158

[après le 19 février 1204]

L[uc], évêque d’Évreux, notifie à A[dam], abbé de Perseigne, maître H[ugues], archidiacre de Chartres et maître L[othaire], archidiacre de Paris, [juges délégués par le pape], qu’en raison d’un problème de santé et d’autres causes, il ne pourra pas se présenter devant eux à Chartres le jour même, afin d’évoquer le conflit qui l’oppose au doyen d’Évreux et aux chanoines qui soutiennent ce dernier. Il est dangereux pour lui de s’en remettre à d’autres pour le représenter dans une affaire aussi importante et difficile, mais l’évêque, pour ne pas être l’objet de la réprobation des juges délégués ni être vu comme voulant rejeter un juste jugement, envoie aux juges Osbert, chanoine d’Évreux, porteur des présentes lettres, qu’il constitue comme son représentant dans cette affaire, tenant pour ferme ce que ce dernier fera ce jour. Par cette même lettre, il signifie également cela à la partie adverse.

Tableau de la tradition

Original

  • A. Original perdu.

Copie(s) utile(s)

  • B. Copie du XVe siècle dans le deuxième cartulaire du chapitre cathédral d’Évreux, au sein d’un acte d’Adam, abbé de Perseigne, et d’Henri, archidiacre de Chartres, juges délégués, qui cite l’acte épiscopal, Arch. dép. Eure, G 123, p. 389-390 (nº 466).
  • C. Copie du XIIIe siècle dans le premier cartulaire du chapitre cathédral d’Évreux, au sein du même acte des juges délégués, Arch. dép. Eure, G 122, p. 332 (nº 476).

Copie(s) inutile(s)

  • D. Copie du XVe siècle dans un cartulaire du chapitre cathédral d’Évreux, au sein du même acte des juges délégués, Arch. dép. Eure, G 1907, fol. 164, d’après C.

Édition(s)

Indication(s)

Dissertation critique

La bulle du pape Innocent III déléguant le traitement de l’affaire à Adam, abbé de Perseigne, Hugues, archidiacre de Chartres, et Lothaire, chanoine de Paris, est datée du 16 février 1204. Elle est complétée par une deuxième bulle ajoutant la question d’un verger et de certains biens meubles aux objets sur lesquels porte le conflit et la délégation des trois juges (ces deux bulles sont également copiées dans l’acte des jugues délégués : H. Müller, Päpstliche Delegationsgerichtsbarkeit in der Normandie…, II, p. 277, nº 153). Cette deuxième bulle est datée du 19 février 12041Harald Müller donne la date du 20 février 1204 pour cette bulle, qui porte l’indication « Datum Anagnie, XI kal. marcii, pontificatus nostri anno sexto ». L’année 1204 est bissextile, mais l’ajout d’un jour se faisant par redoublement du 6 des calendes (le 25 février est le sixième jour bis des calendes de mars), le jour du 6 des calendes demeure le 24 février, et la numérotation par référence aux calendes des jours précédant le 25 est la même que pour les années non bissextiles. Le 11 des calendes de mars 1204 est donc le 19 février et non le 20., date à laquelle la lettre de l’évêque Luc ne peut être antérieure. La procédure de règlement du conflit par les juges délégués a probablement démarré localement assez vite. La lettre épiscopale, qui s’inscrit dans cette procédure, a dû être donnée dans la suite de l’année 1204 ou en 1205. Les personnages cités dans le texte ne permettent pas de définir un terminus ad quem suffisamment précis et crédible.
Le conflit entre l’évêque Luc et son chapitre cathédral, dans le contexte duquel s’inscrit cette lettre, est une nouvelle étape, au début du XIIIe siècle, d’un différend sur le partage des droits épiscopaux et capitulaires, et sur la juridiction spirituelle du chapitre, qui est attesté pour la première fois sous l’épiscopat de Gilles, par un acte de l’évêque Rotrou de Warwick (Arch. dép. Eure, G 122, p. 2, nº 3). Le doyen Raoul de Cierrey a fait connaître les plaintes du chapitre à l’occasion d’un voyage à Rome au début de l’année 1204.
Les sources de B, C et D ne sont pas explicitement connues. L’essentiel du deuxième cartulaire du chapitre est copié sur le premier cartulaire mais cet acte semble faire partie des quelques documents – regroupés à la fin du codex – qui sont copiés dans le deuxième cartulaire à partir d’une autre source (ici, probablement l’original donné par les trois juges délégués dans lequel l’acte de Luc est cité). La désignation des juges dans l’adresse de l’acte épiscopal est en effet différente entre B et C, en plus d’autres variantes mineures. L’adresse portée par C est probablement erronée, Lothaire étant bien désigné comme chanoine de Paris dans la bulle d’Innocent III déléguant le traitement du litige. Or cette adresse fautive se retrouve à l’identique dans D, qui n’a d’ailleurs aucune variante avec C en dehors de la graphie de certains mots (remplacement de certains t par des c) : on peut donc supposer que D a été copié sur C.

B corrigé de C

B corrigé de C
AdresseViris venerabilibus A. Dei gratia de Persagnia abbati et magistro H. Carnotensi archidiaconoamanquant C et magistro L. Parisiensi canonicobarchidiacono Carchidiacono,
IntitulationL. divina miseratione Ebroicensis ecclesie minister humilis,
Salutsalutem in salutis Auctore.
NotificationSciatis quod
Exposépropter molestiam corporis et alias causas ad prosequendum negocium quod vertitur inter nos ex una parte et decanum Ebroicensem et adherentes ei canonicos ex altera hac instanti die sabbati apud CarnotumcCarnoten. BCarnoten. coram vobis non possumus apparere.
DispositifPericulosum enimdautem Cautem esset nobis et molestum in tam magno et arduo negotio alii committere vices nostras, tamen, ne indignationem vestram, quod absit, incurramus, et ne velle videamur justum judicium declinare, mittimus ad vos Hosbertum latorem presencium, dilectum socium nostrum et canonicum Ebroicensem, quem in hac causa procuratorem constituimus, ratum quod hac die fecerit habituri ; et hoc ipsum per has easdem litteras parti adverse significamus.
(a) manquant C. — (b) archidiacono C. — (c) Carnoten. B. — (d) autem C.