Salmo [le saumon1Il s’agit du saumon commun (Salmo salar Linné, 1758). Voir De
Saint-Denis 1947, 96.] et salpa [la
saupe2La saupe (Sarpa salpa Linné, 1758) est un
poisson osseux de conformation élancée, joliment strié de jaune dont
l’aimable apparence est trompeuse : agressif, ce poisson offre une
chair assez commune, qui est même toxique à certaines périodes de
l’année. Si l’Hortus sanitatis souligne le
caractère particulièrement coriace de sa chair, il est surtout connu
pour être difficile à appâter, du fait de son régime herbivore. Voir
De Saint-Denis 1947, 97 ; D’Arcy Thompson 1947, 224-225.]
[+][VB 17, 87 De salmone [-]][+]
Salmo et salpa [+][VB 17, 87 De salmone [-]][+]
Renvois internes : Salmo : cf. Eriox vel erox, ch. 35 ; Ezox,
ch. 37.
Lieux parallèles : Salmo
dans TC, De salmonibus (7, 69) ; AM, [Salmo] (24, 104
(51)).
Salpa dans TC, De salpa (7,
77) ; AM, [Salpa] (24, 112 (52)).
[1] [•] VB 17, 87, 1Physiologus. [•] AN 42Le saumon tire son nom de « saut » [saltus]. En effet, il recourbe sa queue en
s’aidant de sa bouche et, la maintenant fermement, il la replie,
jusqu’à pouvoir, par l’agilité de son saut, franchir la passe même
abrupte3C’est pendant
qu’il remonte les fleuves que le saumon fait preuve d’une habileté
et d’une énergie remarquables : ses sauts peuvent atteindre 3 m de
hauteur et lui permettent de franchir des chutes d’eau et d’autres
obstacles (voir Muus & Dahlström 2003, 52).. Mais il ne
se distingue guère par sa couleur ni sa saveur avant d’avoir goûté
l’eau de mer. Et gagnant l’océan, <il se ménage les moyens de
lutter> contre des eaux impétueuses, <et> il ne se
détourne pas de son objectif4Après être né en eau douce, le saumon suit le
courant du fleuve et gagne l’océan, où il trouve sa nourriture en
abondance et atteint son plein développement. Cependant, il doit
remonter le cours du fleuve pour frayer, et meurt souvent
d’épuisement après la ponte. C’est donc le périple à
contre-courant vers la source du fleuve qui témoigne de
l’obstination du saumon plutôt que son voyage vers la mer. Le
groupe contra fluminis impetum pose donc
problème à cet endroit de la phrase. Mais les observations un peu
déroutantes d’Alexandre Neckam s’expliquent par l’intention
allégorique de son œuvre. C’est moins l’obstination du saumon que
sa patiente prévoyance qu’il propose à l’admiration de ses
lecteurs chrétiens. Alexandre Neckam reconnaît une métaphore de
l’ascèse chrétienne dans les tribulations du saumon qui tire de sa
migration de descente et de son séjour dans l’océan les forces
nécessaires pour dominer un violent courant, tandis que les autres
poissons sont incapables de s’y opposer, faute d’un entraînement
préalable. tant qu’il n’a pas repris des forces <en
pleine mer>. Il regagne ensuite l’endroit qui lui est
familier.
[1] [•] VB 17, 87, 1Physiologus2On cherchera en vain une référence à ce
poisson dans le Physiologus. Il s’agit
d’un emprunt à AN 42. L’Hortus
sanitatis reproduit la citation d’Alexandre Neckam telle
qu’elle figure dans le Speculum
naturale avec des omissions qui obscurcissent le texte
original.. [•] AN 42
— Salmonem
a saltu nomen sumpisse autumant. Caudam enim ori replicat et
reflectit, firmiter eam ore tenens, dehinc saltus agilitate locum
etiam abruptum conscendit. […] Sed nec
coloris intensi gloria, nec saporis deliciis nobilitatur salmo,
antequam marinas aquas gustaverit. Ad mare igitur tendens contra
fluminis impetum sese praeparat, et a proposito non desistit,
usque dum salso reficiatur. Postea ad domicilia nota revertitur
victor, refectus amplius solito et longe jocundioris saporis.Salmo dicitur a saltu. Caudam enim ore replicat et
reflectit, firmiter eam ore tenens, donec saltus agilitate locum
etiam abruptum conscendit. Sed nec colore3color Prüss1. multum valet aut sapore antequam
gustaverit mare. Ad quod tendens contra fluminis impetum
<sese4sese — et addidimus ex AN. praeparat, et> a
proposito non desistit quousque <salo5salo addidimus ex
AN.> reficiatur. Deinde ad6et 1536. nota
domicilia7domicialia 1536. revertitur.
[2] [•] VB 17, 87, 2D’après le Liber de natura
rerum. [•] TC 7, 69,
2-6Le saumon est un poisson qui atteint une grande taille,
tant en largeur qu’en longueur. Il est vigoureux et robuste, mais
lourd et massif, et toute l’agilité dont il dispose provient de sa
puissance naturelle plutôt que de la légèreté de son corps. Comme
le dit Pline, il était autrefois préféré à tous les autres
poissons d’eau douce, et surtout en Aquitaine. [•] TC 7, 69, 18-19Sa
chair est rouge, et bien qu’elle soit savoureuse et tout à fait
délectable, elle rassasie vite ceux qui la consomment. [•] TC 7, 69, 6-9Ce
poisson se reproduit dans l’eau douce des étangs, mais il ne peut
pas y vivre longtemps s’il ne dispose pas d’un passage vers les
eaux douces des fleuves. Bien plus, lorsqu’il rencontre sur son
chemin un filet ou quelque obstacle de ce genre, il fait se
rejoindre sa tête et sa queue et, après avoir arqué son corps, il
s’élance dans les airs là où il veut aller.
[2] [•] VB 17, 87, 2Ex Libro de naturis rerum8Vincent de Beauvais a
repris presque intégralement la notice de Thomas de Cantimpré,
en modifiant seulement l’ordre des informations.. [•] TC 7, 69,
2-6Salmo piscis est in latitudinem9latitudinem… longitudinem : longitudinem…
latitudinem VBd. et longitudinem magnam excrescens. Robore quoque fortis
est, sed ponderosus et gravis omnisque10omnis 1536.
quam11quam om. Prüss1. habet
agilitas a potentia virtutis ejus est potiusquam a levitate
corporis. Hic, ut dicit Plinius12D’après Plin.
nat. 9, 68 : In Aquitania salmo fluuiatilis
marinis omnibus praefertur. L’expression piscibus fluvialibus (« poissons de rivière »)
est vraisemblablement une erreur de transcription du compilateur.
Pline comparait précisément le saumon, [piscis] fluuiatilis, aux
poissons de mer., olim praeferebatur omnibus piscibus
fluvialibus, et maxime in Aquitania. [•] TC 7, 69, 18-19Carnes ejus rubeae
sunt, quae, licet dulces et gratae13grates 1491 Prüss1 1536 VB2. sint
valde, tamen satietatem cito manducantibus ingerunt. [•] TC 7, 69, 6-9Piscis iste fetus facit ; nec diu vivere potest in aquis
dulcibus stagnorum nisi liberum habeat transitum ad dulces undas
fluviorum. Quin etiam ubi in transitu sepem14sepe Prüss1 1536. vel aliquid hujusmodi
obstaculum invenerit, caput caudae conjungit flexoque corpore
pervolat ad optata.
[3] [•] VB 17, 87, 2 Nota HSDans le livre cité précédemment. [•] TC 7, 77,
1-3La saupe est un poisson immonde5Aristote précise que la saupe est attirée par
l’odeur des excréments, dont elle se régale (Arist. HA 534 a 15-16). et bon
marché. Elle présente cette singularité qu’on n’arrive jamais à la
cuire si on ne l’a pas, auparavant, battue énergiquement avec un
bâton ou une baguette.
[3] [•] VB 17, 87, 2 compil.In15in — supra non hab.
VB. libro ut supra16Le texte de Thomas de Cantimpré est
recopié à l’identique. Il ne manque que la référence à Pline
(Plin. nat. 9, 68) : Salpa […] obscenus alibi
et qui nusquam percoqui possit nisi ferula uerberatus.
Voir Ath. 321 d ; Ov. hal. 121.. [•] TC 7, 77,
1-3Salpa piscis est obscenus et vilis. Hic miraculum sui
praebet, ut numquam decoqui possit nisi prius fortiter fuste vel
ferula verberetur.
~
1Il s’agit du saumon commun (Salmo salar Linné, 1758). Voir De
Saint-Denis 1947, 96.
2La saupe (Sarpa salpa Linné, 1758) est un
poisson osseux de conformation élancée, joliment strié de jaune dont
l’aimable apparence est trompeuse : agressif, ce poisson offre une
chair assez commune, qui est même toxique à certaines périodes de
l’année. Si l’Hortus sanitatis souligne le
caractère particulièrement coriace de sa chair, il est surtout connu
pour être difficile à appâter, du fait de son régime herbivore. Voir
De Saint-Denis 1947, 97 ; D’Arcy Thompson 1947, 224-225.
3C’est pendant
qu’il remonte les fleuves que le saumon fait preuve d’une habileté
et d’une énergie remarquables : ses sauts peuvent atteindre 3 m de
hauteur et lui permettent de franchir des chutes d’eau et d’autres
obstacles (voir Muus & Dahlström 2003, 52).
4Après être né en eau douce, le saumon suit le
courant du fleuve et gagne l’océan, où il trouve sa nourriture en
abondance et atteint son plein développement. Cependant, il doit
remonter le cours du fleuve pour frayer, et meurt souvent
d’épuisement après la ponte. C’est donc le périple à
contre-courant vers la source du fleuve qui témoigne de
l’obstination du saumon plutôt que son voyage vers la mer. Le
groupe contra fluminis impetum pose donc
problème à cet endroit de la phrase. Mais les observations un peu
déroutantes d’Alexandre Neckam s’expliquent par l’intention
allégorique de son œuvre. C’est moins l’obstination du saumon que
sa patiente prévoyance qu’il propose à l’admiration de ses
lecteurs chrétiens. Alexandre Neckam reconnaît une métaphore de
l’ascèse chrétienne dans les tribulations du saumon qui tire de sa
migration de descente et de son séjour dans l’océan les forces
nécessaires pour dominer un violent courant, tandis que les autres
poissons sont incapables de s’y opposer, faute d’un entraînement
préalable.
5Aristote précise que la saupe est attirée par
l’odeur des excréments, dont elle se régale (Arist. HA 534 a 15-16).
~
1caput 78 1536.
2On cherchera en vain une référence à ce
poisson dans le Physiologus. Il s’agit
d’un emprunt à AN 42. L’Hortus
sanitatis reproduit la citation d’Alexandre Neckam telle
qu’elle figure dans le Speculum
naturale avec des omissions qui obscurcissent le texte
original.
3color Prüss1.
4sese — et addidimus ex AN.
5salo addidimus ex
AN.
6et 1536.
7domicialia 1536.
8Vincent de Beauvais a
repris presque intégralement la notice de Thomas de Cantimpré,
en modifiant seulement l’ordre des informations.
9latitudinem… longitudinem : longitudinem…
latitudinem VBd.
10omnis 1536.
11quam om. Prüss1.
12D’après Plin.
nat. 9, 68 : In Aquitania salmo fluuiatilis
marinis omnibus praefertur. L’expression piscibus fluvialibus (« poissons de rivière »)
est vraisemblablement une erreur de transcription du compilateur.
Pline comparait précisément le saumon, [piscis] fluuiatilis, aux
poissons de mer.
13grates 1491 Prüss1 1536 VB2.
14sepe Prüss1 1536.
15in — supra non hab.
VB.
16Le texte de Thomas de Cantimpré est
recopié à l’identique. Il ne manque que la référence à Pline
(Plin. nat. 9, 68) : Salpa […] obscenus alibi
et qui nusquam percoqui possit nisi ferula uerberatus.
Voir Ath. 321 d ; Ov. hal. 121.