M : | Montesquieu 1726/1727-1755. |
D : | Bottereau-Duval 1718-1731. |
E : | 1734-1739. |
U : | 1739. |
H : | 1741-1742. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
I : | 1743. |
L : | 1743-1744. |
O : | 1745-1747. |
P : | Damours 1748-1750. |
Q : | 1750-1751. |
R : | Saint-Marc 1751-1754. |
S : | 1754-1755. |
V : | 1754. |
JB : | Jean-Baptiste Secondat ?-1795. |
T : | écriture des manchettes 1828-1835 |
M : | Montesquieu. |
D : | Bottereau-Duval_1721-1731. |
H : | 1741-1742. |
P : | Damours_1748-1750. |
E : | 1734-1739. |
L : | 1742-1744. |
O : | 1745-1747. |
T : |
écriture des manchettes |
JB : | Jean-Baptiste_Secondat. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
E2 : | |
I : | 1743. |
R : | Saint-Marc_1751-1754. |
Pensées, volume I
201 Les
Mépriser - - - - - |
Main principale D |
202 La
Metaphisique. Combien est séduisante - - - - - |
Main principale D |
203 Je suis plus touché quand je vois une belle peinture de Raphael qui me represente {p.197} une femme nuë dans le bain que si je voyois Venus sortir de l’onde
Peinture Aloïsia - - - - - |
Main principale D |
204
{p.198}
Constantin - - - - - |
Main principale D |
205 Mariages † Il y en a les Tartares et d’autres peuples. Les Huns &c J’ai mieux traité [ce] sujet dans mes loix. Cependant a considerer ces mariages en eux mêmes ils ne sont pas moins licites que les autres, car ils ne sont point contraires au droit naturel[2] comme le peché d’Onam[3] {p.199} et celui des villes qui perirent par les flames[4], ils ne le sont pas non plus de leur nature au droit civil et politique comme l’incendie le vol et le meurtre, ils ne repugnent même au droit divin que dans le sens qu’il les deffend et non pas par eux mêmes comme l’impieté et le blaspheme, de maniere que tout ce que l’on en peut dire c’est qu’ils sont deffendus parce qu’ils sont deffendus.
Il paroit que cette prohibition est bien ancienne et même qu’elle l’est autant qu’elle peut l’etre, c’est a dire qu’elle vient des premiers patriarches et qu’elle a echapé a notre inconstance naturelle.
Ceci paroit en ce que si ces mariages furent autorisés chés quelques uns des premiers peuples ce ne fut que par l’abolition de l’ancienne coutume parce que l’on voit le mariage des seurs introduit par Cambise celui des meres avec leurs enfans par Semiramis[5].
Or a considerer les meurs des premiers tems on trouvera facilement les raisons d’une repugnance qui a passé depuis en force de loi. {p.200} Il n’y avoit dans ces premiers ages d’autre autorité que celle des peres. C’etoit la plenitude des puissances, pere, magistrat, monarque signifioient une même chose.
On ne trouve pas que dans les premiers tems les hommes exerçassent sur leurs femmes le même empire que sur leurs enfans, au contraire les premieres alliances nous donnent l’idée d’une parfaite egalité et d’une union aussi douce que naturelle, ce n’est qu’avec les empires despotiques que c’est[6] etabli cet esclavage des femmes, les princes toujours injustes ont commencé par abuser de ce sexe et ont trouvé des sujets tout disposés a les imiter ; dans les pays de liberté on n’a jamais vû ces disproportions.
On voit bien qu’une difference pareille a du faire naitre de la repugnance pour les mariages entre parens, comment une fille se seroit elle mariée avec son pere {p.201} comme fille elle lui auroit du un respect sans bornes, comme femme il y auroit eu entr’eux de l’egalité, ces deux qualités auroient donc eté incompatibles[7].
Cette repugnance une fois etablie elle se repandit bien tôt sur les mariages des freres et des seurs, car dés que les premiers inspirerent de l’horreur a cause de la proximité du sang, il est clair qu’une moindre proximité devoit donner moins d’horreur mais devoit en donner toujours.
Ceci etant une fois gravé dans l’esprit des hommes Dieu a voulu s’y conformer et il en a fait un point fondamental de sa loi.
Car lors que Dieu a donné des loix aux hommes, il n’a eu qu’une vuë generale qui etoit d’avoir un peuple fidelle, source naturelle de tous les preceptes.
De ces preceptes il y en a de deux sortes les uns dans le raport que les hommes ont entr’eux que j’apelleroi preceptes moraux, les autres dans le raport qu’ils ont avec lui {p.202} que j’apelleroi preceptes sacrés.
II y a encor deux sortes de preceptes moraux, les uns qui ont du raport a la conservation de la societé comme ils l’ont presque tous, les autres qui ne sont fondés que sur la facilité de l’execution, on peut mettre de ce nombre la deffense du mariage entre parens.
Il y a de même deux sortes de preceptes sacrés, les uns sont entierement fondés sur une raison eternelle comme ceux d’aimer Dieu et de l’adorer, les autres sont purement arbitraires et sont plutôt un signe de la religion que la religion même, et ce sont les ceremoniels.
Le fondement de la religion est qu’on aime Dieu et qu’on l’adore, et les ceremonies ne sont faites que pour exprimer ce sentiment
Cérémonies religieuses Mais il faut qu’elles signifient ce qu’elles doivent signifier, et Dieu rejette celles qui ne peuvent pas signifier une veritable adoration et qui sont mauvaises {p.203} comme signes parce qu’elles le sont dans leur realité ; telles etoient celles qui le faisoient auteur des plus înfames prostitutions[8].
- - - - - |
Main principale D |
203 |
n1. |
Le nº 203, transcrit par le secrétaire D, fait partie des fragments relatifs au beau, au goût et à la critique, antérieurs aux voyages de Montesquieu, traces d’un dossier ouvert et repris à son retour, qui aboutira à l’Essai sur le goût (OC, t. 9, introduction, p. 469) ; la visite au palais Farnèse et au Vatican confirmera l’admiration de Montesquieu pour Raphaël (Voyages, p. 265-269 ; 286-287). |
203 |
n2. |
Ouvrage érotique de Nicolas Chorier (1612-1692) publié d’abord en latin (Joannis Meursii Elegantiæ latini sermonis. Aloisiæ Sigeæ Toletanæ : satiræ sotadicæ de arcanis amoris et Veneris [s. l. n. d.]), traduit en français par Jean Nicolas sous le titre : Aloysia, ou entretiens académiques des dames (s. l. n. d. [Hollande, 1680]). |
203 |
n3. |
Le rôle des idées accessoires dans le plaisir esthétique est un thème présent dans la Logique de Port-Royal et dans plusieurs textes de Nicole : voir Céline Spector, « L’Essai sur le goût de Montesquieu : une esthétique paradoxale », CM, nº 9, 2005, Montesquieu, œuvre ouverte ? (1748-1755), p. 205-214. |
204 |
n1. |
En 318 puis en 333, Constantin reconnaît officiellement en matière civile les jugements rendus par l’autorité ecclésiastique, jusque-là ignorés par l’État romain. Cf. EL, XXIII, 21 : Derathé, t. II, p. 121. |
205 |
n1. |
La note de la main L (1743-1744) donne une précision contenue dans L’Esprit des lois : les Tartares pouvaient épouser leurs filles (EL, XXVI, 14 : Derathé, t. II, p. 181 ; livre absent du manuscrit et non datable [De l’esprit des loix (manuscrits), I, OC, t. 3, p. lxxi]), selon l’Histoire généalogique des Tatars (Leyde, A. Kallewier, 1726 – Catalogue, nº 3125 ; Geographica, p. 301-302, passage de l’extrait transcrit par le secrétaire E), traduite du manuscrit d’Abu’l Ghazi Bahadur, khan de Khiva. |
205 |
n2. |
L’Esprit des lois, s’appuyant sur l’universalité de la prohibition de l’inceste, la considérera en revanche comme naturelle, car justifiée par les devoirs respectifs des enfants et des parents, même si elle est étendue et appliquée par des lois civiles, et transgressée parfois par des lois religieuses (XXVI, 14). |
205 |
n3. |
Onân (Genèse, XXXVIII, 9-10). |
205 |
n4. |
Sodome et Gomorrhe. |
205 |
n5. |
Hérodote rapporte le cas de Cambyse II, roi de Perse (?-522 av. J.-C.) qui épousa deux de ses sœurs (III, 31). Sémiramis, reine mythique des royaumes orientaux (Assyrie et Babylonie), passe pour avoir autorisé l’inceste ; cf. LP, 65 (67), p. 307-308, l. 30-34 ; EL, XXVI, 14 : Derathé, t. II, p. 183. |
205 |
n6. |
Lire : s’est. |
205 |
n7. |
Voir nº 377. |
205 |
n8. |
Cf. EL, XXVI, 14 : Derathé, t. II, p. 183. |