Chapitre 56
Capitulum
LVI1caput 55 1536.
Mugilus [le muge1Mugil, dont mugilus est la forme thématisée, est le terme
générique latin pour désigner le muge, mais celui dont on vante ici
l’agilité est le Mugil saliens Risso, 1810, ou
Liza saliens Risso, 1810. Trois
genres de mugilidae fréquentent les zones
côtières de la Méditerranée : mugil, liza et chelon, et c’est
plus particulièrement le liza saliens qui est
sauteur. C’est aussi l’identification qu’en donnent De Saint-Denis
1947, 67, et D’Arcy Thompson 1947, 108. ] [+][VB 17,
67 De
mugili [-]][+]
Mugilus2mugil 1536. [+][VB 17, 67 De mugili3mugile VBd. [-]][+]
Renvois internes : Mugilus : cf. Ahuna, ch. 11 ; Chilon, ch. 21 ; Corez,
ch. 24 ; Fastaleon, ch. 39 ; Kalaoz, ch. 45.
Lieux parallèles : TC, De
mugilo (7, 50) ; AM, [Mugilus] (24, 75
(42)).
[1] [•] VB 17, 67, 1Isidore. [•] Isid. orig. 12, 6, 26Le mulet tire son nom de sa grande agilité. En effet, quand
il a senti le piège installé par les pêcheurs, il revient
sur-le-champ en arrière et franchit le filet d’un tel bond qu’on
croirait voir voler le poisson.
[1] [•] VB 17, 67, 1Isidorus. [•] Isid. orig. 12, 6, 26
— Mugilis
nomen habet quod sit multum agilis. Nam ubi dispositas senserit
piscatorum insidias, confestim retrorsum rediens ita transilit
rete ut uolare piscem uideas.Mugilus4mugil
1536 mugilis VBd. ex eo nomen habet quod sit multum
agilis5Pour
l’étymologie de mugil, proprement « le
visqueux », voir De Saint-Denis 1947, 66, et André 1986, 197,
n. 368.. Nam, ubi dispositas senserit piscatorum insidias,
confestim retrorsum rediens ita rete transilit ut volare piscem
videas.
[2] [•] VB 17, 67, 2Pline, livre 9. [•] Plin. nat. 9,
59On se gausse du caractère des mulets, qui, se cachant la tête quand ils sont apeurés,
se croient dissimulés tout entiers2Voir De Saint-Denis 1947, 67 : « […] à vrai
dire, les mulets, très friands d’eau saumâtre et de matières
mucilagineuses, aiment à fouiller la vase, à y creuser des
sillons, pour la malaxer à l’aide de leurs dents pharyngiennes et
rejeter ensuite les parties qui ne sont pas
assimilables ».. Cependant, ils sont d’une telle affabilité
qu’en Phénicie et dans la Narbonnaise, au temps de l’accouplement,
on lâche dans la mer un mâle provenant des viviers et attaché aux
ouïes par une longue ligne qui passe par la bouche ; à l’aide de
la ligne, on le ramène au point de départ ; les femelles le
suivent jusqu’au rivage ; et réciproquement les mâles suivent la
femelle à l’époque du frai. [•] Plin.
nat. 9, 29C’est en Narbonnaise, sur
le territoire de Nîmes, dans un étang appelé Laterna, qu’hommes et dauphins s’associent pour pêcher le mulet. [•] Plin.
nat. 9, 185Le mulet et le loup sont enflammés d’une haine réciproque3Les deux poissons vivent aussi
en bonne intelligence à certaines époques de l’année (voir Lupus marinus, ch. 54, 4).. [•] Plin. nat. 9, 54Les mulets, lorsqu’ils craignent l’attaque d’autres
poissons, sautent à bord des navires et font preuve d’une vélocité
si exceptionnelle qu’ils bondissent parfois par-dessus les
vaisseaux.
[2] [•] VB 17, 67, 2Plinius libro IX. [•] Plin. nat. 9, 59
— Mugilum
natura ridetur in metu capite abscondito totos se occultari
credentium. Isdem tam incauta salacitas ut in Phoenice et
Narbonensi prouincia coitus tempore e uiuariis marem linea
longinqua per os ad branchias religata emissum in mare eademque
linea retractum feminae sequantur ad litus rursusque feminam mares
partus tempore.Mugi[Prüss1/vue 28] lum
natura ridetur, in metu capite abscondito totos se occultare
credentium. Iisdem tamen tanta facilitas6salacitas corr. 1536 ex Plin.7Nous avons
maintenu la leçon facilitas donnée par
l’édition princeps et celle de Prüss1, fidèles au texte de Vincent de Beauvais. On ne
voit pas pourquoi Vérard traduit par « legierete ». En revanche,
l’éditeur de 1536 a corrigé par salacitas,
« lubricité », dont le sens correspond à l’explication donnée dans
la suite de la phrase. La tradition manuscrite de l’Histoire naturelle porte facilitas, corrigée en salacitas par Johannes Caesarius. Comme
l’indique De Saint-Denis 1955, 116, § 59, n. 1, Pline s’inspire
d’Aristote (Arist. HA 591 b 3-4 et Arist. HA 541 a 19-22). ut in
Phoenice et Narbonensi provincia, coitus tempore, e vivariis
marem8mare 1491 Prüss1.,
linea longinqua per os ad branchias religata, emissum in mare
eodemque9eademque 1536 VB. linea retractum feminae
sequantur ad litus rursusque feminam mares partus tempore. [•] Plin. nat. 9, 29
— Est prouinciae Narbonensis
et in Nemausiensi agro stagnum Latera appellatum, ubi cum homine
delphini societate piscantur.In
Narbonensis10narbonensi
1536 VBd.
provinciae11provincia 1536 VBd. et in
Nemausiensi12nemusiensi
1491 Prüss1 VB.
agro, stagno13stagno…
appellato : stagnum… appellatum corr. 1536 ex
Plin. scilicet14scilicet del. 1536 ex Plin. Laterna15La
tradition manuscrite est incertaine : latera DFRd1a : laterna E2slV laterra d2. Cet étang a été
identifié par De Saint-Denis 1955, 106, § 29, n. 1, comme
« l’étang de Lattes, près de Palavas (Hérault) ».
appellato, ubi homines delphini societate et mugilum16et
mugilum del. 1536 ex Plin.17Et
mugilum est un ajout au texte de Pline, qui ne fait que
renforcer l’aspect chaotique de la syntaxe de cette phrase. Si on
s’interroge sur le type de déclinaison à laquelle appartient le
substantif, on remarque qu’il est plusieurs fois thématique dans
l’édition princeps et dans l’édition de
Prüss1 (mugilus, i, m.), consonantique dans 1536 (mugil, gilis, m.),
sonantique dans VB (mugilis, is, m.). piscantur18post piscantur add. innumera vis mugilum statuto tempore
angustis faucibus stagni in mare erumpit, observata aestus
recipocatione (sic) 1536
ex Plin.19L’addition
faite par l’édition de 1536 après piscantur
(voir l’apparat critique) est conforme à la suite du texte de
Pline, à l’exception de statuto substitué à
stato.. [•] Plin. nat. 9, 185
— Mugil
et lupus mutuo odio flagrant.Mugilus et lupus odio flagrant mutuo. [•] Plin. nat. 9, 54
— Quod
et alias faciunt aliorum uim timentes mugiles maxime, tam
praecipuae uelocitatis ut transuersa nauigia interim
superiaciant.Mugiles aliorum piscium vim timentes, super naves
exiliunt et tam praecipuae velocitatis20Sur la rapidité des mulets, voir encore
Plin.
nat. 9, 144, qui traduit Arist. HA 620
b 24-25. sunt ut transversa navigia interim
superjactent21L’apparat de De Saint-Denis 1955 à Plin. nat. 9, 54 fait
état des variantes : superiaciant May. cf.
VII, 21 -iactant DFda -iactent ExlnV..
[3] [•] VB 17, 67, 4Le même, livre 32. [•] Plin. nat. 32,
12Le mulet sait qu’il y a sous l’appât un hameçon et il n’est
pas ignorant de l’embûche. Il est si gourmand qu’en fouettant la
proie de sa queue, il la décroche.
[3] [•] VB 17, 67, 4Idem libro22ante libro hab. in VB.
XXXII23XXXVII Prüss1.. [•] Plin. nat. 32, 12
— Scit et
mugil esse in esca hamum insidiasque non ignorat, auiditas tamen
tanta est ut cauda uerberando excutiat cibum.Mugil scit in esca hamum esse atque insidias non
ignorat. Tanta24post tanta hab. tamen
VB. est ei aviditas ut cauda
verberando cibos excutiat.
[4] [•] VB 17, 67, 5Iorach. [•] TC 7, 50,
1-6Le mulet est un poisson très rapide, qui vit dans les
rivières, mais il est imprudent par nature. En effet, on se gausse
de sa sottise, lorsque, se cachant la tête quand il est apeuré, il
croit que son corps tout entier est dissimulé et en sécurité. Son
hostilité pour le brochet ne se manifeste que l’hiver, et on pense que la
raison en est que la nourriture pour laquelle ils se battent est
peu abondante en cette saison. En été, en revanche, il y en a une
grande quantité : pour cette raison, ils se réconcilient alors
l’un avec l’autre4Pline ne
dit rien des relations qu’entretiennent le mulet et le brochet. Il
semble qu’il y ait eu une confusion entre le lucius (brochet) et le loup (voir Lupus marinus, ch. 54, 4)..
[4] [•] VB 17, 67, 5Jorath25Le marqueur semble erroné. Ce que dit
Iorach du mulet (mugil) est très
différent de ce dont témoigne l’Hortus
sanitatis. Voir Iorach, cité par Arnold de Saxe (AS 2, 7,
26d) : Et mugilis piscis, nisi gravidus
fuerit, cum senserit piscatorum retia, volatu suo evadit
ea. Voir aussi Etzkorn 2005, 439. En revanche, à quelques
différences près, qui relèvent surtout de l’ordre des mots, on
retrouve le texte de Thomas de Cantimpré, comparable
également, pour les informations descriptives, à celui
d’Albert le Grand. Thomas de Cantimpré dit aussi de l’ahuna (ch. 11) qu’il cache sa tête par peur
du danger.. [•] TC 7, 50,
1-6Mugilus26mugil
1536 mugilis VB. est piscis velocissimus in aquis fluvialibus, sed
naturaliter incautus. Nam deridetur ejus stultitia, cum in metu
capite absconso totum corpus absconsum ac securum credit. Hic cum
lucio inimicitias habet hieme tantum, et hujusmodi causa
creditur quia tunc rarus est cibus pro quo dimicant. Aestate vero
abundat27abundant VBd., et ideo
tunc28tunc om. Prüss1 1536. ad
concordiam rediguntur.
Propriétés et
indications
Operationes29operationes — liberat om. 1491.
[5] [•] VB 17, 67, 6A. Pline, livre 32. [•] Plin. nat. 32,
104La cendre de la tête des mulets et des surmulets guérit la goutte sciatique.
[5] [•] VB 17, 67, 6A. Plinius libro XXXII. [•] Plin. nat. 32, 104
— Ischiadicos
liberant salsamenta e siluro infusa clysterio, euacuata prius
aluo, sedis attritus cinis e capite mugilum et mullorum ;
comburuntur autem in fictili uase, inlini cum melle debent.Cinis e capite mugilum et mulorum sciaticos30schiaticos VB2 ischiaticos VBd. liberat.
~
1Mugil, dont mugilus est la forme thématisée, est le terme
générique latin pour désigner le muge, mais celui dont on vante ici
l’agilité est le Mugil saliens Risso, 1810, ou
Liza saliens Risso, 1810. Trois
genres de mugilidae fréquentent les zones
côtières de la Méditerranée : mugil, liza et chelon, et c’est
plus particulièrement le liza saliens qui est
sauteur. C’est aussi l’identification qu’en donnent De Saint-Denis
1947, 67, et D’Arcy Thompson 1947, 108.
2Voir De Saint-Denis 1947, 67 : « […] à vrai
dire, les mulets, très friands d’eau saumâtre et de matières
mucilagineuses, aiment à fouiller la vase, à y creuser des
sillons, pour la malaxer à l’aide de leurs dents pharyngiennes et
rejeter ensuite les parties qui ne sont pas
assimilables ».
3Les deux poissons vivent aussi
en bonne intelligence à certaines époques de l’année (voir Lupus marinus, ch. 54, 4).
4Pline ne
dit rien des relations qu’entretiennent le mulet et le brochet. Il
semble qu’il y ait eu une confusion entre le lucius (brochet) et le loup (voir Lupus marinus, ch. 54, 4).
~
1caput 55 1536.
2mugil 1536.
3mugile VBd.
4mugil
1536 mugilis VBd.
5Pour
l’étymologie de mugil, proprement « le
visqueux », voir De Saint-Denis 1947, 66, et André 1986, 197,
n. 368.
6salacitas corr. 1536 ex Plin.
7Nous avons
maintenu la leçon facilitas donnée par
l’édition princeps et celle de Prüss1, fidèles au texte de Vincent de Beauvais. On ne
voit pas pourquoi Vérard traduit par « legierete ». En revanche,
l’éditeur de 1536 a corrigé par salacitas,
« lubricité », dont le sens correspond à l’explication donnée dans
la suite de la phrase. La tradition manuscrite de l’Histoire naturelle porte facilitas, corrigée en salacitas par Johannes Caesarius. Comme
l’indique De Saint-Denis 1955, 116, § 59, n. 1, Pline s’inspire
d’Aristote (Arist. HA 591 b 3-4 et Arist. HA 541 a 19-22).
8mare 1491 Prüss1.
9eademque 1536 VB.
10narbonensi
1536 VBd.
11provincia 1536 VBd.
12nemusiensi
1491 Prüss1 VB.
13stagno…
appellato : stagnum… appellatum corr. 1536 ex
Plin.
14scilicet del. 1536 ex Plin.
15La
tradition manuscrite est incertaine : latera DFRd1a : laterna E2slV laterra d2. Cet étang a été
identifié par De Saint-Denis 1955, 106, § 29, n. 1, comme
« l’étang de Lattes, près de Palavas (Hérault) ».
16et
mugilum del. 1536 ex Plin.
17Et
mugilum est un ajout au texte de Pline, qui ne fait que
renforcer l’aspect chaotique de la syntaxe de cette phrase. Si on
s’interroge sur le type de déclinaison à laquelle appartient le
substantif, on remarque qu’il est plusieurs fois thématique dans
l’édition princeps et dans l’édition de
Prüss1 (mugilus, i, m.), consonantique dans 1536 (mugil, gilis, m.),
sonantique dans VB (mugilis, is, m.).
18post piscantur add. innumera vis mugilum statuto tempore
angustis faucibus stagni in mare erumpit, observata aestus
recipocatione (sic) 1536
ex Plin.
19L’addition
faite par l’édition de 1536 après piscantur
(voir l’apparat critique) est conforme à la suite du texte de
Pline, à l’exception de statuto substitué à
stato.
20Sur la rapidité des mulets, voir encore
Plin.
nat. 9, 144, qui traduit Arist. HA 620
b 24-25.
21L’apparat de De Saint-Denis 1955 à Plin. nat. 9, 54 fait
état des variantes : superiaciant May. cf.
VII, 21 -iactant DFda -iactent ExlnV.
22ante libro hab. in VB.
23XXXVII Prüss1.
24post tanta hab. tamen
VB.
25Le marqueur semble erroné. Ce que dit
Iorach du mulet (mugil) est très
différent de ce dont témoigne l’Hortus
sanitatis. Voir Iorach, cité par Arnold de Saxe (AS 2, 7,
26d) : Et mugilis piscis, nisi gravidus
fuerit, cum senserit piscatorum retia, volatu suo evadit
ea. Voir aussi Etzkorn 2005, 439. En revanche, à quelques
différences près, qui relèvent surtout de l’ordre des mots, on
retrouve le texte de Thomas de Cantimpré, comparable
également, pour les informations descriptives, à celui
d’Albert le Grand. Thomas de Cantimpré dit aussi de l’ahuna (ch. 11) qu’il cache sa tête par peur
du danger.
26mugil
1536 mugilis VB.
27abundant VBd.
28tunc om. Prüss1 1536.
29operationes — liberat om. 1491.
30schiaticos VB2 ischiaticos VBd.