ANNALES DE CASTEL
AVERTISSEMENT SUR CE QUI REGARDE LA FAMILLE, LA VIE ET LES OUVRAGES DE L’AUTEUR
Généalogie1
§ 1L’auteur de cet ouvrage est M. l’abbé de Saint-Pierre, Charles-Irénée Castel ou de Castel, de l’Académie française, premier aumônier de Madame, belle-sœur du roi Louis XIV, abbé commendataire de Tiron, né au château de Saint-Pierre, diocèse de Coutances, le 23 février 1658, nommé Charles au baptême et Irénée à la confirmation.
§ 2La maison de Castel est d’une noblesse très ancienne et même illustre ; on voit dans l’édition des anciens titres de la Tour de Londres faite en 1704, au premier volume page 70, Hugo de Castello, qui avec huit autres grands seigneurs de France sont cautions du roi Philippe Auguste pour l’exécution du traité fait à Messine, Messanœ, avec Richard roi d’Angleterre, en 1191, et page 119 on voit Gervasius de Castello, qui avec huit autres grands seigneurs de France se rendent cautions du même roi Philippe pour l’exécution du traité fait à Geuleton avec Jean roi d’Angleterre, en 12002 .
§ 3Dans le Trésor des chartes de Paris, dans un rôle intitulé Duces, comites, barones, milites et vavassores tempore Philippi Augusti, après les ducs de Bourgogne et de Bretagne et les trente comtes, on trouve les soixante barons pairs du royaume et parmi ceux-là on trouve Dominus Castelli3 .
§ 4Dans Du Chesne, Historia Francorum, page 1036, on trouve dans une liste de chevaliers bannerets sous Philippe Auguste Girardus de Castello4 .
§ 5Dans ledit recueil des titres de la Tour de Londres, tome premier, page 651, on trouve un Johannes de Castello en 1258, ambassadeur du roi d’Angleterre vers Alphonse roi de Castille5 .
§ 6Il y a en France plusieurs maisons nobles qui portent le nom de Castel, celle-ci prouve une filiation noble plus ancienne qu’aucune des autres.
Père et mère de l’auteur6
§ 7Le père de l’auteur était le baron de Saint-Pierre, Charles Castel7 ou de Castel, grave, juste, pieux, grand bailli de Cotentin. Sa principale terre était Saint-Pierre-Église, petit bourg entre Cherbourg et La Hougue. Il mourut en 1676, laissant à ses enfants environ vingt-huit mille livres de rente, qui valaient alors par an mille marcs d’argent.
§ 8Sa mère était Madeleine Gigault de Bellefonds8 , dame de beaucoup d’esprit et de vertu, fille du marquis de Bellefonds, gouverneur de Caen et de Valognes9 . C’est elle qui est peinte par Saint-Évremond, son parent, dans ses ouvrages, dans le discours qui a pour titre Idée de la femme qui ne se trouve point10 ; elle avait un frère qui fut père du maréchal de Bellefonds, et plusieurs sœurs, la marquise de Gonneville, la marquise d’Auffreville, la marquise de Sébeville et la marquise de Villars, mère du maréchal de Villars, lequel a eu trois sœurs mariées, savoir madame la marquise de Boissieu, madame la comtesse de Choiseul et madame la marquise de Vogüé.
§ 9La mère de Madeleine Gigault de Bellefonds était Suzanne aux Épaules11 , sœur de Judith aux Épaules12 , mère de Marie de La Guiche, duchesse de Ventadour13 , aïeule de mademoiselle de Ventadour, qui a épousé le prince de Rohan, dont elle a eu le feu prince de Soubise14 , qui a laissé quatre garçons d’une d’Épinoy Melun. Cette Marie de La Guiche, duchesse de Ventadour, était aussi mère de la maréchale de Duras, qui a laissé deux garçons : l’aîné, duc, n’a laissé que deux filles15 , la princesse de Lambesc et la princesse d’Egmont, le second fils, duc de Duras16 , a des filles mariées et un fils.
Frères et sœurs de l’auteur17
§ 101. Le marquis de Saint-Pierre, Bon-Thomas Castel, frère aîné de l’auteur, a laissé un fils, Bon-Hervé Castel, capitaine des gendarmes d’Anjou ; il a une sœur mariée au feu marquis d’Auneville, seigneur du Vast, et une autre au feu marquis de Belle-Île, grand chef d’escadre et seigneur de Saint-Rémi-des-Landes, qui ont des enfants, et une à M. le marquis de Margerie Neuville près de Bayeux.
§ 112. Le feu Père de Saint-Pierre, jésuite, Bernardin de Castel, frère de l’auteur, confesseur de Madame, mort vers 1701.
§ 123. Le comte de Saint-Pierre, Louis-Hyacinthe Castel, baron de Crèvecœur-sur-Eure, premier écuyer de Son Altesse royale madame la duchesse d’Orléans, auparavant chevalier de Malte et capitaine des vaisseaux du roi, épousa à Brest en 1689 mademoiselle Françoise de Kerven d’une ancienne noblesse de basse Bretagne, dont il a eu Louis de Castel marquis de Crèvecœur, enseigne de la seconde compagnie des mousquetaires, premier écuyer de Son Altesse royale madame la duchesse d’Orléans : il a épousé damoiselle de Fargest18 , dont il a des enfants ; son frère, Charles-Gabriel de Castel, frère de Louis, est abbé d’Évron, diocèse du Mans.
§ 134. L’auteur avait encore un frère, le commandeur de Saint-Pierre, François-Antoine Castel, capitaine de vaisseau, chevalier de Malte, commandeur de la commanderie magistrale du Piéton, lieutenant général des vaisseaux de Malte, mort en 1709. C’est lui qui a fait construire et qui le premier a commandé l’escadre des vaisseaux de Malte.
§ 145. Trois sœurs religieuses et une sœur mariée au marquis de Reviers, qui a laissé trois filles, dont l’une a épousé le marquis de Malherbe de Caen, l’autre le comte de Vassy Marguerie, près de Vire, qui ont eu des enfants ; une autre avait épousé M. le marquis de Jucoville, mort sans enfants.
§ 15Le marquis de Harcourt, seigneur d’Écausseville près de Valognes, et le marquis de Manneville Le Fort, près du Pont-Audemer, sont sortis de deux filles de Castel et ont laissé des enfants ; il ne reste de mâles de la maison de Castel que ceux qui sont sortis des enfants de Charles, baron de Saint-Pierre.
Sur la vie de l’auteur
§ 16La mère de l’auteur étant morte en 1664, il fut envoyé à Rouen en 1667 avec ses deux frères cadets, Louis-Hyacinthe et Antoine. Ils firent leurs études au collège des jésuites de Rouen. Il était en logique en 1673, lorsque son père l’appela auprès de lui à Saint-Pierre pour l’instruire de l’état des affaires de la maison.
§ 17Il fit en trois ans un si grand progrès dans la connaissance des lois de sa province qu’à l’âge de 18 ans, lors de la mort de son père, il avait entre les mains dix ou douze procès à juger comme arbitre tant entre les gentilshommes qu’entre les paysans du voisinage de Saint-Pierre, et le maréchal de Bellefonds, son cousin germain, alors exilé dans ce canton-là, étant souvent arbitre entre les gentilshommes, se servait de lui pour faire des accommodements et pour lui faire rapport des différends19 .
§ 18Comme il se trouva libre après la mort de son père20 , il choisit l’état ecclésiastique et alla recommencer sa philosophie aux Jésuites à Caen où il étudia aussi en théologie, mais pour avoir plus de commodité d’étudier et de voir les plus habiles gens du royaume en chaque science, il vint demeurer à Paris vers 1680 et mena avec lui M. Varignon, prêtre de Caen, avec qui il se plaisait de disputer de physique et de théologie. Il étudia la chimie sous M. Lémery, l’anatomie sous M. Du Verney, tous deux de l’Académie des sciences, et voyait souvent le père Malebranche et les plus habiles dans les sciences naturelles.
§ 19En 1683 il fit un voyage à Saint-Pierre et passa en revenant à Paris à Sainte-Marie-du-Mont chez la duchesse de Ventadour, sa tante, à la mode de Bretagne21 . Elle lui prêta le premier tome des Dialogues des morts de M. de Fontenelle, qui venait de paraître dans le public22 ; cet ouvrage lui donna envie de faire connaissance avec l’auteur, qui demeurait à Rouen.
§ 20Le séjour que M. l’abbé de Saint-Pierre fit à Rouen pour quelques procès de famille lui donna occasion de lier amitié avec lui. Ils se voyaient tous les jours et enfin il l’engagea à venir à Paris et à y fixer son séjour, et pour se voir plus commodément, M. de Fontenelle qui logeait chez M. Corneille de l’Académie française, son oncle, près Saint-Roch23 , venait passer trois jours de la semaine chez M. l’abbé de Saint-Pierre au faubourg Saint-Jacques où il avait une petite maison de 200 livres de loyer.
§ 21Dans son séjour de Rouen il avait renouvelé connaissance avec M. l’abbé de Vertot, son camarade de collège, qui fut quelque temps abbé à Croissy, près de Marly24 ; il venait aussi passer deux ou trois jours de la semaine dans la petite maison.
§ 22M. Varignon logeait tout en haut, il y composa son livre sur la nouvelle mécanique25 ; M. l’abbé de Vertot qui y venait aussi trois jours la semaine logeait dans la chambre voisine et travaillait à son histoire des révolutions de Portugal26 ; M. l’abbé de Saint-Pierre, qui logeait au-dessous, composait des observations morales sur les différents partis que prennent les hommes pour augmenter leur bonheur ; et M. de Fontenelle, qui logeait en bas, composait ses poésies pastorales27 . Ils allaient l’après-midi continuer leurs conversations et leurs disputes au jardin du Luxembourg et profitaient ainsi de leurs critiques mutuelles.
§ 23La préférence que M. l’abbé de Saint-Pierre donna à la morale sur la physique vint de ce qu’il jugea que la connaissance de la morale pouvait beaucoup plus contribuer à rendre les hommes heureux et vertueux que la connaissance de la physique et des mathématiques ; ainsi il s’appliqua pendant plusieurs années presque uniquement à l’étude de la morale28 .
§ 24M. Varignon fut choisi trois ans après pour professeur de mathématique au collège Mazarin, il y alla demeurer29 ; M. l’abbé de Vertot alla faire son séjour en Normandie à Saint-Paër, autre cure considérable auprès de Caudebec30 ; M. de Fontenelle fut plus occupé dans son quartier ; et M. l’abbé de Saint-Pierre fut obligé d’aller à Brest après le mariage du comte de Saint-Pierre31 , et de là il passa quelques mois en Basse-Normandie à Saint-Pierre pour des affaires de famille. Ainsi au retour de Normandie il quitta sa petite maison du faubourg Saint-Jacques.
§ 25Mais pour voir plus commodément les personnes de Paris qui avaient le plus de réputation, soit pour l’esprit, soit pour les sciences, il logea durant quelques années en différents quartiers en chambre garnie, et comme il voyait rarement les amis qu’il avait laissés dans les autres quartiers tandis qu’il logeait dans un autre, madame de La Fayette, une des dames de son temps qui avait le plus d’esprit, sachant qu’il étudiait les caractères des habitants du quartier du Marais comme on étudie un livre, lui demanda un jour en plaisantant : « Quand aurez-vous donc entièrement lu votre Marais pour venir lire le faubourg Saint-Germain ? »
§ 26Après différentes réflexions qu’il fit sur les différents moyens que prennent les hommes pour augmenter leur bonheur et diminuer leurs maux, il s’aperçut que la plus grande partie du bonheur ou du malheur des hommes venait des bonnes ou des mauvaises lois. Il vit clairement que si ceux qui sont le plus utiles à la société tant par leurs grands talents que par leur vertu étaient toujours par la force des bons règlements et des bons établissements dans les plus grands emplois et plus honorés et plus respectés à proportion de leur mérite national, c’est-à-dire à proportion des avantages qu’ils procurent à leur nation, la société humaine en serait incomparablement plus heureuse. Ainsi il demeura persuadé que tant que les lois du gouvernement ne seraient pas assez sages pour tourner les désirs des hommes vers les talents et vers la vertu par des récompenses suffisantes et justement distribuées, les hommes ne pouvaient pas être fort heureux.
§ 27Ce fut cette persuasion qui le détermina à s’appliquer désormais à l’étude du gouvernement pour tâcher de découvrir les moyens de former des règlements sages et de faire faire de bons établissements, qui engagent suffisamment les hommes par leur intérêt particulier à travailler constamment et avec ardeur pour procurer l’intérêt public, et surtout il résolut de chercher les moyens les plus efficaces pour engager ceux qui gouvernent à appuyer tout ce qui pouvait contribuer à de si salutaires établissements.
§ 28Cette réflexion, qui se présentait souvent à son esprit, le persuada que la morale n’était pas la science la plus importante pour le bonheur des hommes mais que c’était la politique ou la science du gouvernement et qu’une seule loi sage pouvait rendre incomparablement plus d’hommes heureux que cent bons traités de morale.
§ 29Ainsi dans le dessein de devenir plus utile à la société, il quitta l’étude de la morale pour l’étude de la politique, comme il avait quitté l’étude de physique pour l’étude de la morale. Il s’appliqua depuis presque uniquement à l’étude de la science du gouvernement des États et il fut surpris de trouver si peu de gens qui s’appliquassent à la même étude.
§ 30Le père de Saint-Pierre, jésuite, son frère, fut nommé confesseur de Madame vers 169232 . M. l’abbé de Saint-Pierre acheta en 1693 la charge de premier aumônier de cette princesse33 .
§ 31Entre les considérations qui l’engagèrent à suivre la Cour, il y en avait deux qui étaient fort de son goût ; la première, c’est qu’il pouvait voir de plus près à Versailles les hommes qui jouaient les principaux personnages du royaume, connaître leurs talents et juger avec plus de sûreté s’ils étaient plus heureux et plus habiles à se rendre heureux que les simples particuliers qui sont sans emploi et sans grande fortune.
§ 32La seconde était qu’il pouvait connaître plus exactement et plus facilement quels étaient les principaux ressorts de la machine du gouvernement et découvrir comment on pourrait la perfectionner soit pour augmenter la gloire de celui qui gouverne, soit pour augmenter les avantages de ceux qui sont gouvernés34 .
§ 33Il voyait que Descartes, ce fameux physicien de nos jours, par des méditations assidues et opiniâtres, avait ouvert de nouvelles routes pour faire de grands progrès en peu de temps dans la physique, et de là il jugea qu’avec un semblable travail il pouvait peut-être avec ses méditations ouvrir de nouvelles routes dans la politique pour faire faire à ses successeurs philosophes politiques en peu d’années de très grands progrès dans cette science si négligée35 .
§ 34Cette vue de tâcher d’exceller en politique comme Descartes avait fait en physique et d’être encore plus utile que lui aux hommes en général et à sa patrie en particulier fut le principal motif de l’étude qu’il entreprit dès lors des différentes parties du gouvernement.
§ 35Il fut obligé d’aller passer trois ou quatre mois à Bordeaux en 1693 pour les affaires de la comtesse de Saint-Pierre, sa belle-sœur ; ce fut qu’il fit connaissance avec un homme respectable pour ses talents et pour sa vertu : c’était feu M. de Bezons, homme distingué entre les excellents intendants36 .
§ 36Il fut reçu à l’Académie française en 1695, il passa plusieurs années à la cour, où il étudiait les hommes et les affaires politiques et où il ramassait en même temps quelques matériaux pour écrire ce qui lui paraissait le plus digne d’attention dans les événements de son temps.
§ 37Il fut nommé à l’abbaye de Tiron vers 170337 . Il alla à Valenciennes, à Mons, à Bruxelles en 1705 pour faire les baux de la commanderie du Piéton pour son frère le commandeur. Il fit là un projet de l’histoire de Malte et engagea dans la suite son ami l’abbé de Vertot à entreprendre cet ouvrage38 .
§ 38En 1707 il alla à Saint-Pierre-Église pour des affaires de famille, ce fut là qu’il composa deux ouvrages, l’un sur l’importance et les moyens de rendre les chemins aussi commodes en hiver qu’en été, l’autre sur la première ébauche de son grand ouvrage intitulé Projet pour rendre la paix perpétuelle en Europe39 .
§ 39Il vendit sa charge en 1713 pour avoir plus de loisir de méditer et de composer, et conserva son logement au Palais-Royal. Il allait de temps en temps passer l’été dans une terre de Normandie qui appartenait au comte de Saint-Pierre40 , nommée Crèvecœur-sur-Eure, à vingt lieues de Paris. Il y a composé divers ouvrages de politique et divers morceaux de ses Annales41 ; il fit imprimer en 1717 son 3e tome in-12 du Projet de paix perpétuelle42 .
§ 40Pour avoir la matinée plus longue, qui est le temps le plus propre à composer, il se couchait ordinairement à huit heures et se levait à quatre ; il ne travaillait point l’après-dîner. Il mangeait du pain et du beurre le matin, sur les sept heures, et buvait presque une chopine de vin et deux pintes d’eau. Ensuite il ne but que de l’eau le matin à son déjeuner : il attribuait à ce régime l’exemption des maladies douloureuses de gravelle et de goutte, et croyait pouvoir se guérir de la plupart des maladies en mangeant très peu et buvant beaucoup d’eau chaude quand il se sentait indisposé.
§ 41La misère excessive où il avait vu les paysans de la campagne, causée par la disproportion de la taille arbitraire, lui fit beaucoup de peine ; il fit un mémoire sur les moyens d’y remédier et entreprit même un voyage pour voir le succès de l’établissement que M. Renaud, de Chateautiers et M. de Creil43 , intendant de La Rochelle, faisaient de la dîme royale dans l’intendance de La Rochelle en 171844 . Il passa environ trois mois en ce pays-là et en apporta les matériaux d’un ouvrage sur cette matière, il le fit imprimer sous le titre de Projet de taille tarifée45 .
§ 42Il se plaisait fort aux conférences des personnes habiles et ce n’était que faute de pareilles conférences qu’il jouait souvent l’après-dîner au piquet ou à l’hombre ou à quadrille, mais à très petit jeu.
§ 43Ses mœurs étaient douces, égales et pleines d’indulgence ; il blâmait rarement, il excusait souvent et louait volontiers ce qui était louable. Patient, simple sans faste, aimant la bonne gloire plus que la fortune, et le bien public plus que la gloire, il disait : Je m’occupe en homme le matin, je m’amuse souvent avec les grands enfants l’après-dîner faute de conférer avec des hommes ; il appelait les femmes et le commun des jeunes gens de grands enfants.
§ 44Il était toujours occupé, mais c’étaient des occupations libres et de son choix. Il était si docile sur les critiques que l’on faisait sur ses ouvrages que je lui ai ouï dire que de quarante critiques qu’un procureur de parlement, homme d’esprit, fit sur les deux premiers tomes de son Projet de paix perpétuelle il en avait changé 38. Il se vantait volontiers de sa docilité et disait qu’il n’avait jamais relu une page de ses ouvrages sans y changer quelque chose. Il n’avait proprement de passion et d’ambition que de travailler avec succès pour l’utilité publique, et il a fini sa vie en travaillant tous les jours à rendre ses ouvrages plus utiles. Cette grande docilité lui faisait dire qu’il n’avait guère que des opinions provisionnelles, qu’il gardait en attendant qu’on lui eût démontré le contraire.
Ouvrages de M. l’abbé de Saint-Pierre qui sont venus à ma connaissance
§ 45Mémoire pour rendre les chemins aussi commodes en hiver qu’en été46 ; il composa cet ouvrage à Saint-Pierre-Église en 1707 : deux heures de lecture47 .
§ 46Il y composa en 1708 et 1709 la première ébauche de son Projet pour rendre la paix perpétuelle. Il est en trois tomes in-12 : trente-six heures de lecture ; le dernier tome imprimé en 1717 chez Deville à Lyon sous le nom d’Utrecht48 .
§ 47Il a depuis composé un abrégé de cet ouvrage en faveur des lecteurs plus instruits des intérêts des princes, qui est six fois plus court que le grand ouvrage et écrit avec plus de force et d’évidence : six heures de lecture ; imprimé à Rotterdam chez Beman49 .
§ 48Mémoire pour extirper le duel50 ; on trouva ce mémoire dans la cassette du feu roi Louis XIV, il se proposait apparemment d’en faire usage quand il mourut en 1715 le premier septembre : une heure de lecture.
§ 49Projet de taille tarifée, in-4o, chez Saugrain51 : douze heures de lecture.
§ 50Abrégé du même projet52 : six heures de lecture.
§ 51Projet pour perfectionner le gouvernement des États53 ; c’est celui qu’il estimait le plus de ses ouvrages après le Projet de paix perpétuelle : dix heures de lecture.
§ 52Projet pour mettre plus en œuvre au profit de la société le plaisir que sent l’homme de la distinction entre ses pareils54 : quatre ou cinq heures de lecture.
§ 53Projet pour perfectionner la Compagnie des Indes de France55 : deux heures de lecture.
§ 54Projet pour rendre les effets royaux plus mobiles et plus conversibles56 : une demi-heure.
§ 55Projet pour imiter en France ce qui se pratique en Angleterre sur les emprunts de l’État57 : demi-heure.
§ 56Projet pour établir des banques provinciales58 : une heure.
§ 57Projet pour diminuer les sources des procès en perfectionnant le droit français, in-12, chez Cavelier à Paris, 1725 : six ou sept heures de lecture59 .
§ 58L’histoire d’une fausse apparition, composée vers 1708 : un quart d’heure60 .
§ 59Projet pour rendre les sermons plus utiles61 : deux heures de lecture.
§ 60Projet pour rendre les spectacles plus utiles : une ou deux heures62 .
§ 61Projet pour perfectionner la médecine63 : deux heures.
§ 62Projet pour extirper les corsaires de Barbarie64 : une demi-heure.
§ 63Discours pour montrer que l’établissement du mahométisme n’a rien de miraculeux65 : une heure.
§ 64Projet pour perfectionner l’orthographe imprimée66 : six heures de lecture.
§ 65Projet pour perfectionner l’éducation et autres divers ouvrages, trois volumes in-12, deux tomes, imprimés chez Briasson, 172867 : 36 heures de lecture.
§ 66Fragments de morale : environ cinq ou six heures de lecture68 .
§ 67Fragments de politique sur le ministère général et sur les trois ministères particuliers, savoir sur le ministère intérieur du royaume, sur le ministère des Finances et sur le ministère des Affaires avec les étrangers tant pour les négociations que pour la guerre de terre et de mer69 : neuf heures de lecture.
§ 68Discours en faveur du mariage des prêtres70 : une heure.
§ 69Discours en faveur du silence dans les nouvelles disputes entre théologiens71 : une heure de lecture.
§ 70Projet pour rendre les pensions plus utiles72 : une heure.
§ 71Projet pour éviter la famine73 : une heure.
§ 72Projet en faveur des pauvres et des hôpitaux74 : quatre heures.
§ 73Discours sur la beauté des ouvrages d’esprit75 : une heure.
§ 74Dialogue contre le mahométisme76 : quinze heures de lecture.
§ 75Annales de Castel depuis 1658 jusqu’en 173077 : douze heures de lecture.