MONSIEUR,
Ie me réjouïs extremement, de ce qu’il vous plaist prendre la peine d’examiner l’écrit que ie vous ay envoyé, mais c’est à condition s’il vous plaist, que vous me ferez la faveur de m’avertir franchement de AT I, 233 toutes les fautes que vous y aurez trouvées ; car ie ne doute point que vous n’y en trouviez plusieurs, vû qu’il y en a mesme quelques-unes que ie connois : Comme en la description que i’ay faite des Lignes courbes, dont il estoit question, desquelles i’ay seulement expliqué quelques especes, au lieu d’en definir les genres tous entiers, ainsi que i’eusse pû faire en cette sorte.
Datis quotcunque rectis lineis, puncta omnia ad illas iuxta tenorem quæstionis relata, contingent unam ex lineis quæ describi possunt unico motu continuo, et omni ex parte determinato ab aliquot Clerselier II, 335 simplicibus Relationibus ; nempe, a duobus vel tribus ad summum, si rectæ positione datæ non sint plures quam quatuor ; A tribus vel quatuor Relationibus ad summum, si rectæ positione datæ non sint plures quam octo ; A quinque vel sex, si datæ rectæ non sint plures quam duodecim, atque ita in infinitum. Et vice versa nulla talis linea potest describi, quin possit inveniri positio aliquot rectarum, ad quas referantur infinita puncta, iuxta tenorem quæstionis, quæ illam contingent ; Quæ quidem rectæ non erunt plures quam quatuor, si curva descripta non pendeat a pluribus quam duobus simplicibus Relationibus ; Nec plures quam octo, si curva non pendeat a pluribus quam quatuor Relationibus ; et sic consequenter. Hic autem simplices Relationes illas appello, quarum singulæ non nisi singulas proportiones Geometricas involvunt ; Atque hæc linearum quæsitarum definitio est, ni fallor, adæquata et sufficiens ; Per hoc enim quod dicam illas unico motu continuo describi, excludo Quadratricem et Spirales, aliasque eiusmodi, quæ non nisi per AT I, 234 duos aut plures motus, ab invicem non dependentes, describuntur : Et per hoc quod dicam illum motum ab aliquot simplicibus Relationibus debere determinari, alias innumeras excludo, quibus nulla nomina, quod sciam, sint imposita. Denique per numerum Relationum singula Genera definio ; atque ita primum Genus solas Conicas Sectiones comprehendit, secundum vero præter illas quas supra explicui, continet alias quam plurimas quas longum esset recensere .
Ie vous diray aussi que i’y ay mis diverses choses, lesquelles ie sçay bien n’avoir pas suffisamment expliquées, comme lors que i’ay parlé des quatre moyens de preparer les Equations, afin de les comparer les unes aux autres, et generalement tout ce que i’ay dit de la façon d’appliquer les lignes Courbes à quelques exemples donnez, où ie devois pour le moins mettre un exemple de cinq ou six lignes droites données par position, ausquelles i’appliquasse la ligne Courbe demandée ; Mais i’ay apprehendé la peine d’en faire le calcul ; Et pour en parler franchement, il m’a semble que ie devois laisser encore quelque chose pour exercer les autres, afin qu’ils éprouvassent si la Question est difficile. Clerselier II, 336 Toutesfois si vous désirez sçavoir la methode dont ie me voudrois servir, pour trouver tels exemples, ie m’oblige ou de vous l’écrire, ou plutost de vous la dire, lorsque i’auray l’honneur de vous voir à Leyde, ou icy : Car on peut plus dire de telles choses en un quart d’heure, qu’on n’en sçauroit écrire en tout un iour. Au reste pour ce que vous me mandez, et que M. H. me témoigne que vous AT I, 235 desirez voir de ma Dioptrique, ie vous en envoye la premiere partie, où i’ay tâché d’expliquer la matiere des Refractions, sans toucher au reste de la Philosophie ; Vous verrez que c’est fort peu de chose, et peut-estre apres l’avoir leuë, que vous en ferez beaucoup moins d’estat que maintenant ; Mais ie ne laisseray pas d’estre bien aise que vous la voyiez, afin que vous me fassiez s’il vous plaist la faveur de m’en dire vostre iugement, et de me la renvoyer, pource que ie n’en ay point du tout de copie ; et de plus, ie ne serois pas bien aise que personne la vist, autre que vous. Ie suis,
MONSIEUR,
Vostre tres-humble, ett tres-obeïssant
serviteur, DESCARTES.