M : | Montesquieu 1726/1727-1755. |
D : | Bottereau-Duval 1718-1731. |
E : | 1734-1739. |
U : | 1739. |
H : | 1741-1742. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
I : | 1743. |
L : | 1743-1744. |
O : | 1745-1747. |
P : | Damours 1748-1750. |
Q : | 1750-1751. |
R : | Saint-Marc 1751-1754. |
S : | 1754-1755. |
V : | 1754. |
JB : | Jean-Baptiste Secondat ?-1795. |
T : | écriture des manchettes 1828-1835 |
M : | Montesquieu. |
D : | Bottereau-Duval_1721-1731. |
H : | 1741-1742. |
P : | Damours_1748-1750. |
E : | 1734-1739. |
L : | 1742-1744. |
O : | 1745-1747. |
T : |
écriture des manchettes |
JB : | Jean-Baptiste_Secondat. |
J : | 1742. |
K : | 1742-1743. |
F : | 1743. |
E2 : | |
I : | 1743. |
R : | Saint-Marc_1751-1754. |
Pensées, volume I
643 {f.456r} Question[1]Torture On voit bien qu’on a voulu doubler les peines mais on les a multipliees plus que quadruplées, le 13[e] tour estant sans doutte le plus cruel :
- - - - - J’ay remarqué que de 10 persones condamnées a la question il y en a neuf qui la souffrent si tant d’inocens ont esté condamnés a une si grande peine quelle cruauté ! si tant de criminels ont echapé a la mort, quelle injustice :
- - - - - Mais on ne peut pas dira t on rejetter une pratique authorisée par tant de loix. Mais par la meme raison il n’auroit pas falu abolir la preuve tirée du fer chaut de l’eau froide, des duels[5], ny l’absurde et infame congrés[6], il faudroit encor punir come sorciers touts les gens maigres ou qui ont un poumon fait de maniere a les tenir sur l’eau[7]
- - - - -
{f.456v} Menochius L. 1er quest 89 traite des indices pour la torture il en met d’absurdes come ceux tires de la mauvaise fisionomie ex nomine turpi de ce que l’accusé a fait couler le sang d’un cadavre[8]
- - - - - Torture - - - - - |
Main principale M |
644 Le celebre autheur du Tableau de l’inconstance des demons et des sorciers qui fait veiller un home qui disoit qu’il avoit esté au sabat et n’avoit pas bougé de son lit l’autheur il dit que le diable avoit mis un corps fantastique en sa place : la force du préjuje empêchoit le juje de se rendre à la seule preuve que les criminels accusés pouvoint avoir de leur innocence[1]
- - - - - |
Main principale M |
645
{f.457r} Nous avons vu que dans la derniere guerre[1] une puissance[2] dont la principalle force consiste dans son crédit et dans son comerce se servit de ces 2 avantages pour envoyer combattre contre nous autant d’homes qu’elle en pouvoit acheter tranquille au dedans sans pourtant une seule place qui put la deffendre, elle realisoit contre nous des richesses de fictions et devenoit spectatrice tranquille de ses mercenaires qu’elle perdoit sans regret et reparoit sans peine ; tandis que par un esprit de vertige nous attendions les coups pour les recevoir et mettions sur pied de grandes armées pour voir prendre nos places et decourager nos garnisons et languir dans une guerre deffensive dont nous ne somes point capables ; il falloit aller a cette nation ; tenter sans cesse de passer la mer et arroser de son sang et du notre sa terre natale ; lui faire la guerre c’estoit la veincre la mettre en peril c’estoit pour nous la conquérir ; nous lui faisions perdre ce crédit qui nous estoit si fatal et jettions des soubcons sur celui d’une autre puissance maritime[3] ; nous l’aurions contreinte de rapeller son Annibal[4] avec sa vieille armée ou de faire la paix ou de s’arrester devant nous :
La seule grande entreprise que nous fimes au dehors nous fut fatalle nous allames reveiller la jalousie la creinte et la heine d’une nation qui n’estoit qu’un instrument de cette guerre qui lente et presque immobile d’elle meme recevant tout son mouvement d’ailleurs estoit come Anthée qui retrouvoit sans cesse les forces qu’il avoit perdues
- - - - - |
Main principale M |
646
{f.457v}
Mort pour un Romain |
Main principale M |
647 Monnoie a fait les grands empires - - - - - |
Main principale M |
643 |
n1. |
Cf. EL, VI, 17, et XXIX, 11. La torture inhérente au système de preuve du droit romain (voir le 48e livre du Digeste et le 9e livre du Code de Justinien, que le jeune Montesquieu avait lus et annotés pendant ses études de droit : Collectio juris, OC, t. 11, p. 543-546 ; OC, t. 12, p. 904-905), se maintint en France dans l’ordonnance criminelle de 1670 (Adhémar Esmein, Histoire de la procédure criminelle en France et spécialement de la procédure inquisitoire, depuis le XIIe siècle jusqu’à nos jours, Paris, Larose et Forcel, 1882, p. 276-283) mais était en net recul en Europe depuis le début du XVIIe siècle face aux évolutions du régime de la preuve (John H. Langbein, Torture and the Law of Proof, Chicago, The University of Chicago Press, 2006 [1re éd. 1976], p. 50-55). |
643 |
n2. |
En dépit de la volonté d’uniformisation exprimée lors de la rédaction de l’ordonnance criminelle de 1670, les pratiques continuèrent de différer : on utilisait selon les régions l’eau, les brodequins, l’extension, etc. (Adhémar Esmein, Histoire de la procédure criminelle en France et spécialement de la procédure inquisitoire, depuis le XIIe siècle jusqu’à nos jours, Paris, Larose et Forcel, 1882, p. 239-242). |
643 |
n3. |
Sur ce personnage et le supplice qu’il infligeait, voir nº 35, note 2. |
643 |
n4. |
Sur cette distinction résidant dans l’intensité des tourments infligés, voir Benoît Garnot, Histoire de la justice, France, XVe-XXIe siècle, Paris, Gallimard, 2009, p. 615. |
643 |
n5. |
L’ouvrage de Louis Le Gendre (Mœurs et coutumes des Français dans les différents temps de la monarchie française, Paris, [J. Collombat] – Catalogue, nº 2949), paru en 1712, mentionné dans le deuxième volume des Pensées (nº 1540, autographe parmi les interventions de L, 1743-1744), évoque ces preuves divines (ordalie, duel judiciaire…). Leur existence et leur abolition sont étudiées dans les chapitres de L’Esprit des lois consacrés aux preuves judiciaires à l’époque féodale (XXVIII, 14-31) ; sur le rapport entre l’abandon de l’ordalie, le système des preuves légales et le recours à la torture, voir Adhémar Esmein, Histoire de la procédure criminelle en France et spécialement de la procédure inquisitoire, depuis le XIIe siècle jusqu’à nos jours, Paris, Larose et Forcel, 1882, p. 363 ; John H. Langbein, Torture and the Law of Proof, Chicago, The University of Chicago Press, 2006 (1re éd. 1976), p. 4-12. |
643 |
n6. |
Le congrès était la preuve de la puissance ou de l’impuissance des gens mariés, aboli en 1677 : voir LP, 84 (86), p. 370, note 8. |
643 |
n7. |
Dans les procès de sorcellerie, flotter lorsqu’on était jeté à l’eau (preuve par l’eau froide) témoignait d’une connivence avec le Malin ; voir nº 1540. |
643 |
n8. |
Jacopo Menochio, Commentarius de praesumptionibus, conjecturis, signis et indiciis, Lyon, 1588, Liber I, Quaest. LXXXIX, § 128, 130, 131 – Catalogue, nº 969. |
643 |
n9. |
« Les esclaves étaient torturés lorsqu’il s’agissait de condamner leurs maîtres à mort » (nous traduisons). Dans l’Antiquité, la déclaration des esclaves, arrachée par la torture, constitue une preuve, au même titre que le témoignage d’hommes libres, dans les causes capitales concernant leur maître (in caput domini) ; voir Ulpien, L’Office de proconsul, L, 8 ; Digeste, XLVIII, 18, 1, 1.7-8. 11-12. |
643 |
n10. |
Il s’agit du sénatus-consulte syllanien, dont Montesquieu expliquera la logique dans L’Esprit des lois (XV, 16 ; cf. nº 1838). |
644 |
n1. |
Pierre de Lancre (1560-1630), conseiller au parlement de Bordeaux, auteur du Tableau de l’inconstance des mauvais anges et démons, où il est amplement traité des sorciers et de la sorcellerie [1613], dont Montesquieu possédait la troisième édition (1712, in-4º – Catalogue, nº 2597), écrivait en effet : « […] c’est un simulacre du corps que le Diable nous fait voir… » (N. Jacques-Chaquin (éd.), Paris, Aubier, 1982, 2nd liv., discours II, p. 124). Montesquieu, dans les notes de son séjour à Naples, donne une explication rationnelle du phénomène (Voyages, p. 302). |
645 |
n1. |
La guerre de Succession d’Espagne (1701-1714). |
645 |
n2. |
L’Angleterre. |
645 |
n3. |
Les Provinces-Unies. |
645 |
n4. |
Marlborough, commandant en chef des Anglo-Hollandais en Flandre et en Allemagne ; voir nº 593, note 1. |
647 |
n1. |
Cette remarque est reprise dans L’Esprit des lois (XVIII, 17), sans la référence aux Tartares dont l’esprit de servitude et le despotisme constituent une exception à la liberté des peuples qui ne cultivent pas la terre (EL, XVII, 5 ; XVIII, 19). La documentation de Montesquieu s’étoffera à partir de 1733-1734 : il fait mention des ouvrages de Jean du Plan Carpin (Relation des voyages en Tartarie […], Paris, M. Soly, 1634 ; voir Geographica, p. 302, etc.) et de Pétis de la Croix père (Histoire du Grand Genghizcan, premier empereur des anciens Mogols et Tartares, Paris, veuve Jombert, 1710 ; voir nº 1934), dans les Réflexions sur la monarchie universelle en Europe, parues en 1734 (OC, t. 2, XIII, note (g), p. 351) : il lit la Description géographique, historique, chronologique, politique et physique de l’Empire de la Chine et de la Tartarie chinoise du père Du Halde (Paris, P. G. Le Mercier, 1735 ; extrait [1735-1739] dans Geographica, p. 139-284) et l’Histoire généalogique des Tatars (Leyde, A. Kallewier, 1726 – Catalogue, nº 3125 ; extrait [1734-début 1739] dans Geographica, p. 293-318) ; voir nº 205, note 1. |