M : | Montesquieu 1726/1727-1755. |
D : | Bottereau-Duval 1718-1731. |
E : | 1734-1739. |
U : | 1739. |
H : | 1741-1742. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
I : | 1743. |
L : | 1743-1744. |
O : | 1745-1747. |
P : | Damours 1748-1750. |
Q : | 1750-1751. |
R : | Saint-Marc 1751-1754. |
S : | 1754-1755. |
V : | 1754. |
JB : | Jean-Baptiste Secondat ?-1795. |
T : | écriture des manchettes 1828-1835 |
M : | Montesquieu. |
D : | Bottereau-Duval_1721-1731. |
H : | 1741-1742. |
P : | Damours_1748-1750. |
E : | 1734-1739. |
L : | 1742-1744. |
O : | 1745-1747. |
T : |
écriture des manchettes |
JB : | Jean-Baptiste_Secondat. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
E2 : | |
I : | 1743. |
R : | Saint-Marc_1751-1754. |
Pensées, volume II
1622
{f.491r} Nouveaux fragmens d’une histoire de la jalousie[1]
Voyes ce qui est au tome 1er p 483 Je lis quelque fois toutte [Passage à la main P] une histoire sans faire la moindre attention aux coups donnés dans les batailles et a l’aipaisseur des murs des villes prises, uniquement attentif a regarder les hommes mon plaisir est de voir cette longue suitte de passions et de fantaisies
On verra dans l’histoire de la jalousie que ce n’est pas toujours la nature et la raison qui gouverne les hommes, mais le pur hazard et que certaines circonstances qui ne paroisent pas d’abord considerables influent telement sur eux et agisent avec tant de force et d’assiduité qu’elles peuvent donner un tour d’esprit a toute la nature humaine[2]
Darius aiant fait une loy qui deffendoit l’adultere, les Massagetes luy representerent qu’ils ne pouvoient y obeir parce qu’ils avoient coutume de regaler leurs hotes de leurs femmes[3], quelque fut la force de cette coutume il est bien certain qu’un Massagete qui aimoit sa femme et qu’il prostituoit a un etranger eut été bien faché qu’elle eut aimé plus cet etranger que luy, il vouloit bien remplir {f.491v} un devoir exterieur mais il souhaitoit sans doute que sa femme se tint purement a la civilité et qu’elle luy gardat un coeur qui luy etoit cher. On etoit si honeste dans ce pays qu’on vouloit faire voir a un etranger qu’on luy donnoit ce qu’on aimoit le mieux, et cela meme doit faire penser qu’un homme auroit été bien faché de perdre pour toujours l’amour d’une femme qui l’abandoneroit pour un moment.
Il a falu que de grandes societées se formasent pour que de certains prejugés devinsent generaux, et donnasent le ton a tout le reste
Il y avoit deux peuples qui se disputoient d’antiquité les Egiptiens et les Scites. Isis et Osiris regnerent chez les Egiptiens, ils furent mis au rang des dieux, Isis eut la preeminence sur son mary et en elle tout son sexe fut respecté. Les Egiptiens se soumirent a leurs femmes en son honneur et se plierent telement a cette servitude que prenant soin de la maison ils leurs laisserent toutes les affaires du dehors, elles succederent au royaume avec leurs freres &c[4].
A l’egard des Scites l’histoire nous apprend que quelques femmes tuerent leurs marys appellant le mariage non pas une aliance mais une servitude[5] elles fonderent l’empire des Amazones, batirent {f.492r} Ephese et conquirent presque toute l’Azie[6].
Les prejugés des nations ont les memes prejuges que les empires, il ne faut presque rien pour donner à un peuple les prejugés d’un autre et le progres peut etre si grand qu’il change, pour ainsi dire, tout le genie de la nature humaine, c’est ce qui fait que l’homme est si difficile a definir. N’est il pas vray q
N’est il pas vray que si le mahometisme avoit soumis toute la terre les femmes auroient eté par tout renfermées, on auroit regardé cette maniere de les gouverner comme naturelle, et on auroit de la peine a imaginer qu’il y en put avoir une autre. Si les fammes scites avoient continué leurs conquestes, si les Egiptiens avoient continué les leurs le genre humain viveroit sous la servitude des femmes, et il fauderoit etre philosophe pour dire qu’un autre gouvernement seroit plus conforme a la nature[7]
(2) Voyes la page 494
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Passage de la main M à la main P |
1623
{f.493r} [Passage à la main M] Je disois du T... il est faux par le coeur, hipochrite du corps, gauche de l’esprit, puerilement bas stupidement haut rusé sans lumieres, fin et mal adroit ;
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Passage de la main P à la main M |
1624 Une femme est obligée de plaire come si elle s’estoit faitte elle meme
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Main principale M |
1625 On joue au biribi si l’argent vous incomode jettés le par la fenestre : si je demandois a quelqu’[u]n s’il vouloit jouer soixante dix louis contre soixante trois il riroit c’est pourtant le biribi, on ne calcule point[1] : les Anglois sont calculateurs c’est qu’il y a ches eux deux bouts qui envelopent le milieu les negotians et les philosophes les femmes n’y sont rien icy elles sont tout.
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Main principale M |
1626 Les princes sont si fort environés du cercle de leurs courtisans qui leur derrobent tout et leur ottent la vüe de tout que celui qui viendroit a voir clair seroit come Decartes qui sortit des tenebres de la vieille philosophie .
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Main principale M |
1622 |
n1. |
Sur ce projet, voir nº 483. |
1622 |
n2. |
Ce projet rejoint les conceptions pyrrhoniennes de Montaigne ou les remarques fameuses de Pascal sur « le nez de Cléopâtre » ou sur le « petit grain de sable » dans l’uretère de Cromwell (Pensées, L. Brunschvicg (éd.), § 162 et 176). Sur la loi des causes imperceptibles et des conséquences inattendues, voir le Traité des devoirs, OC, t. 8, p. 439, l. 65-68. |
1622 |
n3. |
La communauté des femmes massagètes était rapportée par Hérodote (I, 216) et Strabon (XI, 8, § 6). Les coutumes d’hospitalité sexuelle sont un topos des récits de voyages, comme dans le chapitre LVIII du Devisement du monde [1299] de Marco Polo, ou dans l’Histoire de la Laponie de Johannes Gerhard Scheffer (Paris, veuve Varennes, 1678, chap. XXVI, p. 276). |
1622 |
n4. |
Voir nº 485. Dans L’Esprit des lois, Montesquieu reprendra l’exemple d’Isis, non plus pour expliquer l’asservissement des hommes en Égypte, mais la pratique de l’inceste entre frères et sœurs (c’est « en l’honneur d’Isis » que « les Egyptiens ont épousé leurs sœurs » ; XXVI, 14 : Derathé, t. II, p. 183). |
1622 |
n5. |
La formule est employée par Justin (Histoire universelle, II, 4). |
1622 |
n6. |
Justin, Histoire universelle, II, 4. |
1622 |
n7. |
Dans L’Esprit des lois, Montesquieu s’écartera de ce scepticisme historique qui explique l’évolution des sociétés par le hasard et les circonstances : « la jalousie de coutume, de mœurs, de lois » fait partie des déterminations qui pèsent sur l’action du législateur (XVI, 13). |
1625 |
n1. |
Né en Italie au XVIIe siècle, le biribi (terme attesté dans l’édition de 1762 du Dictionnaire de l’Académie française) était un jeu de chance dérivé du loto, joué en France au XVIIIe siècle. Les joueurs déposaient leur mise sur un des soixante-dix numéros d’un grand tableau ; le banquier tirait d’un sac le numéro gagnant ; le joueur ayant misé sur le bon numéro gagnait sa mise multipliée par 36 ou 64 ; les mises perdantes étaient gagnées par « la banque ». Comme le souligne un certain P.-N. Huyn dans une brochure de la fin du siècle, « ce jeu est arrangé de maniere que le banquier ne paye jamais que sur le pied de 64 sur 70 de mise » (La Théorie des jeux de hasard, ou Analyse du krabs, du passe-dix, de la roulette, du trente-et-quarante, du pharaon, du biribi et du loto, s. l., 1788, p. 43-45). |