Chapitre 40

[1491/vue 25] Capitulum XL1caput 38 1536.

Gardus [le gardon1On est tenté de rapprocher ce gardus ou gardo du gardon (Rutilus rutilus Linné, 1758), à la fois parce que les deux noms sont très proches et parce que tous deux ont les yeux rouges. Le problème est que l’origine du mot « gardon » est inconnue : peut-être vient-il du verbe « garder », ou d’un tardif carpitum. Sa chair est considérée comme médiocre.], gladius [« le poisson-épée » : l’espadon ; l’œstre du thon2Il y a confusion, dans tout le chapitre, entre deux animaux appelés gladius : un poisson de grande taille, l’espadon (Xiphias gladius Linné, 1758), et un parasite de petite taille qui inflige aux gros poissons de cuisantes douleurs. D’Arcy Thompson 1947, 88, suivi par De Saint-Denis 1955, 114, précise que ces parasites sont, pour le thon, la Brachiella thynni Cuvier, 1830, et, pour l’espadon, la Pennatula filosa Linné, 1758. Ces parasites sont appelés couramment œstre du thon ou taon marin. Pour le gladius, « espadon », voir De Saint-Denis 1947, 41.] et glaucus [« le glauque » : le requin bleu ?3De Saint-Denis 1947, 42-43, avait établi que le glaucus était un poisson de haute mer, probablement une sorte de squale appelé communément requin bleu ou peau bleue (Prionace glauco Linné, 1758). D’Arcy Thompson 1947, 48, est beaucoup plus prudent et écrit que ce poisson, quoique fréquemment mentionné, est impossible à identifier : si certaines indications concernent visiblement le requin bleu, d’autres indices, comme les nombreux appendices signalés par Aristote (Arist. HA 508 b 20) interdisent de faire du glaucus un sélacien. De Saint-Denis 1966b, 231, revient cependant sur l’identification de l’animal et, s’appuyant sur Opp. hal. I, 747, confirme l’hypothèse qu’il avait précédemment énoncée.] [+][VB 17, 55 De gardone et gladio et glauco [-]][+]

Gardus, gladius et glaucus [+][VB 17, 55 De gardone et gladio et glauco [-]][+]

Renvois internes : Gladius : cf. Araneus, ch. 4 ; Ziphius, ch. 104 ; Zyfius, ch. 106.

Lieux parallèles : Gladius dans TC, De gladio maris monstro (6, 27) ; AM, [Gladius] (24, 60 (35)).

poisson

[1] [] VB 17, 55, 1L’auteur. [] VB 17, 55, 1Le gardon est un poisson de rivière dont la chair est exquise. Il ressemble à la vandoise4La vandoise (Leuciscus leuciscus Linné, 1758) est un cyprinidé commun dans la plupart des rivières françaises ; elle vit dans les cours d’eau rapides à fond sablonneux ou graveleux et mesure de 15 à 30 cm. Elle ressemble beaucoup au gardon, sauf par la couleur des yeux et une morphologie plus élancée., mais s’en distingue par ses yeux, qui sont de couleur rouge. L’un et l’autre, cependant, sont de petite taille.

[1] [] VB 17, 55, 1Actor. [] VB 17, 55, 1Gardo2gardus 1536. piscis est fluvialis gratissimi saporis, vendesiae3dendesiae VBd. similis, sed per ruborem oculorum ab ea discernitur. Uterque autem mediocris quantitatis4quantitas 1491 Prüss1. est.

[2] [] VB 17, 55, 2Isidore. [] Isid. orig. 12, 6, 15Le gladius [l’espadon] tire son nom du fait qu’il possède un rostre pointu, grâce auquel il fait sombrer les navires dont il a percé la coque.

[2] [] VB 17, 55, 2Isidorus. [] Isid. orig. 12, 6, 15Gladius dicitur eo quod rostro mucronato sit : ob hoc naues perfossas mergit.Gladius dictus est eo quod rostro mucronato sit, et ob hoc naves perfossas mergit.

[3] [] VB 17, 55, 3Aristote. [] Arist. HA 602 a 28-34 MSL’hastarios – ou hastaros –, c’est-à-dire le gladius marinus [l’œstre du thon], ressemble au scorpion et il a la taille d’une araignée. Il inflige aux poissons une douleur vive, et c’est pour cette raison qu’ils sautent souvent. En effet c’est la douleur qui fait bondir le dauphin, parce qu’il est piqué sous la nageoire par le dard de cet animal qu’on appelle gladius [œstre du thon].

[3] [] VB 17, 55, 3Aristoteles. [] Arist. HA 602 a 28-34 MSSunt boni aput ascensionem Canis. Et in illo tempore inveniebatur in suis alis quiddam simile vermi, et dicitur ostaroz, et est simile scorpioni et equalis aranee, et inducit eis dolorem magnum et propter hoc salit multotiens, sicut salit delfin, propter dolorem.Hastarios5Le mot grec pour désigner ce parasite est οἶστρος, transcrit ostaroz par Michel Scot et hastar(i)os dans l’Hortus sanitatis., alias6hastarios alias : hastaleos alias VB2 hastarios alias non hab. VBd. hastaros7harastos 1536., id est gladius marinus, est similis scorpioni et aequalis araneae. Et inducit magnum dolorem piscibus ideoque saliunt multotiens. Nam et delphinus propter dolorem salit, quia sub pinna pungitur ejus aculeo qui gladius vocatur.

Propriétés et indications

Operationes

[4] [] VB 17, 55, 4A. Pline, livre 9. [] Plin. nat. 9, 54Il existe un petit animal qui ressemble au scorpion et qui a la taille d’une araignée ; avec son aiguillon, il se fixe sous la nageoire du thon et du poisson appelé gladius [espadon] qui dépasse le dauphin d’une tête5La leçon cerebro, « tête », a ici un sens, et nous la maintenons. Mais il s’agit visiblement d’une erreur de l’auteur de l’Hortus sanitatis sur l’adverbe crebro, « fréquemment », présent chez Pline, et conservé par Vincent de Beauvais., et leur inflige une douleur si grande qu’ils sautent souvent dans les navires.

[4] [] VB 17, 55, 4A. Plinius libro IX8X Prüss1.. [] Plin. nat. 9, 54Animal est paruom scorpionis effigie, aranei magnitudine. Hoc se et thynno et ei qui gladius uocatur, crebro delphini magnitudinem excedenti, sub pinna adfigit aculeo tantoque infestat dolore ut in naues saepenumero exiliant.Est parvum animal scorpionis effigie, aranei9araneae Prüss1. magnitudine ; hoc10haec Prüss1 hic VBd. se et thinno11thynno VB2 thunnae VBd. et ei qui vocatur gladius, cerebro12crebro VB ex Plin. delphini magnitudinem excedens13excedenti 1536 VB ex Plin., sub pinno14pinna 1536 VBd. aculeo affigit tantoque dolore infestat ut naves15ante naves add. in 1536.16La préposition in, qui introduit logiquement naves, n’est pas présente dans les manuscrits de Pline. C’est une correction introduite par Barbaro, Castigationes, 1492 (cité d’après la note d’apparat de De Saint-Denis 1955 à Plin. nat. 9, 54), et l’édition de 1536 a logiquement suppléé in devant naves. saepenumero exiliant17Le détail relatif aux navires, présent dans le texte d’Aristote (Arist. HA 602 a 28-34), a été conservé chez Pline mais a disparu dans la traduction de Michel Scot (citée en note de sources)..

[5] [] VB 17, 55, 5B. Isidore. [] Isid. orig. 12, 6, 28Le glaucus tire son nom de sa couleur, car il est blanc. En grec, en effet, « blanc » se dit glaucos6Notons au passage qu’il y a une erreur sur le grec, γλαυκός, ne signifiant pas « blanc », mais « gris-vert ».. Ce poisson se montre rarement en été, à moins que le temps ne soit couvert7Même observation chez Ovide (Ov. hal. 117) : ac nunquam aestiuo conspectus sidere glaucus, « et le bleu qui ne se montre jamais lors de la canicule » (De Saint-Denis 1975, 37)..

[5] [] VB 17, 55, 5B. Isidorus. [] Isid. orig. 12, 6, 28Glaucus a colore dictus, quod albus sit ; Graeci enim album γλαυκὸν dicunt. Hic aestate raro apparet, nisi tantum in nubilo.Glaucus a colore dictus est, eo quod sit albus. Graeci enim album glaucon dicunt. Hic aestate raro apparet, nisi18post nisi hab. tantum VB ex Isid. in nubilo.

[6] [] VB 17, 55, 6C. Pline, même référence que ci-dessus. [] Plin. nat. 9, 58Certains poissons en effet, qui ne supportent pas la chaleur de l’été, restent cachés durant soixante jours, au plus fort de la canicule, comme le glaucus ou l’asellus8L’asellus est un poisson dont l’identification reste incertaine car les indications fournies par les textes anciens sont contradictoires et concernent des poissons très différents (pour les détails, voir De Saint-Denis 1947, 10-11)..

[6] [] VB 17, 55, 6C. Plinius ubi supra. [] Plin. nat. 9, 58Quidam rursus aestus inpatientia mediis feruoribus sexagenis diebus latent, ut glaucus, aselli, auratae.Quidam enim pisces aestate impatientes sexagenis diebus mediis latent fervoribus, ut glaucus et azellus19ascellus VB..

[7] [] VB 17, 55, 7D. Aristote. [] Arist. HA 599 b 35-36 MSEt en effet certains poissons passent l’été dans des trous, par exemple le glaucus, qui y reste pendant soixante jours ; et on le pêche après le lever du Chien.

[7] [] VB 17, 55, 7D. Aristoteles. [] Arist. HA 599 b 35-36 MSEt quidam piscis manet in cavernis in estate, sicut glaucus, quoniam ipse latet in estate quasi per sexaginta dies.Quidam etenim pisces in cavernis manent in aestate, sicut glaucus, per sexaginta2040 VBd. dies ac deprehenditur post ascensionem canis.

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1On est tenté de rapprocher ce gardus ou gardo du gardon (Rutilus rutilus Linné, 1758), à la fois parce que les deux noms sont très proches et parce que tous deux ont les yeux rouges. Le problème est que l’origine du mot « gardon » est inconnue : peut-être vient-il du verbe « garder », ou d’un tardif carpitum. Sa chair est considérée comme médiocre.

2Il y a confusion, dans tout le chapitre, entre deux animaux appelés gladius : un poisson de grande taille, l’espadon (Xiphias gladius Linné, 1758), et un parasite de petite taille qui inflige aux gros poissons de cuisantes douleurs. D’Arcy Thompson 1947, 88, suivi par De Saint-Denis 1955, 114, précise que ces parasites sont, pour le thon, la Brachiella thynni Cuvier, 1830, et, pour l’espadon, la Pennatula filosa Linné, 1758. Ces parasites sont appelés couramment œstre du thon ou taon marin. Pour le gladius, « espadon », voir De Saint-Denis 1947, 41.

3De Saint-Denis 1947, 42-43, avait établi que le glaucus était un poisson de haute mer, probablement une sorte de squale appelé communément requin bleu ou peau bleue (Prionace glauco Linné, 1758). D’Arcy Thompson 1947, 48, est beaucoup plus prudent et écrit que ce poisson, quoique fréquemment mentionné, est impossible à identifier : si certaines indications concernent visiblement le requin bleu, d’autres indices, comme les nombreux appendices signalés par Aristote (Arist. HA 508 b 20) interdisent de faire du glaucus un sélacien. De Saint-Denis 1966b, 231, revient cependant sur l’identification de l’animal et, s’appuyant sur Opp. hal. I, 747, confirme l’hypothèse qu’il avait précédemment énoncée.

4La vandoise (Leuciscus leuciscus Linné, 1758) est un cyprinidé commun dans la plupart des rivières françaises ; elle vit dans les cours d’eau rapides à fond sablonneux ou graveleux et mesure de 15 à 30 cm. Elle ressemble beaucoup au gardon, sauf par la couleur des yeux et une morphologie plus élancée.

5La leçon cerebro, « tête », a ici un sens, et nous la maintenons. Mais il s’agit visiblement d’une erreur de l’auteur de l’Hortus sanitatis sur l’adverbe crebro, « fréquemment », présent chez Pline, et conservé par Vincent de Beauvais.

6Notons au passage qu’il y a une erreur sur le grec, γλαυκός, ne signifiant pas « blanc », mais « gris-vert ».

7Même observation chez Ovide (Ov. hal. 117) : ac nunquam aestiuo conspectus sidere glaucus, « et le bleu qui ne se montre jamais lors de la canicule » (De Saint-Denis 1975, 37).

8L’asellus est un poisson dont l’identification reste incertaine car les indications fournies par les textes anciens sont contradictoires et concernent des poissons très différents (pour les détails, voir De Saint-Denis 1947, 10-11).

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1caput 38 1536.

2gardus 1536.

3dendesiae VBd.

4quantitas 1491 Prüss1.

5Le mot grec pour désigner ce parasite est οἶστρος, transcrit ostaroz par Michel Scot et hastar(i)os dans l’Hortus sanitatis.

6hastarios alias : hastaleos alias VB2 hastarios alias non hab. VBd.

7harastos 1536.

8X Prüss1.

9araneae Prüss1.

10haec Prüss1 hic VBd.

11thynno VB2 thunnae VBd.

12crebro VB ex Plin.

13excedenti 1536 VB ex Plin.

14pinna 1536 VBd.

15ante naves add. in 1536.

16La préposition in, qui introduit logiquement naves, n’est pas présente dans les manuscrits de Pline. C’est une correction introduite par Barbaro, Castigationes, 1492 (cité d’après la note d’apparat de De Saint-Denis 1955 à Plin. nat. 9, 54), et l’édition de 1536 a logiquement suppléé in devant naves.

17Le détail relatif aux navires, présent dans le texte d’Aristote (Arist. HA 602 a 28-34), a été conservé chez Pline mais a disparu dans la traduction de Michel Scot (citée en note de sources).

18post nisi hab. tantum VB ex Isid.

19ascellus VB.

2040 VBd.

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