes
Un roy superbe d’un peuple pauvre, resemble a un homme habillé de pourpre qui se promeneroit fierement dans les rües avec sa femme et ses enfants couverts de haillons.

Main principale P

1997

{f.295r} Le point fondamental de la bonne administration est facile, il ne consiste qu’a ajuster la depense avec la recepte, si celle ci ne peut augmanter celle la doit descendre. Et jusqu’a ce que cela soit fait aucun projet ne peut etre utile, parce qu’il n’y en à aucun qui ne demande de la depense encor.

Main principale P

1998

Il peut arriver que le bien que l’on fairat enet les respectant les arangemens que l’on prend en respectant [les] loix de l’etat paroisse moins grand considerable et se fasse moins sentir que de certains arangemens qui les choquent sous pretexte de certains besoins de certain ordre d’une certaine regle parce que dans ce 1er cas ce bien n’est gueres different de celuy que font ces roys mêmes qu’il peut arriver que le bien que l’on fait en choquant les loix de l’etat {f.295v} paroisse plus grand que le premïer, mais que l’effet en est comme d’une liqueur donnée à un hidropique qui est sans doute un bien pour le present et un mal incurable pour l’avenir
En un mot le bien fondé sur le renversement des loix de l’etat ne peut etre comparé au mal qui suit de ce renversement même.

Main principale P


1994

n1.

Lire : le peuple aime (erreur de copie du secrétaire).

1995

n1.

Histoire Auguste, Aelius Spartianus, Vie de Caracalla, VIII, 5 (Catalogue, nº 2842 : Historiæ Augustæ scriptores sex. […], Paris, H. Drouart, 1603).

1995

n2.

Selon son fils, l’historien Jacques-Auguste, le président Christophe de Thou aurait emprunté ces paroles fameuses à Louis XI (Histoire universelle de Jacques-Auguste de Thou depuis 1543 jusqu’en 1607, traduite sur l’édition latine de Londres, Londres [Paris], 1734, t. VI, liv. LII, p. 419).

1995

n3.

Lire : disparaîtra.

1996

n1.

Cf. Arsace et Isménie [env. 1748-1754], OC, t. 9, p. 358.