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Pensées 1527 à 1531

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

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Pensées, volume II

1527

{f.232r} Vegece a remarque que les armèes

Armées

qui travaillent ne sont pas mutines[1], ceci regarde le gouvernement militaire et les raisons en sont natureles, le travail suppose la discipline et la discipline la force du commandement, l’objet de celui qui travaille est le plaisir du delassement, mais quand on est dans l’oisiveté on a bien d’autres pretentions au bonheur.

- - - - -

Main principale I

1528

Toutes armées qui ont vecu delicieusement sont mutines[1] car pour elles le travail est insuportable, mais celles qui sont accoutumées aux exercices obeissent car le combat ne leur est pas penible au contraire elles le souhaittent pour avoir du repos au lieu que les autres le fuient pour ratraper le lieu de leurs delices :

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Main principale I

1529

{f.232v} La frayeur nous fit faire a Turin la chose du monde la plus prudente, ce fut d’abandonner l’Italie et de deffendre les Alpes[1] nous avions sujet d’esperer par la nature des choses de faire la guerre superieurement en Espagne nous etions inattaquables en Alsace ; nous n’avions qu’a deffendre la Flandre et laisser ranimer ce feu que tant de malheur avoit eteint

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Main principale I

1530

L’humeur des Anglois[1]

Humeur des Anglois

est quelque chose qui est independentent de l’esprit et en est distingué. Comme on le verra par les exemples, cette humeur est distinguée de la plaisanterie et n’est point la plaisanterie, c’est plutot le plaisant de la plaisanterie. Ce n’est point la force comique le vis comica[2], c’est plutot la maniere de la force comique, je la definiray dans la {f.233r} plaisanterie, la maniere de rendre plaisament les choses plaisantes et c’est le sublime de l’humeur ; et dans les choses ingenieuses la maniere de rendre plaisament les choses ingenieuses ; comme ce que les images sont dans la poësie l’humeur est dans la plaisanterie, quand vous metez de la plaisanterie sans humeur, vous sentez quelque chose qui vous manque comme quand vous faites la poësie sans image ; et la difficulté de l’humeur consiste a vous faire trouver un sentiment nouveau dans la chose qui vient pourtant de la chose.
Voicy des exemples. L’epigramme de Rousseau Un qui comence Un mandarin de la societé[3] est ingenieuse plaisante même si est ingenieuse elle est meme plaisante si l’on veut ; il n’y a point d’humeur, celle entre Racine et l’ainé des Corneilles[4] est de meme elle est ingenieuse et plaisante et il n’y a point d’humeur dans celle {f.233v}

Rousseau

de ce moine ou un penitent vient s’accuser d’avoir par la vertu d’une recette fait des choses admirables et a qui le moine dit, or donne moy la joyeuse recepte, je te promets mon absolution[5], l’idée est plaisante et l’auteur y a ajouté de l’humeur par le mot de mon, s’il avoit dit l’absolution, l’epigramme n’etoit plus que plaisante, le moine dit mon absolution pour faire le trocq ; l’autre epigramme de Rousseau de l’yvrogne et du frater[6] est plaisante dans le fond de la chose, Rousseau y ajoute de l’humeur dans la maniere dont il la compte[7], or Hypocras tient pour methode unique vous voyez l’effort du chirurgien de village pour paroitre habile, or le fievreux luy dit Me Clement ce premier point n’est le plus necessaire, ce mot me Clement marque la gravite d’une deliberation, et pour soif la soif ce sera mon affaire ce dernier marque l’importance de la {f.234r} resolution, c’est un plaisant qui est accessoire a la plaisanterie que l’humeur, mais il faut qu’il se trouve dans la chose meme, de méme dans cette epigramme

N’etoit elle point endormie

La malheureuse accademie

Quand elle prit Jean Chamillard[8]

C’est le mot de Jean qui est l’humeur et il n’y en auroit point eu si on avoit mis quand elle choisit Chamilard enfin l’humeur est le sentiment plaisant ajouté au sentiment plaisant, comme les epithetes sont l’image particuliere ajoutee a l’image generale

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Main principale I

1531

[Passage à la main M] Anglois
A
Anglois
[Passage à la main I] Anglois

Anglois

ils parlent peu et cependant ils veulent etre ecoutés, chez eux la simplicite la modestie, la retenue ne sont jamais ridicules ils font cas du merite personnel {f.234v} plus qu’aucune nation du monde : ils ont leurs caprices mais ils en reviennent si vous leur envoyez de petites gens ils croyent que vous voulez les tromper ; ils sont vrais et ouverts et meme indiscrets, mais ils ne peuvent souffrir d’etre trompez. Tout ce qui s’apelle air leur deplait ; ils aiment a voir la simplicité et la decence ; ils aiment a raisonner plus qu’a converser, naturelement honnête gens si la cour et le besoin ne les a pas corrompus, braves sans estimer la bravoure, egalement capables de mepriser l’argent et de l’aimer, incapables de sce divertir, ils aiment qu’on les divertisse. Quand les étrangers n’ont pas les deffauts qu’ils leur croyent ils sont gens à les aimer a la folie, ils aiment les talents et n’en sont point jaloux tout cela est couvert d’une bisarrerie qui est comme l’habit qui envelope toutes leurs vertus.
* Voila pour les particuliers voicy la nation et le ministere.
Trompés les. Comme ils n’esperent pas de pouvoir vous le rendre, vous les mettez au desespoir.
{f.235r} La nation insolente les particuliers modestes.

- - - - -

Ne
Ne craignent craignons jamais un roy d’Angleterre qui n’aura pas de merite personnel

- - - - -

Passage de la main I à la main M


1527

n1.

Cf. nº 1496 et 1528.

1528

n1.

Cf. nº 1496 et 1527.

1529

n1.

Durant la guerre de Succession d’Espagne qui se déroulait sur les fronts d’Espagne, de Flandre, d’Alsace et de Lombardie, alors que Philippe d’Orléans souhaitait poursuivre la campagne en Italie après l’échec du siège de Turin (1706), le duc de la Feuillade et les officiers généraux imposèrent une retraite vers le fort de Pignerol en Savoie (Saint-Simon, t. II, p. 779-783).

1530

n1.

Cf. nº 685. Le terme humour est rendu par humeur dans les premières traductions françaises de William Temple qui définit ce genre de comique (Œuvres mêlées [1693], Utrecht, A. Schouten, 1694, 1re partie, « De la poësie », p. 429-430 – Catalogue, nº 2355 bis ; 2355 ter pour l’éd. de 1708), comme Béat de Muralt dans ses Lettres sur les Français, les Anglais et les voyages parues en 1725 (C. Gould et C. Oldham (éd.), Paris, H. Champion, 1933, texte de 1728, p. 32, 33, etc.) ; Laurent Versini a consacré une étude à « L’humour de Montesquieu », dans Les Styles de l’esprit : mélanges offerts à Michel Lioure, S. Bernard-Griffiths et al. (éd.), Clermont-Ferrand, Association des publications de la faculté des lettres et sciences humaines, 1997, p. 105-111.

1530

n2.

Cf. nº 1149.

1530

n3.

Jean-Baptiste Rousseau, Épigrammes, LXXXI. Sont uniquement reproduits les soulignements d’une encre identique à celle de l’écriture d’origine, qui marquent les citations.

1530

n4.

Jean-Baptiste Rousseau, Épigrammes, LII.

1530

n5.

Jean-Baptiste Rousseau, Épigrammes, LXVII.

1530

n6.

Jean-Baptiste Rousseau, Épigrammes, X.

1530

n7.

Lire : conte.

1530

n8.

Chanson sur l’air de Joconde, d’après les Nouvelles littéraires, dans Friedrich Melchior Grimm, Correspondance littéraire, philosophique et critique : revue sur les textes […], M. Tourneux (éd.), Paris, Garnier frères, 1877-1882, t. I, p. 308-309. Les académiciens, « pour être payés de leurs jetons », offraient une place dans leur compagnie au Contrôleur général des Finances. Michel Chamillart aurait suggéré le nom de son frère Jean-François (« Jean »), l’évêque de Senlis, élu en 1702.