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Volume I|Volume II|Volume III|Citer le texte et les notes| Écritures|Affichage

Pensées 1250 à 1254

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

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Pensées, volume II

1250

Les Francs s’incorporerent d’abord avec les nations vaincües non les Saxons ni les Bretons et les Gots pendant trois cens ans qu’ils regnerent en Espagne[1] ne contracterent de mariages ni ne se meslerent avec les Espagnols[2] * de là je tire l’origine de leur decadence et de la superiorite des Francs.

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Main principale E

1251

Des serments.

Les serments

Ce sont des morceaux de mon projet du Traité sur les devoirs[1]

tiennent lieu du gage que l’on est naturellement porté à donner pour la promesse, car on a toujours eû besoin de se procurer la confiance des autres

Sermens

 : ainsi on a fait souvent les conventions des autres suivantes : si je ne fais pas ce que je vous promets je veux perdre le gage que je vous mets {f.104r} entre les mains : si je ne fais pas ce que je promets je veux que mon ami s’en offense et soit contraint de vous reparer le tort que je vous aurai fait ; si je ne fais pas ce que je vous promets, je me soumets au plus grand des malheurs, c’est à dire, a la vengeance de Dieu, et dans ce cas si je n’y crois pas je vous donne un gage faux et je vous trompe de deux manieres ; car vous n’avés ni la chose que je vous ai promis, ni le gage que vous croyés avoir.
Ceux qui disent que les sermens n’ajoutent rien a la promesse se trompent fort : car votre promesse ne vous lie que parce qu’elle m’engage à vous croire. Le lien augmente donc avec le motif de confiance : j’ai compté sur ce que vous me disiés non seulement parce que vous le disiés, mais aussi {f.104v} parce que j’ai cru que vous aviés de la relligion et que vous ne m’avés pas donné sujet de penser que vous êtiés un athée.
S’il est faux que le serment soit un nouveau lien il est faux aussi que la parole soit un lien, car la parole ne lie que par le degre de credibilite qu’elle donne à celui a qui on l’a donnée.

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Main principale E

1252

Du gouvernement d’Angleterre.

Les Anglois peuvent demander sur la question s’il est permis de resister à la tyrannie

Gouvernement Anglois

, est il plus utile au genre humain que l’opinion de l’obeissance aveugle soit etablie que celle qui borne la puissance lorsqu’elle devient destructive[1].
Valoit il mieux que des villes florissantes fussent {f.105r} baignées dans le sang que si Pisistrate avoit êté exilé, Denis chassé, Phalaris depoüillé de la puissance.
Suposons pour un moment qu’un gouvernement cruel et destructeur se trouvât etabli dans tout l’univers et qu’il ne subsistât pas par la force des tyrans mais par une certaine credulité et superstition populaire, si quelqu’un venoit desabuser les hommes de cette superstition et leur aprendre des loix invariables et fondamentales ne seroit il pas proprement le bienfaiteur du genre humain et quel heros à plus juste titre meriteroit des autels.
Il n’y a pas de bon sens

Autorité de la loi

de vouloir que l’autorité du prince soit sacrée et que celle de la loi ne le soit pas.
La guerre civile

Guerre civile

se fait lorsque les sujets resistent au prince : la guerre civile se fait {f.105v} lorsque le prince fait violence a ses sujets, l’un et l’autre est une violence exterieure.
Mais, dira t on, on ne dispute pas le droit des peuples

Tyrannie se perpetue

mais les malheurs de la guerre civile sont si grands qu’il est plus utile de ne l’exercer jamais ; comment peut on dire cela ? Les princes sont mortels la republique est eternelle ; leur empire est passager, l’obeissance de la rep. ne finit point : il n’y a donc point de mal plus grand et qui ait des suittes si funestes que la tolerance d’une tyrannie qui la perpetuent dans l’avenir.

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Main principale E

1253

Ce qui suit jusques a la page 134[1] sont des morceaux qui ont reste de ce que j’ay fait sur les devoirs j’en ay comme fait une dissertation comencement que j’ay donné a l’academie de Bordeaux pour une dissertation come je ne continueray pas selon toutes les aparances je croy qu’il faudra la rompre et la joindre icy[2]
De l’amitié De l’amitie 
Les stoiciens disoient que le sage n’aimoient personne. Ils portoient le raisonnement trop loin ; je croi cependant qu’il est vrai, que si les hommes etoient parfaitement {f.106r} vertueux ils n’auroient point d’amis.
Nous ne pouvons nous attacher à tous nos concitoyens nous en choisissons un petit nombre auquel nous nous bornons, nous passons une espece de contrat pour nôtre utilité commune qui n’est qu’un retranchement de celui que nous avons passé avec la societé entiere et semble même en un certain sens lui être prejudiciable. E
En effet un homme veritablement vertueux devroit être porté à secourir l’homme le plus inconnu comme son ami propre, il a dans son cœur un engagement qui n’a besoin d’être confirmé par des paroles des sermens ni des temoignages exterieurs et le borner à un certain nombre d’amis c’est detourner son cœur de tous les autres hommes, c’est le separer du tronc et {f.106v} l’attacher aux branches[3].
Si cela est ainsi que peut on dire de ces ames lâches qui trahissent même jusqu’à cet engagement qui n’a êté etabli que pour secourir l’imperfection de notre nature.
L’amitié

Amitié la vertu des Rom.

êtoit proprement la vertu des Romains, on en trouve des traits dans l’histoire de leurs siecles les plus corrompus : jamais plus heros que lorsqu’ils furent amis

Voy. jusqu’ou Lucilius porta l’amitie pr Brutus et Antoine st Real 290[4]

.
La constitution de l’êtat êtoit telle que chacun etoit porté à se faire des amis les besoins eternels que l’on avoit de l’amitié en etablissoit les droits un homme n’êtoit puissant dans le senat et dans le peuple que par ses amis, n’alloit aux charges que par ses amis et quand le tems de son administration êtoit finie, en butte à toutes les accusations on avoit encore plus besoin de ses amis.
{f.107r} Les citoyens tenoient aux citoyens par toutes sortes de chaines on êtoit lié avec ses amis ses affranchis ses esclaves ses enfans. Aujourd’hui tout est aboli jusqu’à la puissance paternelle , chaque homme est izolé il semble que l’effet naturel de la puissance arbitraire soit de particulariser tous les interets

Puissance arbitraire particularise tous les intérêts

.
Cependant ces liens qui detachoient l’homme de lui même pour l’attacher à autrui faisoient faire les grandes actions, sans cela tout est vulgaire et il ne reste qu’un interêt bas qui n’est proprement que l’instinct animal de tous les hommes.
Parmi nous ceux qui peuvent faire du bien aux autres sont précisément ceux qui n’ont et ne peuvent avoir d’amis. Je parle des princes et d’une 3e espece d’hommes qui tiennent le milieu entre le souverain et ses sujets je veux dire les ministres

Ministres

, gens qui ne joüissent que des malheurs de la condition des princes et n’ont ni les avantages de la vie {f.107v} privée ni ceux de la souveraineté

Ce que je dis des ministres je l’ai mis dans le Traité du Prince[5].

.

- - - - -

Main principale E

1254

L’usage des femmes de la cour de faire des affaires

Femmes qui font des affaires

a produit bien des maux. 1º Cela remplit toutes sortes de place de gens sans merite. 2º Cela a banni la générosité, le bon naturel, la candeur, la noblesse de l’ame. 3º Cela a ruiné ceux qui ne faisoient point ce honteux trafic, en les obligeant de se monter aux depens des autres. 4º Les femmes êtant plus propres à ce commerce là que les hommes, elles faisoient une fortune particuliere, ce qui est la chose du monde qui contribue le plus a la ruine des mœurs, à leur luxe et à leur galanterie[1].

Main principale E


1250

n1.

Période qui s’étend de 415, date de l’installation des Wisigoths en Espagne, jusqu’en 713, avec la domination complète des Arabes sur la péninsule ibérique.

1250

n2.

L’Esprit des lois parle de la suppression par Récessuinde de la prohibition des mariages entre Goths et Romains en Espagne (XXVIII, 7, et note (c) de l’auteur), mentionnée dans la loi des Wisigoths (Friedrich Lindenbrog, Codex legum antiquarum, Francfort-sur-le-Main, J. et A. Marnios, 1613, p. 51 – Catalogue, nº 820).

1251

n1.

Voir nº 57, note 1 et nº 220, 924, 1266.

1252

n1.

Cette question était l’objet de la querelle sur l’obéissance passive : voir nº 625. Sur le gouvernement des lois, la tradition républicaine anglaise et son influence sur Montesquieu, voir Alexis Keller, Dictionnaire électronique Montesquieu, art. « République » [en ligne à l’adresse suivante : http://dictionnaire-montesquieu.ens-lyon.fr/index.php?id=128].

1253

n1.

Ensemble comprenant les nº 1253 à 1280 inclus.

1253

n2.

Cet article marque l’abandon de ce projet de dissertation qui avait connu des évolutions depuis 1725 (nº 57, 220-224) : voir, dans cette édition, les parties introductives « Projets, ébauches, matériaux de l’œuvre » et « L’enseignement des titres ».

1253

n3.

Voir nº 350.

1253

n4.

Pour favoriser la fuite de Brutus, mis en déroute avec son armée lors de la bataille de Philippes, Lucilius se fit passer pour lui et offrit sa vie à Antoine face auquel il justifia fièrement cet artifice ; admiratif, Antoine lui offrit une amitié sur laquelle il put compter « même quand il fut abandonné de tout le monde » (Saint-Réal, « Considérations sur Antoine », dans Œuvres, Paris, Huart, 1745, t. III, p. 152-154).

1253

n5.

Sur ce projet, voir nº 540, 610, 640 ; voir aussi, dans cette édition, les parties introductives « Projets, ébauches, matériaux de l’œuvre » et « L’enseignement des titres ».

1254

n1.

Les Réflexions sur le caractère de quelques princes et sur quelques événements de leur vie (OC, t. 9, p. 61) et les articles nº 1272 et 1340, morceaux rejetés du Traité des devoirs, font remonter cette influence des femmes en France au règne de François Ier ; dans L’Esprit des lois, elle est une caractéristique du gouvernement monarchique (VII, 9).