Afficher Masquer
Passages biffés :
Sauts de pages :
Changements de mains :
Mots clés en marge
(main T) :
DistinguerIntégrer
Corrections du transcripteur :

Fermer

Accueil|Présentation du projet|Abréviations|Introductions|Texte|Index

Français|English Contacts

Volume I|Volume II|Volume III|Citer le texte et les notes| Écritures|Affichage

Pensées 135 à 139

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

Fermer

M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

Fermer

Pensées, volume I

135

{p.121} [Passage à la main M] Il n’y a point de gens [Passage à la main D] qui ayent plus besoin de ne point tomber dans le deshonneur que ceux qui se sont fait une reputation dans le monde par leur sçavoir par leur esprit ou par quelque talent, car si malgré ce qu’ils avoient en leur faveur, leurs mauvaises qualités ont percé s’ils ont fait revenir contr’eux le public qui etoit seduit il faut qu’elles soient bien grandes et que le mepris qu’ils ont obtenu leur soit bien legitimement dû puisque ce n’est qu’après avoir combattu que le peuple le leur a accordé.

- - - - -

Passage de la main D à la main M

136

On

Mouvement

a dit qu’un corps ne peut perdre entierement son mouvement puisque le partageant toujours il en reste toujours pour lui, et je trouve cela bien raisonnable, car un corps qui en rencontre un autre lui communique son mouvement comme s’il ne faisoit qu’un même corps, il en garde donc toujours a proportion de {p.122} sa masse, de plus il me semble que si un corps etoit une fois en repos il seroit impossible qu’il [ne] se meût que par l’action d’une cause infinie puisqu’il y a une distance infinie du m repos au mouvement[1].

- - - - -

Main principale D

137

Il

Peste

me semble que nous ne sommes pas en etat de en Europe de faire les observations convenables sur la peste[1] ; cette maladie qui y est transplantée ne se manifeste pas avec des simptômes naturels, elle varie plus selon la diversité des climats, sans compter que n’etant pas continuelle et se passant des siecles entiers d’intervalles on ne peut pas faire des observations continuelles[2] outre que les observateurs sont si troublés de crainte qu’ils ne sont en etat d’en faire aucune.
Mais il faudroit envoyer des observateurs bien exacts bien eclairés bien payés dans les lieux ou cette maladie est epidemique[3] et arrive tous les ans comme en Egypte et dans plusieurs endroits d’Asie {p.123} il faudroit voir quelles en sont les causes quelles saisons sont favorables ou contraires, les vents, les pluyes, la nature du climat, quels ages quels temperamens y sont les plus exposés, quels remedes

Remedes

quels preservatifs, quelles cures, quelles varietés ; avoir des observations de plusieurs lieux de plusieurs tems se servir de quelques lumieres que nous peuvent donner certains pays[4] : l’Egypte entr’autres est sujette a la peste toutes les années, et elle cesse d’abord qu’une certaine pluye qu’on apelle la goutte[5] a tombé, il faudroit examiner la nature de cette goutte et voir si avec des eolipiles[6] on ne pourroit pas produire dans les les chambres des malades une goutte artificielle comme on a imité par art tous les phenomenes de la nature. Mr Lemeri[7] ayant fait des tremblemens de terre, des bombes &c : on a trouvé des remedes dans la patrie de la verole[8] qui n’etoient point dans nos climats et on pourroit citer bien des exemples semblables.

Main principale D

138

{p.124}

Remedes

Quand on dit que la nature est si prevoyante qu’elle fait toujours trouver des remedes particuliers dans les lieux qui sont affligés de certaines maladies parce que sans cela les hommes n’y auroient pas pu subsister[1], il faut faire attention que l’on raisonne a priori quoique peut etre on feroit peut etre mieux de les raporter simplement aux differentes combinaisons : il y a de certains lieux sur la terre inhabitables d’autres qui sont habitables sans aucun inconvenient d’autres enfin qui ne seroient pas habitables a cause de certains inconveniens, s’il ne s’y etoit pas rencontré des remedes a ces inconveniens, ainsi il n’est pas je crois vrai que par une providence particuliere les remedes ayent eté etablis dans de certains lieux pour les rendre habitables[2], mais il faut dire que les remedes s’y etant trouvés, les lieux ont eté rendus habitables

- - - - -

Main principale D

139

{p.125} Sabis est un fleuve qui se jette dans le Danube selon Justin p. 232. l. 32. je ne l’ai trouvé ni dans Baudran ni Etienne de Byzance, Holstenius, Moreri, Bayle, ni Corneille[1].

- - - - -

Main principale D


136

n1.

Cf. Spicilège, nº 281. La question du mouvement des corps est au centre du Mémoire sur le principe et la nature du mouvement (OC, t. 8, p. 265-266), texte perdu rédigé en 1723 ; voir aussi la lettre de Dodart du 28 décembre 1723 (Correspondance I, p. 73-79). Il s’agit de montrer que le mouvement est essentiel à la matière, et donc qu’il n’y a pas de repos absolu. L’évocation d’une « cause infinie » renvoie à la thèse métaphysique de la création continuée, que Descartes pose au fondement de ses recherches physiques (Principes de la philosophie, II, 42-43, dans Œuvres, C. Adam et P. Tannery (éd.), Paris, J. Vrin, 1989, t. IX-2, p. 88).

137

n1.

Une violente épidémie de peste ravagea la Provence en 1720-1721 (Spicilège, nº 316). La correspondance de Montesquieu révèle son intérêt pour la maladie (OC, t. 18, p. 34 et p. 41-42), étudiée aussi à l’académie de Bordeaux (Rebecca Kingston, « La crainte despotique de Montesquieu et sa fonction politique pour un régime modéré », dans Montesquieu, la justice, la liberté, Bordeaux, Académie nationale des sciences, belles-lettres et arts de Bordeaux, 2007, p. 47-66). Cf. LP, 109 (113), p. 436, l. 14-18.

137

n2.

Sur la nécessité d’observations renouvelées pour éclaircir certains phénomènes naturels, cf. l’Essai d’observations sur l’histoire naturelle (1719 ; OC, t. 8, p. 212). La communication « éternelle » des maladies, due aux transports, et leur évolution manifestent le changement continuel sur la terre (cf. nº 86, 101, 102).

137

n3.

« Mal contagieux qui court parmi le peuple » (Furetière, 1690, art. « Épidemique »). Nous utiliserions le terme endémique, puisque l’idée est de pouvoir faire des « observations continuelles ».

137

n4.

Cette liste de variables évoque le traité qu’Hippocrate adresse au médecin itinérant, dans Des airs, des eaux, des lieux, dont Montesquieu a fait un extrait de lecture (BM Bordeaux, ms 2526/6 ; Masson, t. III, p. 712-713). La question du transport des maladies (nº 86) ou du rapport entre le remède et le climat (nº 138) manifeste une même sensibilité à une médecine des lieux.

137

n5.

Montesquieu évoquera l’Égypte, « siège principal » de la peste, à propos des lois visant à empêcher sa propagation (EL, XIV, 11). Le phénomène de la goutte est décrit dans la Nouvelle relation […] d’un voyage fait en Égypte du père Johann Michael Wansleben (Paris, Michallet, 1677, p. 48-49 – Catalogue, nº 2757, éd. de 1698 ; extrait perdu, Geographica, p. 416), mentionné dans l’Essai sur les causes qui peuvent affecter les esprits et les caractères (env. 1734-1736, OC, t. 9, p. 235) ; voir aussi l’extrait des Voyages de Bernier dans les Geographica, p. 344.

137

n6.

« Petite boule de fer ou de cuivre, ayant une queue où il y a un fort petit trou pour la charger ; on la chauffe pour raréfier l’air qui est dedans, & puis on la jette dans l’eau. Il y en entre autant qu’il faut pour remplir le vuide que laisse l’air condensé par la froideur de l’eau ; & quand cette boule est derechef mise au feu, il en sort du vent avec une impétuosité & une durée qui surprennent » (Furetière, 1690, art. « Eolipile »). Sur des observations à partir de cet appareil, imaginé par Héron d’Alexandrie (Ier siècle) pour mettre en évidence la force motrice de la vapeur d’eau, voir les Expériences de physique de Pierre Polinière (Paris, J. de Laulne, 1709, p. 234-239 – Catalogue, nº 1527, éd. de 1718).

137

n7.

Nicolas Lémery (1645-1715), pharmacien et chimiste, auteur d’un Cours de chimie (Paris, J.-B. Delespine, 1713 – Catalogue, nº 1340) et d’une Pharmacopée (Paris, L. d’Houry, 1716 – Catalogue, nº 1305).

137

n8.

L’Amérique, selon le nº 216.

138

n1.

Sur l’aménagement des lieux et sur la prévoyance de la nature, voir l’Essai d’observations sur l’histoire naturelle (1719 ; OC, t. 8, p. 219-222). Montesquieu soulignera dans L’Esprit des lois, sans référence à la Providence, comment les hommes « ont rendu la terre plus propre à être leur demeure » (XVIII, 7).

138

n2.

Cf. Spicilège, nº 298. La conclusion (« mais il faut dire que […] ») est absente du Spicilège, où Montesquieu note : « il faut que je mette en œuvre ces pensées que je n’ai pas bien digerées encore ».

139

n1.

Justin mentionne la Save (« Sabi »), rivière de Pannonie, affluent du Danube (Justini historiarum ex Trogo Pompeio Lib. XLIV. Cum notis Isaaci Vossii, Leyde, Elzevir, 1640, XXXII, 3, p. 220-221 – Catalogue, nº 2845). Le Dictionnaire géographique de Baudrand comporte deux articles « Sabis », l’un pour la Sambre, l’autre pour un fleuve de Perse (Geographia ordine litterarum disposita, Paris, S. Michalet, 1682 – Catalogue, nº 2452). Montesquieu possédait une édition du fragment du dictionnaire géographique d’Étienne de Byzance, grammairien ayant vécu de la fin du Ve siècle au début du VIe siècle apr. J.-C. (Stephani Bysantini De urbibus […], [éd. grec-latin], Leyde, [F. Haaring], 1694 – Catalogue, nº 2645), sur lequel Holstenius (Lucas Holste ou Holstein, 1596-1661) a composé des remarques (Holstenii Lucae Notae et castigiones in Stephanum Bysantinum de urbibus, Leyde, [J. Hackium], 1684 – Catalogue nº 2625). Il a consulté le Grand Dictionnaire historique ou le mélange curieux de l’histoire sacrée et profane de Moreri (Paris, J.-B. Coignard, 1704 – Catalogue, nº 2504), le Dictionnaire historique et critique de Bayle (1re éd., Rotterdam, Reinier Leers, 1697), le Dictionnaire universel géographique et historique de Thomas Corneille (Paris, J.-B. Coignard, 1708 – Catalogue, nº 2468).