M : | Montesquieu 1726/1727-1755. |
D : | Bottereau-Duval 1718-1731. |
E : | 1734-1739. |
U : | 1739. |
H : | 1741-1742. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
I : | 1743. |
L : | 1743-1744. |
O : | 1745-1747. |
P : | Damours 1748-1750. |
Q : | 1750-1751. |
R : | Saint-Marc 1751-1754. |
S : | 1754-1755. |
V : | 1754. |
JB : | Jean-Baptiste Secondat ?-1795. |
T : | écriture des manchettes 1828-1835 |
M : | Montesquieu. |
D : | Bottereau-Duval_1721-1731. |
H : | 1741-1742. |
P : | Damours_1748-1750. |
E : | 1734-1739. |
L : | 1742-1744. |
O : | 1745-1747. |
T : |
écriture des manchettes |
JB : | Jean-Baptiste_Secondat. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
E2 : | |
I : | 1743. |
R : | Saint-Marc_1751-1754. |
Q : | 1750-1751. |
S : | 1754-1755. |
V : | 1754. |
Pensées, volume III
1642 - - - - - Un docteur de l’université de Salamanque à trouvé par un calcul exact que depuis la mort d’Henry IV. jusqu’au traité des Pyrenées, les ligues, les associations de la noblesse les deliberations des parlements les differentes expeditions, les traités de paix et de guerre ne couterent que 118 minutes de reflexion a toutes les têtes francaises qu’en remontant plus haut aux regnes d’Henry III. Charles IX. François II. ils furent dans une distraction generale et s’entretuerent toujours sans y penser. Un de leur roy qui par hazard pensoit beaucoup se voiant chef d’une nation qui ne pensoit pas entreprit de la subjuguer y reusit et se mit comme il disoit hors de page[2].
- - - - - |
Passage de la main M à la main P |
1643 Je me plaignois d’une infinité de mauvaises critiques sur mon Esprit des loix[1] qui venoient de ce qu’on ne m’avoit pas entendu, je me trompois, elles venoient de ce qu’on ne vouloit pas m’entendre. Un[e] infinité de petits esprits avoit des lieux communs de morale qu’ils vouloient debiter, or pour cela il falloit ne pas m’entendre. Par exemple s’il prenoit le mot de vertu dans le sens que je luy ay donné {f.5r} on ne pouvait pas s’e[n]tendre sur la necessité des vertus chretiennes et des vertus morales dans toutes sortes de gouvernemens. De plus en ne m’entendant point ils avoient un champ libre pour faire des declamations or ce genre d’ouvrage est de tous le plus facile[2].
- - - - - |
Main principale P |
1644 Pour faire un traité sur le bonheur
Bonheur Le bonheur consiste plus dans une disposition generale de l’esprit et du coeur qui s’ouvre au bonheur que la nature de l’homme peut preter que dans la multiplicité de certains moments heureux dans la vie il consiste plus dans une certaine capacité de recevoir ces moments heureux. Il ne consiste point dans le plaisir mais dans une capacité aisée de recevoir le plaisir, dans une esperance bien fondée de le trouver quand on voudera ; dans une experiance que l’on n’a point un certain degoust general pour les choses qui font la felicité des autres {f.5v} deux choses composent le malheur moral, la nuit qui vien prl l’ennui general qui provient du degoust ou du dedain de tout, le decouragement general qui vient du sentiment de sa propre bassesse
- - - - - |
Main principale P |
1645 AngleterreUn des fils[1] du chancelier Iorck qui est avocat tres celebre en Angleterre m’a eclaerci plusieurs choses avec beaucoup de net[te]té. Il y a quatre cours de justice en Angleterre. La cour du ban du roy qui est pour les affaires crimineles, la cour des plaidoiers communs, qui est pour les affaires civiles. La cour de la chancelerie qui est pour les affaires ou il est question de moderer la rigueur de la loy, pour les affaires mobilieres, et pour les fideicomm testaments, et enfin la cour de l’echiquier qui regarde les affaires des finances, soit qu’on demande au roy, soit que le roy demande.
Les affaires sont portées à ces cours au moins pour les trois premières, lorsque les jurés les renvoient sur ce que la question n’etant pas proprement de fait à besoin d’etre jugée par le droit. Je ne sçais pas si la cour de l’echiquier {f.6r} juge par un renvoy des jurés, ni si dans ce cas ci il y à des jurés.
La cour du ban du roy a un chef de justice, et la cour des plaidoiers communs un autre chef de justice, et dans chacun de ces tribunaux il y à quatre juges en comptant je crois le chef de justice. Remarquez que la chambre des pairs, à une juridiction pour moderer la loy comme la cour de chancelerie mais elle n’a de juridiction que par les apels qui luy sont portés de la cour de chancelerie, dont les jugemens sont executés s’il n’y à point d’apel.
Le commerce s’etant etendu en Angleterre, il se forma beaucoup de pretentions sur les affaires mobilieres ces affaires furent renvoiées à la chancelerie, remarque
Remarquez encore que vêrs le regne d’Henry VIII. la cour des plaidoiers communs ne voulut pas connoitre des fideicommis [un mot biffé non déchiffré] ce mot se prend en meme acception que chez les Romains ce fut une grande sotise faite par cette cour les affaires des fideicommis furent portées à la chancelerie. Remarquez que dans ces cours on juge 1º par la loy feodale, par la loy romaine, et par les coutumes ou usages d’Angleterre, formées sur les jugemens qui ont precedé, il est inutile de dire que l’on se regle aussi sur les actes des parlemens {f.6v} mais cette source n’est pas considerable.
Les avocats
Avocats Sous le regne je crois de Charles II. on ota toutes les lois militaires et ce ne fut pas me semble une grande perte. Je remarquay a Mr Sur ce que Mr Iorck me dit qu’un etranger ne pouvoit entendre un seul mot dans milord Coock et dans Lidleton[2], je luy dis que j’avois observé que par raport aux loix feodales, et anciennes loix d’Angleterre, il ne me seroit pas dificile de les entendre, non plus que celles de toutes les autres nations parce que toutes les loix de l’Europe etant gotiques, elles avoient {f.7r} toutes la meme origine, et etoient de même nature qu’au contraire les loix et la jurisprudance moderne etoient difficiles a entendre parce que le tems et les circonstances des choses avoit changé et modifié la loy gothique dans le pays. Et que cette loy avoit pris partout une patrie, et avoit changé comme les loix politiques. Il Il en convint.
Par les actes des parlements il à èté decidé que tout fond en Angleterre etoit socagge[3] ce qui à donné une atteinte tres grande a la loy feodale, toutes les justices patrimoniales ont èté otées tout nobilité de fonds aussi, ou dependances de fonds aussi, d’un coté tout est justice royale, et de l’autre tout est roture, on vient d’oter en 1748 et 1749[4] toutes les justices seigneuriales en Ecosse, ce qui est plus conforme au gouvernement qui tient du republicain, et s’eloigne de la monarchie. Mr Yorcke Yorke m’a dit que le melieur ouvrage fait sur les loix feodales etoit Cragii jus feudale fait du temps de Jacques I. et qu’il y en avoit une belle edition nouvelle[5], que cet ouvrage etoit cler clair et lumineux.
- - - - -
|
Main principale P |
1646
{f.7v} [Passage à la main M] Mad de R… se pleignoit de quelques boutons je luy dis et que font des boutons sur un visage qui a derriere luy une si belle ame :
- - - - - |
Passage de la main P à la main M |
1642 |
n1. |
Sur ce projet d’ouvrage, voir nº 1111, 1302 (titre). Cette préface parodique est peut-être à rapprocher de l’article nº 1191, qui évoque les « calculs exacts » d’un autre docteur espagnol, Huarte, l’auteur de l’Examen des esprits pour les sciences [1re éd. en espagnol 1575], ouvrage sur la manière de cultiver les capacités intellectuelles dans l’intérêt d’un royaume (Catalogue, nº 1474 : C. Vion d’Alibray (trad.), Lyon, G. Blanc, 1668). |
1642 |
n2. |
« On dit […] d’un homme qui est devenu absolument son maître, qu’il est hors de page » (Académie, 1740, art. « Hors »). Le roi en question serait Louis XI, d’après un mot prêté à François Ier (Discours des États de France, dans Les Œuvres de Maistre Coquille, Bordeaux, La Bottière, 1703, t. I, p. 280 – Catalogue, nº 776). |
1643 |
n1. |
En 1749 paraissaient les critiques des Mémoires de Trévoux (avril), dont le président Barbot informa Montesquieu (lettre du 7 avril 1749, Masson, t. III, p. 1216), celles de la Nouvelle bibliothèque germanique (t. V, juillet-septembre, 1748, partie I [1749], p. 232-236), du financier Claude Dupin (Réflexions sur quelques parties d’un livre intitulé « De l’esprit des lois », Paris, B. Serpentin, 1749) mentionné à plusieurs reprises par Mme de Tencin, Solar et Montesquieu lui-même (lettres des 23 avril, 7 juin, 23 juillet, 27 août de l’année 1749 : Masson, t. III, p. 1228, 1239, 1251, 1253), celles de la Suite des Nouvelles ecclésiastiques (9 octobre et 16 octobre 1749). Contrairement à ce que laissent penser les propos de Montesquieu à Guasco (lettre non datée, Masson, t. III, p. 1275-1276), l’auteur ne se souciait pas seulement de la censure ecclésiastique, mais avait envisagé de répondre à certaines de ces attaques, comme le prouve le sixième carton de manuscrits inventoriés par Joseph-Cyrille de Montesquieu, répertorié comme « Matériaux contre les critiques de L’Esprit des lois » (LP, OC, t. 1, annexe II, p. lxxvii-lxxviii). |
1643 |
n2. |
Le rédacteur de la Suite des Nouvelles ecclésiastiques du 9 octobre 1749, sans tenir compte de la mise au point de Montesquieu sur la notion de vertu politique (EL, III, 5, note (a) : Derathé, t. I, p. 30), prétend comprendre de sa théorie sur le principe du gouvernement monarchique qu’« à ce compte on devroit bannir de toutes les Monarchies la Religion Chrétienne » (DEL, p. 28). Montesquieu répondit à la critique, non dans sa Défense de l’Esprit des lois, axée sur les questions théologiques, mais dans les Éclaircissements sur l’Esprit des lois, qui parurent à la suite dans le même volume en février 1750 (Genève, Barrillot et fils [Paris, Huart] ; DEL, p. 115). Dans la lettre à Guasco mentionnée dans la note précédente (Masson, t. III, p. 1276), Montesquieu parle des « déclamations » et des « fureurs » du rédacteur qu’il appelle le « Nouvelliste ecclésiastique ». |
1644 |
n1. |
Montesquieu a entamé très tôt dans son recueil une réflexion sur le bonheur (nº 30-31), sans évoquer un projet d’ouvrage. Les articles nº 1661, 1662, 1675, 2010, 2046 témoignent d’un dossier ouvert sur le thème dont les éléments ont été archivés dans le troisième volume des Pensées ; voir Philip Stewart, Dictionnaire électronique Montesquieu, art. « Bonheur » [en ligne à l’adresse suivante : http://dictionnaire-montesquieu.ens-lyon.fr/index.php?id=384]. |
1645 |
n1. |
Charles Yorke (1722-1770) était le second fils de Philip Yorke, Lord Hardwicke, lord Chancelier d’Angleterre. Élu à la Chambre des communes, il fut en contact avec Montesquieu en 1749, lui ayant transmis le discours de son père sur l’abolition des juridictions héréditaires en Écosse (voir nº 1645, note 4) ; il lui procura des livres en 1750, ainsi que son propre Discourse on the Law of Forfeiture for High Treason (Masson, III, p. 1300-1303 ; Shackleton, p. 300). Dans les années 1750-1753, il le fréquenta, ainsi que Fontenelle et l’abbé Sallier, lors de ses séjours en France (voir nº 1677). |
1645 |
n2. |
Sir Edward Coke, juriste anglais (1552-1634), représentant de la Common Law, auteur des Institutes [1628] dans lesquelles il commente le On Tenures écrit en droit français par Thomas Littleton (1422-1481), dont David Houard donnera en 1766 une édition bilingue (anc. fr.-fr. mod.) avec commentaires, sous le titre Anciennes lois des Français, conservées dans les coutumes anglaises, recueillies par Littleton (Rouen, R. Lallemant). Charles Yorke a disposé d’une copie annotée par Lord Hale du commentaire de Coke (Edward Coke, The First Part of the Institutes of the Laws of England or a Commentary upon Littleton, Philadelphie, Johnson et Warner, 1812, p. XXV). Il signale les difficultés pour un étranger à comprendre lois et mœurs anglaises dans la lettre qu’il adresse à Montesquieu en avril 1750 (Masson, t. III, p. 1301-1302). |
1645 |
n3. |
Terme issu de la coutume normande et passé dans le droit anglais : « [l]a tenure en socage est celle qui doit tout autre service que celui de chevalier », c’est-à-dire des services non militaires (souvent agricoles) ou le versement d’une rente ; « toute tenure qui n’est pas de Chevalerie est de socage » (Anciennes lois des Français, conservées dans les coutumes anglaises, recueillies par Littleton, trad. de l’anc. fr. et commentaires de David Houard, Rouen, R. Lallemant, 1766, t. I, sect. 117, p. 175, 177). Dans son commentaire, David Houard remarque que contrairement au villenage, le socage « a tous les caractères de la liberté et les privilèges de la noblesse », destiné initialement à favoriser la mise en valeur agricole des fonds détenus par des hommes libres (ibid., p. 176). Montesquieu souligne que le socage revient à ôter ce qui justifie les privilèges et prérogatives de la noblesse. |
1645 |
n4. |
Le père de Charles Yorke, Lord Hardwicke, lord Chancelier, a soutenu la réforme proposée en 1746, abolissant les juridictions héréditaires en Écosse, en réponse au soulèvement jacobite de 1745 (Reed Browning, Political and Constitutional Ideas of the Court Whigs, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 1982, p. 172-173) ; Montesquieu, par l’intermédiaire de Charles, a eu connaissance en 1749 du discours de Lord Hardwicke en faveur de cette réforme : voir la lettre de Charles Yorke à son père du 31 octobre 1749 dans Montesquieu. Mémoire de la critique, C. Volpilhac-Auger (éd.), Paris, Presses de l’Université de Paris-Sorbonne, 2003, p. 149. |
1645 |
n5. |
Thomas Cragius ou Craig de Riccarton (1538?-1608), juriste écossais, est l’auteur d’un traité des fiefs d’Angleterre et d’Écosse, le Jus feudale, paru en 1655 (Edimbourg, s.n., et Londres, Societatis Stationariorum), réédité en 1716 (Leipzig, J. F. Gleditsch et fils) et en 1732 (Edimbourg, T. et W. Ruddimann), ouvrage que Charles Yorke envoya à Montesquieu en avril 1750 (voir Masson, III, p. 1300, 1302). |