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Pensées 418 à 422

M :Montesquieu 1726/1727-1755.
D :Bottereau-Duval 1718-1731.
E :1734-1739.
U :1739.
H :1741-1742.
J :1742.
K :1742-1743.
F :1743.
I :1743.
L :1743-1744.
O :1745-1747.
P :Damours 1748-1750.
Q :1750-1751.
R :Saint-Marc 1751-1754.
S :1754-1755.
V :1754.
JB :Jean-Baptiste Secondat ?-1795.
T :écriture des manchettes 1828-1835

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M : Montesquieu.
D : Bottereau-Duval_1721-1731.
H : 1741-1742.
P : Damours_1748-1750.
E : 1734-1739.
L : 1742-1744.
O : 1745-1747.
T : écriture des manchettes
JB : Jean-Baptiste_Secondat.
J : 1742.
K : 1742-1743.
F : 1743.
E2 :
I : 1743.
R : Saint-Marc_1751-1754.

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Pensées, volume I

418

{p.377}

Declamon italiene

(1) La declamation italiene est foible et ne peut estre bone dans le tragique parce qu’il est impossible de prononcer un mot soutenu parce qu’on finit toujours par une breve. Je ne scay pas encor pourquoy les vers rimes sont insuportables dans une comedie ou tragedie italiene come on me dit[1].
L’avantage de nos yiambes sur les trochees italiens est que les iambes frapent mieux les organes les [lettres biffées non déchiffrées] mots la longue qui finit le mot semble lui adjouter quelque chose la breve qui le finit semble lui otter quelque chose lors que nous voulons mouvoir un corps nous l’ebranlons et gardons toujours la grande percussion pour la fin il en est de meme des mouvemens de l’ame aussi les anciens pas mettoit ils des iambes dans les vers qui ls devoint se declamer afin de battre sans cesse l’oreille et a examiner la declamation italiene on voit bien qu’ils f que les Italiens font bien de n’avoir que des polichinels et des harlequins, ils c’est qu’ils ne… peuvent pas faire mi avoir mieux le tragique a besoin ... de force[2] et la prononciation italiene n’a pas cette force : la cadance dans la danse et la musique c’est de tomber {p.378} tout a coup affin d’ebranler l’ame touts les vers latin finissoit leur repos et le dernier pied par une longue et une breve estoit une licence ; voila je croy pourquoy la langue un[e] piece francoise ne peut estre bien traduitte en italien si fait bien une piece angloise c’est que l’anglois fait a toujours que des dactiles et finit de deux par des breves come l’italien il est vray encore qu’il y a une autre raison qui est que la langue francoise est plus pure et plus simple et l’italiene p[lettres biffées non déchiffrées] plus haute et plus elevée ce qui fait que ce qui est grand parmi nous est comun parmi eux et ce qui est parmi nous comun est pour eux insipide :
Les articles

Articles

dont notre langue est pleine empechent nos vers d’estre si serrés que les latins cela etend les mots quoy qu’il n’y ait que le meme sens les Grecs avoint aussi des articles mais ils les retranchoint quand ils vouloint. Ces articles sont des non valeurs. D’ailleurs il n’y a que les transpositions du genitif et du datif qui soyent permises en francois[3] nous avons notre cesure toujours au meme endroit mais les Italiens la mettent apres le premier le second ou le troisieme pied. Temoin les 3 premiers vers du Tasse[4]
Pos

Main principale M

419

{p.379}

Pays qui ont ete fort habités fort mal sains

Remarques que touts les pais qui ont esté beaucoup habités sont très mal sains. Ainsi le territoire de Rome devenu très mal sain l’Egipte devenüe tres mal seine ; aparament que les grands ouvrages des homes qui s’enfoncent sous la terre, les canaux, caves souterreins recoivent les eaux qui y croupissent[1] l’Egipte est sujette a la peste ce païs se detruit peu a peu et la destruction augmente par la negligence a entretenir les anciens canaux ainsi l’Egipte a cette peste toutes les années[2].

- - - - -

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420

{p.380}

Pascal

Le celebre argument de MrPascal[1] est bien bon pour nous doner de la creinte non pas pour nous doner de la foy. Epicure a fait des dieux pour n’estre pas traité come Socrate[2] il vouloit disoit il délivrer les homes du joug de la relligion mais la relligion payene n’estoit point un joug

Main principale M

421

N’est

Religion

il pas vray que l’autheur de la nature regarde d’un autre œil Denis le tiran qui pille les temples et Antonin et Trajan, ces princes pieux et et si zelés pour le paganisme. Donc quand la relligion chrétiene seroit fausse, il faudroit la garder guarder parce que nous plairons plairions plus a la divinité que si nous la violions.

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422

Ceux

Peines et recompenses

qui disent qu’il n’y a point de peines ny recompenses dans l’autre vie ne le disent pas en faveur des bons car ils les privent des recompenses. Ils ne le establissent donc {p.381} leur sisteme en faveur des mechans qu’ils soulagent de la peine il est vray que cet argument seroit plus fort la peine cet argument que le cardinal d[e] Polignac a mis dans son Lucresse[1] seroit plus fort dans … dans la loy de nature que ou une relligion qui n’admeteroit que l’equite que dans une loy qui admettant une revelation danne ceux qui ne croyent pas parce et ou l’enfer est det le paradis est distribué entre les croyans et les non croyans :

Main principale M


418

n1.

L’abbé Conti, comme Scipione Maffei, Muratori, rencontrés en Italie, Guiseppe Orsi (Voyages, p. 137, 147, 367-368), et Gravina (Shackleton, p. 90), dénonce les défauts de la rime et proclame l’excellence et l’utilité des vers blancs, dans le contexte du débat italien sur le vers tragique ; voir V. Gallo, « Lineamenti di una teoria del verso tragico tra Sei e Settecento », dans Il Verso tragico dal Cinquecento al Settecento (Actes du colloque de Vérone, 14-15 mai 2003), G. Lonardi et S. Verdino (dir.), Padoue, Esedra, 2005, p. 123-168.

418

n2.

L’abbé d’Aubignac avait déjà souligné la composante bouffonne du théâtre italien (Pratique du Théatre, Paris, A. de Sommaville, 1657, p. 147), dont la tragédie était éclipsée par les auteurs français (Corneille et Racine), en dépit des efforts de Gravina, Maffei et Conti, comme théoriciens et dramaturges (Gérard Luciani, « L’Aube de la modernité en Italie », dans L’Aube de la modernité (1680-1760), P.-E. Knabe et al. (dir.), Amsterdam – Philadelphie, J. Benjamins, 2002, p. 230).

418

n3.

Il s’agit des inversions (« transpositions ») de groupes de mots occupant les fonctions qui correspondent au génitif et au datif en latin (voir nº 285 et 251, note 3).

418

n4.

« Canto l’armi pietose, e’l Capitano, / Ch’il gran Sepolcro liberòdi Christo. / Molto egli oprò col senno, e con la mano : / Molto sudò nel glorioso acquisto ; » (« Je chante les pieuses armes, et le capitaine qui délivra le grand tombeau du Christ. Il fit beaucoup par son génie et sa valeur ; il eut beaucoup à souffrir dans cette glorieuse conquête », Le Tasse, La Jérusalem délivrée, A. Desplaces (trad.), Paris, Charpentier, 1845 ; Il Goffredo del Sig. Torquato Tasso […], Venise, G. Perchacino, 1581, « Canto primo », p. 2 – Catalogue, nº 2194).

419

n1.

Cf. Voyages, p. 125, 242, 259, 308 ; Réflexions sur les habitants de Rome (1732, OC, t. 9, p. 78) et Troisieme memoire sur les mines (1731, Voyages, p. 627). Les sources sur la question de la qualité de l’air et de ses effets pathogènes ont été répertoriées dans l’introduction de Sheila Mason aux Réflexions sur les habitants de Rome (OC, t. 9, p. 72-73).

419

n2.

Cf. nº 137.

420

n1.

Pascal, Pensées, L. Brunschvicg (éd.), nº 233.

420

n2.

Socrate fut accusé de ne pas reconnaître les dieux de la cité et d’introduire des divinités nouvelles. Cicéron évoque Épicure admettant l’existence des dieux pour éviter mécontentements et accusations (De la nature des dieux, III, 1, 3).

422

n1.

Sur le cardinal de Polignac (1661-1741), voir Voyages, introduction, p. 58 et p. 242-243, 246, etc ; Spicilège, nº 489a. L’Anti-Lucretius (« Lucresse »), qui visait, avec l’épicurisme, les systèmes athées qui s’en inspiraient, circula sous forme d’ébauches au début du XVIIIe siècle et demeura inachevé du vivant de l’auteur (Sylviane Albertan-Coppola, « L’anti-épicurisme », Dix-huitième siècle, nº 35, 2003, p. 309-313). Montesquieu a entendu lire le livre I à Rome le 4 juin 1729 (Voyages, p. 331-332). Deux traductions françaises paraîtront, l’une en vers préparée par Rothelin (l’abbé de Cormeilles) et publiée par Le Beau (Paris, 1747 ; Correspondance, Masson, t. III, p. 1008, 1101-1102), l’autre en prose par Jean-Pierre de Bougainville (Paris, 1749), bien après la transcription des articles nº 432, 435 et 437, écrits après le retour des voyages (1731) et avant l’intervention du secrétaire E (1734).