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Pensées 110 à 114

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

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Pensées, volume I

110

J’avoüe mon goût pour les anciens cette antiquité m’enchante[1], et je suis toujours porté a dire avec Pline, c’est a Athenes ou vous allés respectés leurs dieux[2]

- - - - -

Main principale D

111

J’aime a voir les querelles des anciens et des modernes, cela me fait voir qu’il y a de bons ouvrages parmi les anciens et les modernes[1]

- - - - -

Main principale D

112

Il y a dans le sistême[1] des juifs beaucoup d’aptitude pour le

Systeme des juifs

sublime[2] {p.105} parce qu’ils avoient coutume d’attribuer toutes leurs pensées et toutes leurs actions a des inspirations particulieres de la divinité, ce qui leur donnoit un tres grand agent, mais quoi que Dieu y paroisse agir comme un etre corporel aussi bien que dans le sistême payen

Systeme payen

, cependant il ne paroit agité que de certaines passions ce qui ôte non seulement le gracieux mais encore la varieté du sublime et d’ailleurs un agent unique ne peut donner de varieté, il laisse a l’imagination un vuide etonnant au lieu de ce plein que formoit un nombre inombrables de divinités payennes.
Le sistême chretien

Relig. chretienne

(je me sers de ce terme tout impropre qu’il est) en nous donnant des idées plus saines de la divinité, semble nous donner un plus grand agent {p.106} mais comme cet agent ne permet ni n’éprouve aucune passion, il faut necessairement que le sublime y tombe d’ailleurs les mysteres sont plutôt sublimes pour la raison que pour les sens[3], et c’est des sens et de l’ima l’imagination qu’il s’agit dans les ouvrages d’esprit.
Mais ce qui acheve de perdre le sublime parmi nous et nous empêche de fraper et d’etre frapés c’est cette nouvelle philosophie

Nouvelle philosophie

qui ne nous parle que de loix generales et nous ôte de l’esprit toutes les pensées particulieres de la divinité reduisant tout à la communication des mouvemens, elle ne parle que d’entendement pur, d’idées claires, de raison, de principes de consequences cette philosophie qui est decenduë jusqu’a ce sexe qui ne ne semble etre fait que pour l’imagination[4] diminuë le gout que l’on a naturellement {p.107} pour la poesie, ce seroit bien pis si quelque peuple alloit s’infatuer du sistême de Spinosa[5], car outre qu’il n’y auroit point de sublime dans l’agent il n’y en auroit pas seulement dans les actions.

- - - - -

Main principale D

113

D’affreuses maladies inconnuës a nos peres ont attaqué la nature humaine jusque dans la source de la vie et des plaisirs[1],

J’ay mis cela dans ma Difference des genies.[2]

on a vû les grandes familles d’Espagne qui avoient echapé a tant de siecles perir presque toutes de nos jours, ravage que la guerre n’a point fait et qui ne doit etre attribué qu’a un mal trop commun pour etre honteux et qui n’est plus que funeste[3].

- - - - -

Les plaisirs & la santé

Les plaisirs de et la santé sont devenus presque incompatibles, les peines de l’amour tant chantées par les anciens poëtes ne sont plus les rigueurs ou l’inconstance d’une { p108} maitresse, le tems a fait naitre d’autres dangers, et l’Apollon de nos jours est moins le dieu des vers que celui de la medecine.

- - - - -

Main principale D

114

Homere

Homere n’a eté theologien que pour etre poëte[1]

- - - - -

Main principale D


110

n1.

Cf. nº 117. Dans la seconde phase de la Querelle des Anciens et des Modernes (1714-1716), c’est aux partisans des Anciens de démontrer que les œuvres de l’Antiquité sont encore dignes d’être lues (Noémi Hepp, Homère en France au XVIIe siècle, Paris, Klincksieck, 1968, p. 708 et suiv. ; Christophe Martin, « Une apologétique “moderne” des Anciens : la Querelle dans les Pensées », RM, nº 7, 2004, p. 67-83).

110

n2.

Montesquieu traduit librement un passage de Pline (Épîtres, VIII, 24 ; [Genève], P. Stephanus, 1600 – Catalogue, nº 2301) : « […] te missum in provinciam Achaiam, […] reverere conditores deos […] ».

111

n1.

La remarque, recopiée ci-après (nº 171), sera développée pour opposer à la critique et aux querelles littéraires pleines de prévention, la tendance de l’auteur à ne considérer, dans les ouvrages, que l’admirable (nº 1315). Usbek jugeait la Querelle futile (LP, 34 [36], p. 226-227). L’impartialité exprimée ici correspond à un renouvellement des mentalités (voir Noémi Hepp, Homère en France au XVIIe siècle, Paris, Klincksieck, 1968, p. 759).

112

n1.

Le mot système est employé ici au sens de doctrine (voir nº 118 et 132).

112

n2.

Les articles nº 112 à 116 sont des éléments d’une réflexion sur les rapports entre religion, mœurs et poésie, peut-être conçue d’abord pour les Lettres persanes, développée dans un ensemble intitulé « Réflexions sur les premières histoires » (nº 1601-1608) et à rapprocher du manuscrit 2519 (BM Bordeaux, reproduit dans LP, p. 594-597).

112

n3.

Cf. nº 109 : les mystères des chrétiens consistent « dans une soumission aveugle de la raison à de certaines vérités révélées ».

112

n4.

La philosophie cartésienne est diffusée auprès d’un public mondain et féminin, par le biais d’ouvrages comme les Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle [1686].

112

n5.

Ce système est alors assimilé à l’athéisme.

113

n1.

Cf. Spicilège, nº 218, où l’expression est attribuée à Mézeray (Abrégé chronologique, ou Extrait de l’histoire de France [1608], Paris, T. Jolly, 1667, II, p. 651 – Catalogue, nº 3010 et 3011, éd. de 1668, 1690).

113

n2.

Cf. C. Volpilhac-Auger, « La dissertation Sur la différence des génies, essai de reconstitution », RM, nº 4, 2000, p. 230 ; voir nº 6, note 1.

113

n3.

Cette remarque s’inscrivait dans une opposition entre la gaieté du monde païen et les fléaux présents, ce dont témoigne une transcription tardive (écriture P, 1748-1750) du passage (« On a vu […] funeste », nº 1606). Reprise dans L’Esprit des lois, elle illustre l’utilité des lois destinées à empêcher la communication de certaines maladies (XIV, 11). Sur l’extension de la syphilis, voir aussi LP, 102 (105), p. 417, l. 24-25, et 109 (113), p. 436, l. 19-21 ; nº 216.

114

n1.

Pour Anne Dacier, comme pour Huet et Thomassin, le jeu des allégories montrait la conformité de la religion d’Homère à la théologie chrétienne (voir Noémi Hepp, Homère en France au XVIIe siècle, Paris, Klincksieck, 1968, p. 319-334 ; 642-644).