CARCAUD, LIARD 2005 : Carcaud N., Liard M. — La cyclicité des flux sédimentaires depuis la protohistoire dans le vallon de Rigny (Indre-et-Loire), in C. Petit (dir.), Occupation et gestion des plaines alluviales dans le Nord de la France de l’âge du Fer à l’époque gallo-romaine, Actes de la table-ronde de Molesme, 17-18 septembre 1999, Presses universitaires de Franche-Comté, Besançon, 2005 : 143-156.
LIARD 1997 : Liard M. — Le vallon de Rigny, approche morphodynamique alliée aux recherches archéologiques du site de l’église Notre Dame de Rigny. Mémoire de maîtrise de Géographie, Département de Géographie, Faculté des Sciences, Université d’Angers, 1997.
ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 2001 : Zadora-Rio É., Galinié H. et al. — La fouilles du site de Rigny, 7e-19e s. : l’habitat, les églises, le cimetière. Troisième et dernier rapport préliminaire (1995-1999), Revue Archéologique du Centre de la France, 40, 2001 : 167-242. (http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/racf_0220-6617_2001_num_40_1_2879)
LIARD 2001 : Liard M. — Étude de la dynamique sédimentaire, in ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 2001 : 220-223).
LIARD et al. 2002 : Liard M., Vivent D., Carcaud N., Zadora-Rio É., Galinié H. — Étude des interactions Hommes/Milieux dans le vallon de Rigny (Indre-et-Loire) : approches pluridisciplinaires, in Richard H. et Vignol A. (dir.), Équilibres et ruptures dans les écosystèmes durant les 20 derniers millénaires en Europe de l’Ouest, Actes du colloque international (Besançon, 18-20 sept. 2000), Besançon, 2002 : 255-267.
LIARD 1998 : Liard M. — Colluvionnement et anthropisation en site archéologique, le cas du site de l’église Notre Dame de Rigny. Mémoire de DEA de l’INA Paris-Grignon, Formation doctorale Archéologie et Environnement, Maison de l’Archéologie et de l’Ethnologie, Nanterre, 1998.
ZADORA-RIO 1992 : Zadora-Rio É. — De la paroisse à la commune : espaces et pouvoirs, in ZADORA-RIO, THOMAS, JOUQUAND 1992 : 13-38
BOUTIN 1992 : Boutin D. — L’environnement pédo-géomorphologique, in ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 1992 : 78-80.
Chapitre 1 – L’environnement du site et ses contraintes
Par
1.1 Le contexte géomorphologique
1L’église est située au fond d’un vallon qui constitue un petit bassin versant de rang 1, d’orientation SSE-NW, affluent de rive gauche de la vallée de l’Indre et de la Loire (Fig. 5).
2Celle-ci est enserrée entre des coteaux crayeux formés de tuffeau jaune et de craie micacée du Turonien. Des formations de la fin du Crétacé (sables et argiles à spongiaires du Sénonien) recouvrent le tuffeau, et des sables éoliens et des limons se sont déposés au Quaternaire sur les plateaux. La géomorphologie du vallon de Rigny, marquée par des versants au profil dissymétriques et abrupts et par un profil en long du ruisseau en pente forte, a conditionné la mise en place des formations superficielles. Les éléments du substrat ayant le plus nettement influencé les formations de versant et de fond de vallon sont les limons des plateaux et les sables roux du Sénonien, qui ont colluvionné sur les versants, et dans une moindre mesure, les argiles à spongiaires. La topographie du site, enserré entre des versants abrupts, mal exposé, pauvre en surfaces planes et soumis aux flux de colluvions du versant, est contraignante (CARCAUD, LIARD 2005 ; LIARD 1997).
1.2 Le remblaiement colluvio-alluvial du ruisseau de Rigny
3Des tronçons de paléochenaux — bras morts ou anciens méandres du ruisseau — ont été mis au jour par la fouille, sans que leur tracé ait pu être reconstitué. L’un d’eux, qui a pu être observé sur quelques mètres carrés dans l’emprise de la fouille, sous les sépultures médiévales au nord de l’église, était orienté SO-NE, et disparaissait sous le mur de la nef : l’église, dans son dernier état tout au moins, barrait le chenal et scellait son comblement. Celui-ci était constitué de limons et de sables et, dans sa partie supérieure, d’un dépotoir domestique redéposé contenant une quantité importante de tessons datés entre la fin du 8e et la fin du 9e s. (ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 2001 : 172-173). Un sondage profond1 effectué à l’emplacement même de ce paléochenal dans l’emprise de la fouille (Fig. 6) a révélé que l’épaisseur des formations superficielles en fond de vallon atteint 3 m au-dessus de la craie micacée du Turonien moyen (C3b) (LIARD 2001 : 221-223).
4D’après les datations par le radiocarbone obtenues sur deux échantillons de bois, le remblaiement colluvio-alluvial du ruisseau commence au plus tard au premier âge du Fer avec un remplissage sablo-graveleux (charge grossière). L’augmentation progressive des fractions fines (limon et argile) dans les phases suivantes traduit une stabilisation du milieu. Les analyses palynologiques ont révélé, au premier âge du Fer, un paysage de prairies (Poaceae, Asteroideae, Cichorioideae) très humides (nombreuses hygrophytes et fougères) en fond de vallon et une chênaie assez développée, sans doute située sur les plateaux. La présence de cultures et d’essences rudérales atteste une occupation humaine qui semble peu importante. Les phases suivantes indiquent un déclin de la chênaie et une extension des prairies. Vers le sommet de la séquence celles-ci apparaissent moins humides (régression faible des hygrophytes et massive des fougères) tandis qu’on observe une augmentation marquée du groupe des cultures (Cerealia, Centaurea) et des rudérales (Chenopodiaceae, Urtica, Rumex et Plantaginaceae) (LIARD et al. 2002).
5Les analyses micromorphologiques effectuées au cours de la fouille ont révélé l’absence de déplacements brutaux de matériaux provenant du versant (coulées de sables et d’argiles) : il s’agit d’un apport progressif de particules de sols, reprises parfois lors de ruissellements de surface. Le processus de colluvionnement a permis l’accumulation, entre le 7e siècle et l’actuel, de plusieurs mètres de sédiment, selon une dynamique constante, comme l’indique la granularité des couches qui est semblable de bas en haut de la stratification du site (LIARD 1998 ; LIARD 2001 : 220).
6Si les résultats des études paléo-environnementales indiquent l’absence d’épisodes catastrophiques, les données de la fouille montrent que la lutte contre les colluvions n’en a pas moins exercé une contrainte forte et permanente sur les habitants, comme en témoignent les décaissements répétés et la construction de nombreux murs de terrasse et aménagements divers depuis le haut Moyen Âge jusqu’au 19e siècle.
1.3 Les chemins d’accès à l’église
7Avant la canalisation du ruisseau de Rigny et la construction en 1843 de la route qui longe le talweg, le vallon était impraticable une grande partie de l’année et l’accès principal à l’église de Rigny, depuis le village d’Ussé, se faisait par le plateau, en suivant un chemin encore appelé « Chemin de la messe », qui descendait la pente jusqu’au fond du vallon en longeant le cimetière, et qui est représenté sur le plan cadastral de 1813 (Fig. 7) (ZADORA-RIO 1992 : 36). Il est encore visible actuellement le long du versant sous la forme d’un chemin creux (Fig. 8).
8Bien que sa mise en place ne soit pas datée, il semble avoir constitué une limite pérenne de la zone d’inhumation tout au long de son usage : un sondage archéologique (zone 4, secteur 18) a montré en effet que les sépultures ne s’étendaient pas au-delà vers le sud ( Section 5, P0/2, *Limite sud). Un embranchement de ce chemin creux conduisait à l’église en traversant le cimetière selon un axe SO-NE. Plusieurs états de ce chemin ont été identifiés au cours de la fouille et ont montré que sa mise en place n’est pas antérieure au 15e siècle. Lors de la construction, dans la seconde moitié du 18e siècle, de la clôture du Grand et du Petit cimetière, il a été déplacé vers le nord, au-delà du mur ( Section 5, P0/24 ).
9L’accès de l’église, dont le portail occidental s’ouvrait face au versant, au débouché du chemin creux qui canalisait les eaux de pluie, a nécessité des aménagements successifs destinés à arrêter les colluvions qui venaient obstruer l’entrée.
10L’accumulation progressive des colluvions a entraîné, au cours de l’occupation du site, un exhaussement de la nappe phréatique qui a conduit à condamner une probable crypte sous l’église à laquelle donnait accès un escalier situé dans la croisée du transept. La présence de l’eau, qui baigne les dernières marches, a donné naissance à la tradition d’une « fontaine miraculeuse » attestée depuis le 19e siècle (BOUTIN 1992 : 80 ; ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 1992 : 101 ; ZADORA-RIO, GALINIÉ et al. 2001 : 189).
1. | Ce carottage, qui a fait l’objet d’une étude palynologique et granulométrique, a été réalisé dans le cadre du PCR « Géoarchéologie de la Loire moyenne et de ses marges » coordonné par Nathalie Carcaud. |