Chapitre 55
[1491/vue 33] Capitulum LV1caput 54 1536.
Megar [le maquereau1Kitchell & Resnick 1999, n. 220, confirment
l’identification de Wright 1863, 508, selon lequel le megar est le maquereau (Scomber scombrus Linné, 1758)
d’après Alexandre Neckam, De laudibus divinae
sapientiae, III, v. 453-454 : allia si piperi
sociata assint, / elixa megaris plus placet
assa caro, « si on ajoute de l’ail au poivre, la chair du
maquereau bouillie avec cet assaisonnement plaît plus que grillée ».
C’est aussi le sens donné par Du Cange (1883-1887), s. v. Il est encore mentionné dans Latham et al. (dir.) 2002, t. 6 (M), s. v. Megaris : les mêmes vers d’Alexandre Neckam
y sont cités. Voir enfin Ridel & Zysberg 2006, 1252, s. v. Megarus, megaris ; 1206, s. v. Maquereau. Nous ignorons cependant
l’étymologie et le sens exact du mot megar.], milagus
[« qui a la forme du milan » : l’exocet2Le terme milvus et le
dérivé milagus (forme thématisée par l’auteur
de l’Hortus sanitatis pour milago, employé ensuite dans le corps du texte)
apparaissent, dans les sources de Vincent de Beauvais (VB 17, 66),
comme des poissons volants, qui tirent leur nom de leur ressemblance
avec l’oiseau du même nom « le milan ». La dérivation par le suffixe
-ago signifie « qui a la forme de », d’après
Ernout 1941, 87, mentionné par De Saint-Denis 1947, 65. La milago apparaît chez Isidore de Séville, mais,
selon André 1986, 202, n. 381, le nom de ce poisson – graphié,
précise-t-il, avec la géminée dans tous les manuscrits d’Isidore de
Séville, sauf par G (= St. Gallen, Stiftsbibliothek, Cod. Sang. 232
[f. 64r]), qui a milago – est un emprunt à
Plin. nat. 32, 14, car, dit-il, tous les
manuscrits de « Pline ont miluago (sauf lolligo de B (= Staatsbibliothek Bamberg
Msc.Class.42 [f. 4v]), qui provient de lolligines
euolare ex aqua tradit du § 15, et qu’ont adopté les éditeurs
depuis Sillig, y compris De Saint-Denis) ». La millago d’Isidore de Séville et des
encyclopédistes médiévaux est donc très probablement la lolligo de Pline, qui est un poisson volant,
comme l’est aussi son miluus (Plin. nat. 9, 82). Celui-ci ne peut donc être
le Trigla milvus Lacépède, 1801,
autre nom de l’Eutrigla gurnardus Linné, 1758,
qui est notre grondin gris ; car aucun grondin ne vole, pas même le
grondin volant (Dactylopterus volitans Linné, 1758
ou Trigla volitans Linné, 1758), bien
qu’il soit doté, comme les poissons volants, de nageoires très
développées. Mais il y eut des confusions, et il en subsiste encore
aujourd’hui, comme le rappellent Kitchell & Resnick 1999,
n. 233, entre le vrai poisson volant (Exocoetus volitans Linné, 1758) et
le grondin volant qui seraient tous deux, disent-ils, la milago décrite par Albert le Grand (AM 24, 83
(44)). Cependant, il reste à essayer d’identifier les trois poissons
volants désignés en latin par les termes hyrundo (ch. 43), loligo
(ch. 51) (ou comme ici milagus) et milvus. Aristote (Arist. HA 535 b 28) ne décrit que le vol du
poisson qu’il appelle χελιδών, en latin hyrundo : il s’agit de l’hirondelle de mer
(Hirundichthys affinis Günther,
1866 ; voir D’Arcy Thompson 1947, 285-287 et 260-261). En revanche,
Élien et Oppien mentionnent trois poissons volants : ils distinguent
la χελιδών de la τευθίς, qui serait la loligo
ou exocet volant, selon De Saint-Denis 1947, 58, mais aussi du
ἱέραξ, « le faucon de mer », qui serait le miluus de Pline d’après D’Arcy Thompson 1947, 90,
et De Saint-Denis 1947, 65. Or, celui-ci ajoute, d’après le détail
descriptif donné par Ovide (Ov. hal. 95),
qu’un seul poisson, l’hirondelle, a pu être désigné par les Anciens
sous deux appellations, du fait du changement de coloration qui
affecte ce poisson au cours de sa maturation. Ainsi, quatre termes
différents, dont l’un – milago ou milagus – résulte d’une faute de copie, auraient
été transmis depuis Pline pour ne désigner que deux poissons
volants : l’hirondelle de mer (hyrundo et milvus) et l’exocet volant (lolligo et milago).] et milvus
[« le milan » : l’uranoscope3Le miluus, « milan », est
le nom employé par Pline pour désigner l’hirondelle de mer (Hirundichthys affinis Günther,
1886) ; mais dans le Speculum naturale, le
milvus est identifié à la lucerna – peut-être l’uranoscope –, du fait d’une
mélecture du texte de Pline. ?] [+][VB 17, 66 De megare et milagine [-]][+]
Megar, milagus et milvus [+][VB 17, 66 De megare et milagine2post milagine hab. et milvo VBd. [-]][+]
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Propriétés et indications
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1Kitchell & Resnick 1999, n. 220, confirment l’identification de Wright 1863, 508, selon lequel le megar est le maquereau (Scomber scombrus Linné, 1758) d’après Alexandre Neckam, De laudibus divinae sapientiae, III, v. 453-454 : allia si piperi sociata assint, / elixa megaris plus placet assa caro, « si on ajoute de l’ail au poivre, la chair du maquereau bouillie avec cet assaisonnement plaît plus que grillée ». C’est aussi le sens donné par Du Cange (1883-1887), s. v. Il est encore mentionné dans Latham et al. (dir.) 2002, t. 6 (M), s. v. Megaris : les mêmes vers d’Alexandre Neckam y sont cités. Voir enfin Ridel & Zysberg 2006, 1252, s. v. Megarus, megaris ; 1206, s. v. Maquereau. Nous ignorons cependant l’étymologie et le sens exact du mot megar.
2Le terme milvus et le dérivé milagus (forme thématisée par l’auteur de l’Hortus sanitatis pour milago, employé ensuite dans le corps du texte) apparaissent, dans les sources de Vincent de Beauvais (VB 17, 66), comme des poissons volants, qui tirent leur nom de leur ressemblance avec l’oiseau du même nom « le milan ». La dérivation par le suffixe -ago signifie « qui a la forme de », d’après Ernout 1941, 87, mentionné par De Saint-Denis 1947, 65. La milago apparaît chez Isidore de Séville, mais, selon André 1986, 202, n. 381, le nom de ce poisson – graphié, précise-t-il, avec la géminée dans tous les manuscrits d’Isidore de Séville, sauf par G (= St. Gallen, Stiftsbibliothek, Cod. Sang. 232 [f. 64r]), qui a milago – est un emprunt à Plin. nat. 32, 14, car, dit-il, tous les manuscrits de « Pline ont miluago (sauf lolligo de B (= Staatsbibliothek Bamberg Msc.Class.42 [f. 4v]), qui provient de lolligines euolare ex aqua tradit du § 15, et qu’ont adopté les éditeurs depuis Sillig, y compris De Saint-Denis) ». La millago d’Isidore de Séville et des encyclopédistes médiévaux est donc très probablement la lolligo de Pline, qui est un poisson volant, comme l’est aussi son miluus (Plin. nat. 9, 82). Celui-ci ne peut donc être le Trigla milvus Lacépède, 1801, autre nom de l’Eutrigla gurnardus Linné, 1758, qui est notre grondin gris ; car aucun grondin ne vole, pas même le grondin volant (Dactylopterus volitans Linné, 1758 ou Trigla volitans Linné, 1758), bien qu’il soit doté, comme les poissons volants, de nageoires très développées. Mais il y eut des confusions, et il en subsiste encore aujourd’hui, comme le rappellent Kitchell & Resnick 1999, n. 233, entre le vrai poisson volant (Exocoetus volitans Linné, 1758) et le grondin volant qui seraient tous deux, disent-ils, la milago décrite par Albert le Grand (AM 24, 83 (44)). Cependant, il reste à essayer d’identifier les trois poissons volants désignés en latin par les termes hyrundo (ch. 43), loligo (ch. 51) (ou comme ici milagus) et milvus. Aristote (Arist. HA 535 b 28) ne décrit que le vol du poisson qu’il appelle χελιδών, en latin hyrundo : il s’agit de l’hirondelle de mer (Hirundichthys affinis Günther, 1866 ; voir D’Arcy Thompson 1947, 285-287 et 260-261). En revanche, Élien et Oppien mentionnent trois poissons volants : ils distinguent la χελιδών de la τευθίς, qui serait la loligo ou exocet volant, selon De Saint-Denis 1947, 58, mais aussi du ἱέραξ, « le faucon de mer », qui serait le miluus de Pline d’après D’Arcy Thompson 1947, 90, et De Saint-Denis 1947, 65. Or, celui-ci ajoute, d’après le détail descriptif donné par Ovide (Ov. hal. 95), qu’un seul poisson, l’hirondelle, a pu être désigné par les Anciens sous deux appellations, du fait du changement de coloration qui affecte ce poisson au cours de sa maturation. Ainsi, quatre termes différents, dont l’un – milago ou milagus – résulte d’une faute de copie, auraient été transmis depuis Pline pour ne désigner que deux poissons volants : l’hirondelle de mer (hyrundo et milvus) et l’exocet volant (lolligo et milago).
3Le miluus, « milan », est le nom employé par Pline pour désigner l’hirondelle de mer (Hirundichthys affinis Günther, 1886) ; mais dans le Speculum naturale, le milvus est identifié à la lucerna – peut-être l’uranoscope –, du fait d’une mélecture du texte de Pline.
4Le maquereau mesure en réalité environ 20 cm à un an et 30 cm à l’âge adulte (Muus & Nielsen 2005, 237-238), et non pas deux palmes, qui font un peu moins de 15 cm.
5Vincent de Beauvais n’a rien compris aux vers d’Ovide (Ov. rem. 797-798) : Daunius, an Libycis bulbus tibi missus ab oris, / An ueniat Megaris, noxius omnis erit, « L’oignon, qu’il soit Daunien, qu’il soit expédié des rivages de Lybie ou vienne de Mégare, est toujours mauvais pour toi » (Bornecque 1961, 38). Chez Ovide, Megaris n’est pas un nom de poisson, mais l’adjectif toponymique qui qualifie oris au même titre que Libycis.
6La lucerna est un animal non identifié, selon De Saint-Denis 1947, 59. D’Arcy Thompson 1947, 152, étudiant le nom grec λύκος synonyme du grec καλλιώνυμος, considère qu’il s’agit d’appellations différentes pour désigner l’uranoscopus, dont lucerna est le nom italien commun. Il cite à l’appui Plin. nat. 9, 82 et Plin. nat. 32, 149. Certains poissons, qui appartiennent cependant à d’autres familles, portent aussi le nom de lucerna. Parmi eux figure la Trigla lucerna Linné, 1758 ou Chelidonichthys lucernus Linné, 1758, le grondin perlon, autrement appelé hirondelle.
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1caput 54 1536.
2post milagine hab. et milvo VBd.
3Les modifications apportées par Vincent de Beauvais au texte de Thomas de Cantimpré sont minimes et ne changent pas le sens, sauf les deux dernières phrases (Est autem […] erit.), qui ont été ajoutées par Vincent de Beauvais.
4longitudine 1536.
5utilis 1536.
6Thomas de Cantimpré, consacrant un court paragraphe à la mulago, cite Isidore de Séville, puis commente la phrase, et c’est cette glose qui apparaît ici, dans la première operatio. Ainsi, le texte de Vincent de Beauvais, repris par l’Hortus sanitatis, est-il très proche de celui de Thomas de Cantimpré. Il a été remanié cependant, en comparaison avec le texte d’Isidore de Séville, de manière à différencier les deux marqueurs de citation.
7quae VBd.
8La citation de Pline trouvée chez Vincent de Beauvais a été fractionnée dans l’Hortus sanitatis.
9Vincent de Beauvais n’a pas compris le texte de Pline, peut-être du fait d’une mélecture de la ponctuation, si bien que milvus devient le sujet de subit, et que piscis lui est apposé, au lieu de désigner un autre poisson ou monstre marin. D’ailleurs, aucun autre poisson ou monstre marin n’est annoncé dans le titre du chapitre. Pour la même raison, milvus doit être le sujet d’attollit dans l’operatio C, bien que Pline lui-même juxtapose relucet et attollit et sous-entende le changement de sujet ; ce que De Saint-Denis 1955, 64, rend par « un autre élève hors de la mer […] ». Guillaume Rondelet, Libri de piscibus marinis, livre X, ch. 8, assimile de même le miluus et la lucerna. De fait, après avoir précisé que Pline appelle le ἱέραξ miluus siue miluago (a Plinio appellatur), il ajoute : A nostris lucerna quod noctu splendeat. Il décrit ensuite le miluus en en montrant les ressemblances avec le corbeau (coruus). Un peu plus loin, Rondelet dit encore : Quam nostri lucernam uocant, miluum.
10tranquillitas 1491 Prüss1.
11post attolit add. corva 1536.
12cornuta 1536.
13Dans Plin. nat. 9, 82 (cité en note de sources, ch. 55, 5), le sujet d’attollit est cornua, qui figure parmi les beluae dans Plin. nat. 32, 145. De Saint-Denis 1966b, 233-235, propose d’y voir un synonyme de bos, qui désigne la raie cornue. L’éditeur de 1536 a compris qu’il s’agissait de cet autre animal, si bien qu’il a suppléé ce terme comme sujet : Attollit corva […] sesquipedalia fere cornuta.
Annotations scientifiques
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