Chapitre 37

Capitulum XXXVII1caput 35 1536.

Ezox [le saumon ? l’esturgeon1Bien que le mot ezox ait été choisi par les nomenclateurs pour désigner le brochet (Ezox lucius Linné, 1758), dans l’Hortus sanitatis comme chez Pline il a un tout autre sens. Comme pour l’erox (ch. 35), on peut voir dans l’ezox l’esturgeon (Acipenser sturio Linné, 1758). Mais le saumon de l’Atlantique (Salmo salar Linné, 1758) est, pour Kitchell & Resnick 1999, 1682, le poisson qui correspond le mieux à l’ezox d’Albert le Grand (AM 24, 49 (32)), et ils voient dans huso et ezox deux appellations du même poisson à des stades différents d’évolution. Deroux 2008, 458-460, semble aller dans le même sens en identifiant l’ezox de Pline au saumon « charognard ». Cependant, le texte d’Albert le Grand est différent de celui de l’Hortus sanitatis, notamment parce que l’anecdote du chariot, sans doute issue de Pline (Plin. nat. 9, 44 : nec nisi boum iugis extractus), n’apparaît pas. Dès lors, il semble prudent de rappeler le commentaire de De Saint-Denis 1947, XXVII, à propos de ce poisson : « Esox, qui désignait un poisson du Rhin (on ne peut préciser davantage : saumon ? esturgeon ? brochet ?), a été accaparé par les naturalistes pour dénommer le genre brochet ». Voir s. v. Eriox ou Erox. ?] [+][VB 17, 53 De exoceto [-]][+]

Ezox [+][VB 17, 53 De exoceto [-]][+]

Renvois internes : Ezox : cf. Accipender, ch. 1 ; Eriox vel erox, ch. 35 ; Sturio, ch. 89.

Lieux parallèles : TC, De ezoce (7, 32) ; AM, [Ezox] (24, 49 (32)), [Huso] (24, 49a, (32)).

poisson

[1] [] VB 17, 53, 2D’après le Liber de natura rerum. [] TC 7, 32L’ezox est le plus grand poisson du Danube, si grand qu’on peut à peine le transporter sur un chariot attelé à trois ou quatre chevaux2Cette information remonte à l’Antiquité ; ainsi Plin. nat. 9, 44-45 : Fiunt et in quibusdam amnibus haud minores, silurus in Nilo, isox in Rheno, attilus in Pado, inertia pinguescens ad mille aliquando libras, catenato captus hamo nec nisi boum iugis extractus. […] [Silurus] praecipue in Moeno Germaniae amne protelis boum […] extrahitur, « dans certains fleuves des poissons deviennent aussi grands : le silure dans le Nil, l’esox dans le Rhin, l’attilus dans le Po ; celui-ci s’engraisse au point d’atteindre parfois 1 000 livres ; on le prend avec un hameçon fixé à une chaîne et on ne le tire de l’eau qu’avec un attelage de bœufs. […] C’est en particulier dans le Main, fleuve de Germanie, qu’on hale [le silure] hors de l’eau avec des attelages de bœufs » (De Saint-Denis 1955, 52). L’anecdote se retrouve aussi dans Ael. NA 14, 25, à propos de poissons du Danube. Certaines catégories d’esturgeons deviennent très grosses à l’âge adulte : l’esturgeon commun (Acipenser sturio Linné, 1758) atteint 3 m de long et peut peser jusqu’à 200 kg, tandis que le beluga (Huso huso Linné, 1758, à ne pas confondre avec le cétacé qui porte le même nom) peut atteindre 9 m de long et peser plus de 1 500 kg.. Il a un intestin unique, dans le corps des os peu nombreux et petits, cartilagineux plutôt que durs, mais il passe pour avoir beaucoup d’os dans la tête. Sa chair, à ce qu’on dit, est très douce au goût et, pour l’aspect, elle ressemble en tout point à celle du porc. Il est lisse sur tout le corps et ne présente pas la moindre rugosité sur le corps ni dans ses mœurs. C’est un animal très doux et craintif : et en effet il est incapable de se défendre, même contre un tout petit poisson, mais s’empresse aussitôt de fuir. L’esturgeon aime beaucoup se frotter contre lui pour jouer ; mais dès que l’ezox le sent, il se réfugie dans les cachettes qu’il a coutume de se creuser dans les rives pour se protéger. Parfois cependant un esturgeon importun parvient à le débusquer et le poursuit dans sa fuite ; comme ils sont l’un et l’autre de grande taille et qu’ils ne peuvent pas se cacher même dans les eaux les plus impétueuses, les pêcheurs les capturent souvent tous les deux ensemble tandis qu’ils batifolent, chassant l’eau devant eux. Quand on l’a attrapé, on fait boire à ce poisson du vin très fort ou du lait, parce qu’il peut, lorsqu’il est enivré, vivre pendant plusieurs jours, et cela afin de l’emporter vers des terres lointaines, où on le mangera. Il faut lui administrer quatre setiers3Le setier est l’équivalent de 0,547 l, mais la mesure a varié selon les époques et les lieux. de vin pour l’enivrer.

[1] [] VB 17, 53, 2Ex Libro de naturis rerum2Vincent de Beauvais suit de très près Thomas de Cantimpré. Albert le Grand consacre à ce poisson deux chapitres différents, intitulés Ezox (AM 24, 49 (32)) et Huso (AM 24, 49a (32)), tandis que Thomas de Cantimpré ne fait qu’un seul chapitre, intitulé De ezoce, en indiquant cependant dans son texte que huso est un autre nom de l’ezox. Vincent de Beauvais, lui, imite Thomas de Cantimpré et maintient un seul chapitre intitulé De exoceto. L’Hortus sanitatis, quant à lui, traite à nouveau l’animal en deux chapitres : le chapitre Eriox reprend le texte d’Albert le Grand, Ezox celui de Thomas de Cantimpré.. [] TC 7, 32Ezox3exox VBd ut semper. est piscis Danubii maximus, ita ut vix in biga trahi possit ab equis quattuor aut tribus4quattuor aut tribus : tribus aut quatuor transt. 1536.. Unum habet intestinum, ossa pauca et parva in corpore, cartilaginosa potius quam solida, sed in capite multa fertur5multa fertur : fertur multa transt. 1536. habere ossa. Carnes vero fertur habere dulcissimas gustu6L’édition de Prüss1 donne un point après dulcissimas, et 1536 une virgule. Pour le sens, il nous a paru préférable d’associer dulcissimas à gustu et simillimas à specie, ce qui respecte le chiasme. vel specie carnibus porci simillimas. Per omne corpus lenis est nec aliquid asperitatis in corpore vel in moribus7interioribus 1491 Prüss1 1536. habet. Sed est mitissimus ac timorosus, quippe qui nec a minimo pisciculo se defendere potest, sed statim agitatur ad fugam. Huic8hinc 1536. sturio libentissime jocandi gratia se affricat. Quem ezox statim ut sentit, ad9a VB. latibula fugit quae sibi solet ad tutamen in litoribus effodere. Sed quandoque sturio importunus ejicit latitantem sequiturque fugientem, et quia magni sunt ambo nec etiam in validissimis aquis latere possunt, discurrendo et ante se aquas agitando, saepe simul a piscantibus capiuntur. Piscis iste captus vino fortissimo vel lacte potatur, quia vino inebriatus vivere potest pluribus10plurimis VBd. diebus, et hoc11et hoc om. 1536. ut ad remotas terras cibi gratia deferatur. Bibit autem vini sextaria quattuor antequam inebrietur.

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1Bien que le mot ezox ait été choisi par les nomenclateurs pour désigner le brochet (Ezox lucius Linné, 1758), dans l’Hortus sanitatis comme chez Pline il a un tout autre sens. Comme pour l’erox (ch. 35), on peut voir dans l’ezox l’esturgeon (Acipenser sturio Linné, 1758). Mais le saumon de l’Atlantique (Salmo salar Linné, 1758) est, pour Kitchell & Resnick 1999, 1682, le poisson qui correspond le mieux à l’ezox d’Albert le Grand (AM 24, 49 (32)), et ils voient dans huso et ezox deux appellations du même poisson à des stades différents d’évolution. Deroux 2008, 458-460, semble aller dans le même sens en identifiant l’ezox de Pline au saumon « charognard ». Cependant, le texte d’Albert le Grand est différent de celui de l’Hortus sanitatis, notamment parce que l’anecdote du chariot, sans doute issue de Pline (Plin. nat. 9, 44 : nec nisi boum iugis extractus), n’apparaît pas. Dès lors, il semble prudent de rappeler le commentaire de De Saint-Denis 1947, XXVII, à propos de ce poisson : « Esox, qui désignait un poisson du Rhin (on ne peut préciser davantage : saumon ? esturgeon ? brochet ?), a été accaparé par les naturalistes pour dénommer le genre brochet ». Voir s. v. Eriox ou Erox.

2Cette information remonte à l’Antiquité ; ainsi Plin. nat. 9, 44-45 : Fiunt et in quibusdam amnibus haud minores, silurus in Nilo, isox in Rheno, attilus in Pado, inertia pinguescens ad mille aliquando libras, catenato captus hamo nec nisi boum iugis extractus. […] [Silurus] praecipue in Moeno Germaniae amne protelis boum […] extrahitur, « dans certains fleuves des poissons deviennent aussi grands : le silure dans le Nil, l’esox dans le Rhin, l’attilus dans le Po ; celui-ci s’engraisse au point d’atteindre parfois 1 000 livres ; on le prend avec un hameçon fixé à une chaîne et on ne le tire de l’eau qu’avec un attelage de bœufs. […] C’est en particulier dans le Main, fleuve de Germanie, qu’on hale [le silure] hors de l’eau avec des attelages de bœufs » (De Saint-Denis 1955, 52). L’anecdote se retrouve aussi dans Ael. NA 14, 25, à propos de poissons du Danube. Certaines catégories d’esturgeons deviennent très grosses à l’âge adulte : l’esturgeon commun (Acipenser sturio Linné, 1758) atteint 3 m de long et peut peser jusqu’à 200 kg, tandis que le beluga (Huso huso Linné, 1758, à ne pas confondre avec le cétacé qui porte le même nom) peut atteindre 9 m de long et peser plus de 1 500 kg.

3Le setier est l’équivalent de 0,547 l, mais la mesure a varié selon les époques et les lieux.

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1caput 35 1536.

2Vincent de Beauvais suit de très près Thomas de Cantimpré. Albert le Grand consacre à ce poisson deux chapitres différents, intitulés Ezox (AM 24, 49 (32)) et Huso (AM 24, 49a (32)), tandis que Thomas de Cantimpré ne fait qu’un seul chapitre, intitulé De ezoce, en indiquant cependant dans son texte que huso est un autre nom de l’ezox. Vincent de Beauvais, lui, imite Thomas de Cantimpré et maintient un seul chapitre intitulé De exoceto. L’Hortus sanitatis, quant à lui, traite à nouveau l’animal en deux chapitres : le chapitre Eriox reprend le texte d’Albert le Grand, Ezox celui de Thomas de Cantimpré.

3exox VBd ut semper.

4quattuor aut tribus : tribus aut quatuor transt. 1536.

5multa fertur : fertur multa transt. 1536.

6L’édition de Prüss1 donne un point après dulcissimas, et 1536 une virgule. Pour le sens, il nous a paru préférable d’associer dulcissimas à gustu et simillimas à specie, ce qui respecte le chiasme.

7interioribus 1491 Prüss1 1536.

8hinc 1536.

9a VB.

10plurimis VBd.

11et hoc om. 1536.

Annotations scientifiques

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